Danse avec la toile…

C’est une première : Factuel info organise un cycle intitulé « Cinéma et peinture » et présente six films de François Royet. Quatre peintres donc : Claude Monet, Jean Daligault, Gustave Courbet et Charles Belle. Pour terminer, nous avons choisi de vous présenter un film de François Royet sur une œuvre de Charles Belle : « Confiés à la forêt ». Un film poème…
Pour voir les films, cliquez sur le lien à la fin de l’article.

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Charles Belle marche dans la neige. Une toile immense et lourde sur ses épaules. Il peine. On peut lire : « Ce dessin plutôt que de l’exposer au regard des gens, je voudrais le confier à la forêt. ». La caméra se tient à distance. C’est son affaire à lui. Son rendez-vous avec la nature, elle, la sève et le lait, l’érotisme et le mystère. Elle généreuse de sucs, de senteurs, de traces. Elle qui lui a tout donné : chou mauve, feuille de figuier aux mille dentelles, rosier aux contours difficiles, herbes folles. Tendre une toile dans le ventre de la forêt, c’est donner à la nature, la possibilité de dessiner, d’imprimer sur la toile le temps qu’il fait et le temps qui passe. Et pour le peintre de redonner à la nature ses belles années d’intimité avec le végétal.

Loin de l’art et de l’argent, loin des musées aux planchers brillants, c’est dans une forêt qu’il va tracer d’un trait charbonneux, d’inextricables branches fondues dans le décor d’arbres liés entre eux par le silence, le cri du corbeau ou le hululement de la chouette.

Et le peintre s’en va.

Libre à la forêt de continuer l’œuvre. Libre au vent de faire danser la toile. Libre à la lune d’entamer des noces secrètes avec les reflets blancs. Libre à la pluie de la consteller de gouttelettes. Libre au givre de dessiner des stries. Libre au silence d’épouser sa beauté.

Charles Belle revient dans la neige. Ses pas crissent. Un peu plus tard la caméra s’approche. Le cinéaste est tapi là aussi derrière les arbres et les branches. Il lui faut du temps pour s’approcher de cette étrange intimité. Des fiançailles poétiques peut-être.

La belle endormie

La nature a son mot à dire et Charles Belle le sait. Quand on confie une toile à la forêt, c’est justement pour écrire autre chose ou qui sait, pourquoi pas, partager le geste artistique avec elle. La toile se soulève et le peintre joue avec elle. Des deux côtés de la toile.

C’est comme regarder une femme aimée. Lui qui parle de l’érotisme des fleurs, du lait des feuilles de figuier, des formes du chou, va encore plus loin. Là où les saisons jouent avec la toile. Là où un innocent bourgeon se pose devant elle apportant une légère couleur. Là où les feuilles comme un ballet de verts, et d’ocres plus tard, la magnifie.
Le peintre revient voir la belle endormie. De nuit parfois.

La caméra danse aussi, regard silencieux parmi les arbres. Regard avide de beauté. Quête d’un murmure dans le chant des arbres. Quête de la neige au silence blanc. De temps en temps la caméra s’approche. Le peintre entre dans la danse, ajoute de l’épaisseur au trait. S’étonne. Il s’immerge dans la matière charbonneuse. Que confie-t-il réellement à la forêt ? Les toiles ? Quelque chose de plus profond. Pourquoi tout ce noir ? Le cinéma regarde l’art sans capter l’intime. C’est mieux ainsi.

C’est une histoire de don. D’épousailles loin du monde. Là où le végétal palpite. Dans l’oubli des aiguilles du temps.
C’est une histoire d’amour que je vous raconte…

 

Pour voir le film, cliquer ici.

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