Besançon : le campement d’Arène démantelé

Deux bennes affrétées par la ville ont récupéré le matériel après que la police a emmené une trentaine de personnes. Les unes, demandeurs d'asile et mineurs, ont été hébergées par l'Etat et le département, les autres font l'objet de vérification et certaines pourraient être expulsées. « Cherchez un presbytère », a suggéré le préfet aux militants de SolMiRé...

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Le préfet du Doubs, Joël Mathurin, l'avait laissé entendre devant la presse, puis répété aux militants de SolMiRé qu'il a reçus la semaine dernière : le campement d'Arène qu'il estimait « illicite » a été évacué mardi matin par la police. Dans la foulée, une entreprise mandatée par la ville mettait dans deux bennes le matériel de camping, tandis que des militants tentaient de sauver des effets personnels et des tentes.

Une trentaine de personnes ont été emmenées au commissariat de police où leur situation devait être examinée. Certaines sont présentées comme déboutées du droit d'asile et pourraient être expulsées. D'autres, reconnues comme demandeurs d'asile, se sont vues proposer un hébergement après plusieurs semaines à la rue. Il faut rappeler que l'hébergement est un droit pour les demandeurs d'asile qui doivent être prise en charge par l'Etat le temps de la procédure, ce qui est loin d'être toujours le cas.

Evaluation de l'âge « au pifomètre »

Enfin, quatre mineurs isolés ont été pris en charge par le Conseil départemental. En séance plénière lundi, la présidente Christine Bouquin avait souligné que 77% des jeunes passant dans ses services sont en réalité majeurs. Une proportion que met en doute Noëlle Ledeur, de SolMiRé : « c'est selon leurs critères qui sont assez opaques : un faisceau d'indices relevant plutôt du pifomètre sur le comportement ou la manière de répondre, mais les réactions des jeunes qui ont vécu des situations terribles, peuvent être décalés par rapport à ce qu'on attend en Occident ».

Elle met également en cause les consignes données au personnel d'accueil du département qui doit adresser les jeunes qui se présentent non pas à l'Aide sociale à l'enfance, juste en face, mais à la direction enfance-famille de la collectivité... Autrement dit, ils sont envoyés non pas vers des travailleurs sociaux, mais vers les cadres du service. C'est ainsi qu'un jeune disant avoir 14 ans aurait ainsi été mis dehors alors qu'il venait chercher une aide.

« Cherchez un presbytère ou prenez-les chez vous ! »

L'opération d'évacuation a été anticipée par le règlement en amont de la situation des personnes vivant au campement et ne pouvant pas être expulsées. C'est le cas des demandeurs d'asile ou des dublinés. « Le préfet nous a laissé entendre qu'il n'avait rien contre le fait qu'il y ait quelques tentes, mais qu'à 17 ou 18 tentes on entrait dans "autre chose" qu'il ne laisserait pas faire », explique Thierry Lebaupin, du CDDLE.

Qu'est-ce que cette « autre chose » ? Sans doute des interventions plus intéressées que celles des militants humanitaires : mafia ou prosélytes religieux... Est-ce pour cela que le représentant de l'Etat a également suggéré à SolMiRé de « chercher un presbytère ou de les prendre chez vous » ? Une proposition qui a outré les uns et fait rire jaune les autres. « Si le but est qu'il n'y ait pas de campement, c'est réussi, mais le problème n'est pas résolu, des migrants vont continuer à arriver et la préfecture ne veut pas que ce soit visible... »

  • Pour mémoire, il y a 22 ans, l'évacuation « à la hache » de l'église Saint-Bernard à Paris, sur décision du ministre de l'Intérieur Jean-Louis Debré, vu aujourd'hui un peu vite comme un sage humaniste après qu'il a présidé le Conseil constitutionnel, fit irruption dans la politique française au point de contribuer au retour de la gauche au pouvoir un an plus tard. Lire ici l'analyse rétrospective de Philippe Boggio sur Slate.

 

 

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