Banque alimentaire : précarité des moyens également

Avec son réseau de près de cinquante associations, son partenariat avec quinze Centres communaux d'action sociale, l'organisme fondé en 1987 à Besançon fait face à l'appauvrissement de la population. L'Union européenne a remis en cause une partie de ses ressources.

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« Près de 120 tonnes d'aliments en plus à trouver et une réorganisation de l'activité de collecte », telles seront les conséquences de la chute du budget européen PEAD (voir encadré ci-dessous) pour la Banque alimentaire Doubs-Haute-Saône-Territoire-de-Belfort. Arnaud Hincelin, son délégué général, ajoute que cette baisse ne met pas en péril l'activité de la plate-forme des Prés-de-Vaux à Besançon, mais qu'elle compromet celle d'autres banques alimentaires et d'autres organisations caritativesLa Banque alimentaire du Jura à Champagnole (la plupart des bénéficiaires sont pourtant à Dole et Lons) assure plus de la moitié de son approvisionnement avec des fonds d'aide européens. Le Secours populaire à Besançon en dépend pour 80%. .  

Le Programme Européen d'Aide au plus Démunis deviendra Fonds Européen d'Aide aux plus Démunis en 2014 et connaitra une coupe budgétaire de 40%. Créé en 1987 de manière à redistribuer aux plus pauvres les surplus agricoles de la communauté européenne, son renouvellement a été remis en cause en 2012 (lire la suite).

Dans les locaux mis à disposition par la municipalité depuis 2005, près de la friche industrielle de la Rhodia, bénévoles et professionnels (150 bénévoles et 5 salariés pour le Doubs) déchargent et répartissent les arrivages du jour. Arnaud Hencelin précise : « La Banque alimentaire du Doubs, qui travaille maintenant avec deux associations de Haute-Saône à Marnay et Héricourt et deux dans le Territoire-de-Belfort, a cette spécificité de collecter l'essentiel de ses provisions localement. C'est près de 60% de nos réserves. Le transport et la logistique ont été organisés pour cela depuis plusieurs années. On collecte gratuitement les produits auprès des professionnels de l'agroalimentaire, des magasins et on les remet gratuitement aux associations qui, elles font la distribution aux personnes. Le reste de notre approvisionnement est issu pour 15 à 20% de la collecte nationale et 15 à 20% de fonds d'aide européens et pour une petite partie nationaux. » 

« Un géant aux pieds d'argile de plus en plus indispensable »

L'activité de la Banque a progressé aux cours des dix dernières années. « Bien que notre vocation soit de disparaître ! Nous avions de plus petits locaux, rue de Trépillot. Ici nous nous sommes agrandis dans des locaux d'abord provisoires. Nous étions ici jusqu'en 2010 au départ, dans 600 m2, puis nous en avons obtenu 600 autres il y a trois ans. Mais il y a le projet Rhodia et un nouveau déménagement à terme. La mairie vient de racheter le site pour l'euro symbolique. Nos bonnes relations avec la mairie nous font penser qu'une solution satisfaisante pourra être trouvée le moment venu. »

« Quand il y avait un stock de pâtes, certains disaient : ils n'ont qu'à manger des pâtes »

Une certaine évolution est rapportée par les responsables entre les anciens bénévoles qui ne voulaient rien jeter et les nouveaux, rigoureux et sensibles aux risques et à la dignité des personnes. A l'exemple récent de la viande de cheval vendue pour du boeuf... Une discussion a eu lieu sur la récupération ou non des produits concernés. Selon Michel Cugney : « cela a été perçu spontanément comme indispensable mais on s'est dit aussi, attention au risque de stigmatisation. Les produits sont corrects du point de vue sanitaire mais on les retire des étals pour tromperie et on les jugerait « bons pour les pauvres ». Cela ne peut pas être une décision unilatérale et condescendante. Elle doit être collective et choisie. Les associations qui sont en lien direct avec les bénéficiaires doivent être consultées. Et en tout état de cause, si cela était décidé, les bénéficiaires devraient être informés. » 

La Banque a connu aussi une période d'incertitude quant à sa représentation. Pendant presque un an, elle a été sans président. Si l'activité quotidienne s'est poursuivie, les partenaires étaient comme « en attente ». Michel Cugney est l'actuel président. Il défend la recherche d'un équilibre entre les valeurs fondatrices, lutte contre le gaspillage et partage de l'alimentation et une technicité de l'ensemble des personnels. Procédures et logistiques ont été renforcées. A la fois en raison de réglementations de sécurité alimentaire plus rigoureuses et pour faire face aux aléas passés et à ceux propres au mode d'approvisionnement. Quand Arnaud Hincelin est arrivé, en 2006, la Banque stockait 700-800 tonnes, à présent elle en a 1.700. Michel Cugney souligne que « 75-80% de nos approvisionnements sont aléatoires, c'est à dire non maîtrisés. Quand nous partons le matin, nous ne savons pas si nous aurons des yaourts, du sec, des fruits et légumes… Nous ne connaissons pas les dates de péremption. » Il est donc nécessaire d'avoir diverses possibilités et les moyens d'en faire bon usage. La Banque se veut « tête de réseau » au bénéfice de l'ensemble du secteur de l'aide alimentaire. Ses responsables disent dans un sourire qu'il faut « trouver un équilibre entre le professionnalisme, la gestion de l'organisation et le respect des valeurs. Pour faire preuve de sa générosité, il faut avoir plaisir à se retrouver dans l'activité et être rigoureux ».   
La croissance des stocks est permise par une organisation renforcée. Elle doit surtout répondre à des besoins qui augmentent. Selon Arnaud Hincepin, « il y a eu un pic des besoins d'aide en 2008-2009, ces derniers mois également. Les lieux de distribution voient venir davantage de monde. »   

 

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