Alexandra Cordier, le social-libéralisme assumé

Major de sa promotion de Sciences-Po Lyon, l'attachée de presse du cabinet du maire de Besançon Jean-Louis Fousseret, est la référente départementale du mouvement d'Emmanuel Macron, En Marche, pour le Doubs. Encartée nulle part, c'est une organisatrice efficace.  

Alexandra Cordier, référente départementale d'En Marche Doubs : « j'appartiens à la nouvelle génération de progressistes... » (Photos Daniel Bordur)

Référente départementale d'En Marche pour le Doubs, Alexandra Cordier avait le CV idéal pour le poste. Lors de ses études d'AES à Besançon, elle est « fascinée » par Bernard Lime qui la pousse à faire Sciences po. En 2006, elle sera major de sa promotion de master à Lyon, dans la spécialité Politiques urbaines, gouvernance, médiations et gestion de la ville. Après cinq ans à travailler l'été dans les boutiques Maty (dont son père est PDG) et un stage au service voirie de la ville, elle devient, une fois diplômée, chargée de mission à la direction régionale de la Caisse des dépôts, avant d'intégrer en 2008 le cabinet du maire de Besançon, Jean-Louis Fousseret, dans la foulée d'un passage au conseil régional de Bourgogne alors présidé par François Patriat... 

Pour la petite histoire, c'est son prof de dessin de terminale, Emmanuel Dumont, soutien historique d'Arnaud Montebourg à Besançon, qui l'a présentée à Jean-Louis Fousseret... Son intérêt pour la politique, sa curiosité pour l'actualité entretenue en famille, ses lectures, notamment Philippe Séguin qui l'a « le plus marquée », font le reste. Assurant la communication du chantier du tramway, elle s'en est plutôt bien tirée, faisant preuve d'efficacité pratique et organisationnelle.

« L'amitié » de Jean-Louis Fousseret et François Patriat

Elle a également une connaissance fine de la voirie et des transports. Elle a l'oreille du maire qui apprécie, dit-on, son sens politique et ses conseils. L'a-t-elle influencé dans son choix de soutenir Macron ? Elle sourit : « l'engagement du maire est plutôt liée à son amitié avec François Patriat... » Celui qui fut aussi ministre de l'agriculture de Jospin avait « suggéré » à l'élu bisontin d'assister au « lancement d'En Marche le 6 avril 2016 à Amiens... On l'a regardé sur internet... »

Au départ en retraite de Catherine Adam, personne n'a été surpris d'apprendre qu'Alexandra Cordier devenait la nouvelle attachée de presse de la ville, avec cette différence de taille, qu'elle demeure au cabinet : « j'aime dégrossir l'action municipale, dire aux Bisontins ce qu'on fait... » Est-elle de gauche ? La réponse est un sourire. Est-elle libérale ? « L'idée d'Emmanuel Macron permet de réunir les idées libérales et les idées sociales, pour débloquer le pays et proposer à un maximum de Français d'évoluer ». Comment est-elle devenue référente ? « L'équipe de Macron m'a sollicitée... Sans doute parce que ça lui été soufflé par Jean-Louis Fousseret... »

Un événement politique l'a-t-elle frappée ? « Je me souviens quand François Mitterrand est mort. J'étais en cinquième à Notre-Dame-Saint-Jean quand un professeur nous l'a annoncé. Je ne sais pas pourquoi, ça m'a marquée... Je suis de la génération Chirac dont la marionnette des Guignols de l'info disait « mangez des pommes ». C'étaient des caricatures qui rendaient sympas les politiques... » Elle n'a pris la carte d'aucun parti, mais dit fièrement : « j'appartiens à la nouvelle génération de progressistes ».

« Des fiches à enrichir localement sur tous les thèmes »

Qu'entend-elle entend par progressisme ? « C'est la valeur du travail, l'Europe profondément... On peut transformer tous ensemble un pays à partir du moment où on réunit les idées de progrès : on ne vote pas contre, mais pour ». Hum... Le macronisme est bien un objet politique encore mal identifié. On songe à cet article très documenté de Mathieu Magnaudeix sur Médiapart Dans les rouages de la « Macron Company » qui présente En Marche comme un « parti-entreprise » dont Emmanuel Macron est « le patron et la tête de gondole ». Alexandra Cordier n'est pas surprise : « En Marche se distingue du fonctionnement des partis ».

Elle nous rappelle la « démarche », les « 216.000 adhérents... » On la coupe : c'est combien l'adhésion ? « Gratuit ». Pas difficile d'adhérer alors, non ? « Je vous l'accorde... On nous demande d'encourager les personnes à créer des comités locaux afin d'être au cœur des propositions d'Emmanuel Macron à partir de fiches. Ce sont des guides à enrichir localement sur tous les thèmes. Les premiers ont porté sur la travail, l'éducation, la santé. Préalablement, Emmanuel Macron avait lancé un grand diagnostic en porte à porte qui était remonté à un groupe d'experts pour établir les propositions... »

Les comités locaux ont-ils fait le programme du candidat ? « Ils l'ont amélioré. Par exemple, il y a une volonté d'aménager le temps de travail et faire plus d'heures pendant un temps. C'est novateur... » Ce programme ne reste-t-il pas dans les grandes lignes, imprécis ? Alexandra Cordier renvoie au « temps de la co-construction , défend la méthode : « pour une fois, un politique arrive avec un projet non ficelé. Toutes les propositions des comités locaux sont remontées, quelqu'un au siège a pris en compte toutes les démarches... »

Giscard « c'était un autre temps ! Macron, c'est le candidat du 21e siècle... »

Mathieu Magnaudeix n'écrit pas autre chose dans Médiapart, mais parle d'une « démocratie participative très encadrée » en citant un animateur local du Loiret l'expliquant : « nous n'allons pas élaborer le programme dans les comités locaux, mais nous l'ajustons. Et il est possible de faire des propositions en envoyant des notes de synthèse. Cela permet de faire remonter les bonnes pratiques du terrain pour qu'elles soient reprises ». Notre confrère conclut : « les conclusions des comités locaux sont remontées à l'équipe de Macron qui centralise et trie les réponses », ce qui « permet de compléter à la marge le programme ».

En fait, la démarche n'a rien de très original. On la retrouve, avec plus que des nuances formelles, dans celle de la France insoumise qui a systématisé les tests des cantonales, par exemple celui de Majorité citoyenne dans le Jura. De nombreux partis politiques, syndicats, associations ont lancé des questionnaires participatifs. La campagne victorieuse d'Obama en 2008 avait impressionné, davantage que celle, ratée, de Ségolène Royal en 2007.

De la à ce que la dimension moderne du jeune candidat devienne un atout, et même un atout marketing renvoyant aux campagnes présidentielles de Jean Lecanuet (1965) et Valéry Giscard d'Estaing (1974), certains franchissent le pas comme Antoine Perraud, également dans Médiapart. On pourrait aussi citer Silvio Berlusconi dont Nicolas Sarkozy s'était peu ou prou inspiré... Alexandra Cordier rigole quand on lui parle de Giscard : « c'était un autre temps ! Emmanuel Macron, c'est le candidat du 21e siècle, qui nous fait entrer dans les révolutions numériques, celles de demain... »

« En dernière ligne droite, on ira dans les quartiers... »

N'est-il pas aussi le candidat dont le programme colle parfaitement à la feuille de route de la Commission européenne ? Elle opine : « Oui, ce sont ses engagements... » Cela ne risque-t-il pas de le handicaper dans la perspective d'un second tour  face à Marine Le Pen ? Alexandra Cordier en convient : « j'ai conscience du caractère volatil de notre électorat. C'est un mouvement encore jeune. C'est pour ça que nous faisons de nombreuses actions de terrain, une quinzaine par semaine dans le Doubs. On va partout, à Quingey et Arc-et-Senans, Montbéliard, Valdahon... Sur les marchés, les places, devant les commerces. Samedi, on a fait une distribution place Pasteur à Besançon, on a eu peu de rejet, les gens s'intéressent... »

Et Planoise et son vote populaire ? Planoise dont l'électorat de gauche s'est beaucoup abstenu lors des dernières élections ? « En dernière ligne droite, on ira dans les quartiers... On a déjà tracté à Cassin, aux Epoisses. Geneviève Firek, qui représente En Marche à Planoise avec Fannette Charvier, a fait une réunion au bar La Paloma, beaucoup de gens sont intéressés... A chaque réunion, on a 50 à 80 personnes, et même une centaine quand on a présenté le programme ». 

D'ici le premier tour de l'élection, la campagne bisontine d'En Marche passera par une réunion avec Corinne Lepage le 5 avril (17 h, salle Proudhon) et un meeting du candidat « la première quinzaine d'avril ».

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !