Sarkozy aux paysans : « on est sérieux, hein ! »

C'est un Nicolas Sarkozy en campagne électorale qui a participé à une table ronde d'une heure et demi dans la foulée de l'inauguration du salon de l'agriculture 2011. Curieux, il n'y a, parmi les sept invités à l'interroger, aucun producteur de lait, aucun breton, aucun normand, aucun lorrain, aucun franc-comtois...

Le président n'est « pas venu faire du folklore et poser avec Casimir ». Il loue « la passion » des agriculteurs, qu'ils soient « contents ou pas ». Il reconnaît que « tous » lui ont dit « le compte n'y est pas ». Il applaudit leur « volonté de se moderniser », défend une « agriculture centrale pour la puissance de l'économie française ». Il juge la campagne de France Nature Environnement "blessante, humiliante, contre-productive, insultante..."
Il annonce la parution au Journal officiel de deux décrets. Suggéré par la question d'un éleveur de porcs picto-charentais revendiquant « l'indépendance énergétique », le premier est relatif à la méthanisation par les agriculteurs qui doivent utiliser au moins 50 % de matières ou sous-produits agricoles.
Amené par l'inquiétude d'un viticulteur héraultais face à la pression foncière « urbaine et photovoltaïque », l'autre décret institue des commissions départementales de la consommation des espaces agricoles : « Pas un seul terrain agricole ne sera vendu sans l'avis de cette commission », assure Sarkozy qui s'avance sans doute un peu. Le texte du décret dit seulement que cette commission « peut être consultée » sur « la régression des surfaces agricoles » pour « avis sur certaines procédures ». « Peut » et non « doit ».
Il assure que « seule » la France a agi pour « régulation des marchés », mais son auditoire sait sans doute que la Russie l'a fait pour le blé... Il déplore la « volatilité des prix », approuve le « partage de la valeur ajoutée », exhorte à la « solidarité entre filières ». Mais qui est contre ?
Une éleveuse de brebis auvergnate demande la répercussion des hausses de céréales par la distribution, « que chaque maillon s'y mette ». Le président répond : « J'étais président quand on a transféré un milliard des céréaliers vers les éleveurs. Et j'ai eu de la paille, j'ai modérément apprécié... On ne peut pas être agriculteur comme il y a 20 ans, président aussi d'ailleurs... »

« Ne cédez pas à la tentation de l'extrémisme »

Il entend « nourrir les 6 bientôt 9 milliards » d'humains donc exporter davantage, et défend les « circuits courts ». « On a commencé, mais les lycées et collèges n'ont plus de cuisiniers mais des assembleurs », dit une productrice de fraises de Dordogne. Il répond : « Au moment des régionales, ils vous en ont promis des choses, ayez de la mémoire », faisant allusion aux socialistes à la tête de presque toutes les régions en France. La dame ajoute que l'Allemagne « augmente sa production de fruits et légumes quand la France descend ». Il rétorque qu'il n'y a « pas de Smic en Allemagne qui recrute des saisonniers turcs et polonais, ce qui pose le problème de l'harmonisation en Europe ». Il est « heureux que ça marche bien pour les céréaliers » et « scandalisé par la spéculation ». Il dit avoir « toujours pensé que ceux qui aiment l'argent ont la même névrose que ceux qui le détestent... »
Il doit sentir un brin de scepticisme car ses propos ne sont pas exempts de contradictions. Il supplie : « Ne cédez pas à la tentation de l'extrémisme, on est sérieux... » Il conclut : « J'essaie toujours de tenir mes promesses, hein, il faut que ce soit bien compris ! »

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