Les départements, victimes colatérales ?

C'est dans la logique du projet de réforme constitutionnelle. Et si elle conduisait aussi à la division par deux du nombre de parlementaires franc-comtois ?

Et si le projet de réforme constitutionnelle visant à supprimer 30% des parlementaires était une machine de guerre destinée, accessoirement, à achever les départements que la loi NOTRe a déjà dépossédés d'une partie de leurs anciennes prérogatives au profit des régions ?

Je m'explique. Aujourd'hui, il y a vingt parlementaires en Franche-Comté, douze députés et huit sénateurs. Avec la réduction annoncée, le poids moyen d'une circonscription législative passerait d'environ 116.000 habitants à 195.000 habitants. Aujourd'hui, on pondère cette moyenne en tachant d'avoir au moins deux députés par département, on en a aujourd'hui cinq dans le Doubs, trois dans le Jura, deux en Haute-Saône et dans le Territoire de Belfort.

Si la réforme va à son terme, et qu'on continue à raisonner au niveau départemental, on devrait arriver à huit députés : trois dans le Doubs, deux en Haute-Saône et dans le Jura, un dans le Territoire de Belfort. Mais que l'on raisonne au niveau franc-comtois, la moyenne tombe à six... Si l'on veut des circonscriptions pas trop inégales en population, il n'est pas difficile d'imaginer que de froids esprits aussi cartésiens que métropolitains fassent fi des limites départementales.

Quant aux sénateurs, s'ils passent de 348 à 244 au plan national, chacun ne représenterait plus que 275.000 habitants en moyenne, ce qui correspond à quatre pour la Franche-Comté... Un par département pourrait s'envisager pour le Jura et la Haute-Saône à peine moins peuplés que cette moyenne. Ce ne serait évidemment pas équitable pour le Doubs quatre fois plus peuplé que le Territoire de Belfort. On imagine sans peine que dans un cabinet ministériel des cerveaux bien techno songent à une circonscription réunissant ce dernier au Pays de Montbéliard...

Voilà comment la réduction de 30% du nombre de parlementaires pourrait conduire aussi à réduire de moitié le nombre de parlementaires franc-comtois ! Aujourd'hui ils sont vingt. Demain, ils pourraient n'être plus que dix.

Avec un peu de chance, on en récupérerait un, élu à la proportionnelle. Mais qu'ils soient dix ou onze, si leur rôle n'est pas réévalué par rapport à l'exécutif, que cela changerait-il à la monarchie jupitérienne ? Car l'accroissement du poids démographique des circonscriptions va fatalement éloigner un peu plus l'élu de l'électorat. Et le rapprocher des écuries politiques délivrant les investitures puisque les partis sont morts. Puisqu'on nous serine qu'il sera plus souvent à Paris et que ses assistants feront l'interface avec le terrain...

Au soir de l'élection de Macron, je songeais tout haut que la France allait tout droit vers l'américanisation de son système politique. Restera pour s'en approcher plus encore à légaliser le sponsoring politique par les entreprises : une piste pour un second mandat ? 

Un espoir demeure : que les choses ne se passent pas comme prévu.

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