Les artisans du bâtiment du Jura font plancher les candidats

La Capeb du Jura organisait le 31 mars une table ronde avec des représentants de quatre candidats (LR, FN, FI, EM) à la présidentielle autour de leurs programmes, avant de procéder à un vote de l'assemblée qui montre la méfiance des artisans, mais aussi leur préférence relative pour les propositions de Macron et Mélenchon.

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La salle des fêtes de Courlaoux a pris le 31 mars des allures de débat télévisé, avec pupitres, micro, décompte des temps de parole et animateur. Après son assemblée générale, la CapebConfédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment du Jura a tenu une table ronde avec les représentants locaux des cinq « principaux » candidats à l’élection présidentielle du 23 avril : Fillon, Hamon, Le Pen, Macron et Mélenchon. Las, à la dernière minute, le socialiste Marc-Henri Duvernet se désistait... 

Artisanat, logement, budget, apprentissage, formation et emploi ont donc été les principaux thèmes abordés pendant deux heures. Chaque représentant avait 16 minutes pour défendre son candidat et son programme.

C’est Paul-Henri Bard, secrétaire général de la Capeb Jura, qui a endossé le rôle d’animateur, micro-casque sur la tête. L’objectif pour les représentants locaux des candidats était de « faire preuve de pédagogie » sur les différentes mesures qui posent question dans le secteur de l’artisanat du bâtiment. Une tâche mal aisée puisque l’un d’eux a indiqué n’avoir pas compris lui-même ce que le candidat avait voulu dire...

La Capeb Jura se bat pour soutenir l’entrepreneuriat, combattre la concurrence déloyale, favoriser l’accès à tous les marchés, renforcer le dialogue social ou encore agir pour une protection sociale performante des chefs d’entreprise.

Valentin Morel (France insoumise), Cyrille Bréro (LR), Philippe Antoine (En Marche), Julien Acard (FN).

Fragments de réponses, candidat par candidat

Valentin Morel, vigneron bio à Poligny,
pour Jean-Luc Mélenchon

Valentin Morel a rappelé que Jean-Luc Mélenchon est contre l’ubérisation de la société, la concurrence déloyale, la précarité, « qui appauvrissent tout le monde ». « Nous voulons appliquer une concurrence pure et parfaite, loyale. »
Côté apprentissage, le candidat de La France insoumise veut revaloriser la filière professionnelle. Côté emploi et formation, l’objectif du candidat Mélenchon est de créer des mesures incitatives pour lutter contre ces accidents du travail, qui coûtent 12 milliards d’euros par an à l’Etat et ôtent la vie à un millier de personnes. Au programme de Jean-Luc Mélenchon figure également la fin des « dictats de l’Union européenne » afin notamment que ne soit plus imposé aux collectivités locales de passer des appels d’offres européens.

Orientation du budget. Le programme est le résultat d’un travail collectif avec l’économiste Jacques Généreux, a précisé à l’auditoire Valentin Morel. L’approche de son programme est « keynésienne, avec un plan de relance de 100 milliards d’euros » dans l’économie, pour des investissements écologiques et sociales utiles, qui devrait « augmenter les carnets de commandes ».  La remise à plat des aides publiques et exonération d’impôt ou de cotisation, permettra de juger de leur efficacité. « Par exemple, le CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) ne fonctionne pas, on le supprime. »

En conclusion. « Jean-Luc Mélenchon est le seul qui ait une vision globale de la société » ; « nous sommes des partisans keynésiens : l’Etat prend part à l’économie (en opposition à une économie ultra libérale) », a souligné Valentin Morel, son représentant. « Si la machine repart, ce seront des recettes fiscales supplémentaires. Et les discussions sur les cotisations chômage n’auront plus lieu d’être. »

Philippe Antoine, maire de Larnaud, conseiller départemental de Bletterans, pour Emmanuel Macron

Paul-Henri Bard a rappelé qu’Emmanuel Macron proposait une suppression du RSIRégime social des indépendants au profit de l’Urssafunion de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et allocations familiales, un « horizon qui effraie » les artisans du bâtiment. Philippe Antoine a précisé que le candidat ne toucherait ni aux cotisations, ni aux bases, ni aux taux. Le secrétaire général a conclu : « d’accord, on change juste la carrosserie, pas le moteur ».

Côté apprentissage, Philippe Antoine a rassuré l’auditoire : « les qualifications doivent être absolument maintenues, c’est un gage de qualité. Il est hors de question de les supprimer. » Le candidat d’En Marche dit vouloir assouplir les règles d’embauche et les lois concernant les apprentis. Son objectif est « d’envoyer de façon égale les élèves en filière générale et professionnelle ».

Côté formation, Macron propose de « mettre de l’argent dans le système » pour former des chômeurs longue durée ; les jeunes en fin de cursus sans qualification ; les salariés indépendants en rupture avec leur secteur », a détaillé Philippe Antoine, en précisant que les formations devront être « rapides, efficaces et adaptées aux besoins des entreprises ».

Côté emploi et retour à l’emploi, Emmanuel Macron veut renforcer les contrôles aux allocations chômage (avec suppression à partir de deux refus d’offres d’emploi correspondant aux qualifications).

Orientation du budget. Le candidat propose la rénovation d’un million de logements et la rénovation des bourgs centres, avec maintien des dispositifs fiscaux et allégement de l’administratif.

Conclusion de Philippe Antoine : « Emmanuel Macron est le candidat du travail et de la liberté d’entreprendre. La transformation de la société passera par un dialogue permanent avec les filières et la société civile ».

Cyrille Bréro, conseiller départemental de Lons,
attaché parlementaire de Jacques Pélissard,
pour François Fillon

« Le problème n’est pas l’auto-entrepreunariat, mais d’établir une équité au niveau des normes et des taxes entre artisans et auto-entrepreneurs », a déclaré Cyrille Bréro. Le candidat François Fillon propose l’abrogation de la loi Pinel (sur la défiscalisation) pour la simplifier.

Le « vague absolu » concernant la volonté du candidat Fillon de créer une caisse de protection des indépendants évoqué par Paul-Henri Bard n’a pas été vraiment dissipé : François Fillon propose de réformer le RSI (« un échec »), et d’encourager la prévoyance.

Le candidat Fillon est pour le développement de l’apprentissage. L’idée est de « détacher l’Éducation nationale sur le sujet pour confier l’apprentissage aux Régions et aux branches professionnelles », a expliqué Cyrille Bréro. François Fillon propose par ailleurs une « exonération totale des charges patronales » qui serait financée par la suppression des contrats de génération, des emplois d’avenir.

« Le candidat propose à des jeunes de 16 ans de devenir micro entrepreneurs. Cela va tuer l’apprentissage », a alerté l’animateur, « ça nous est incompréhensible ». Cyrille Bréro a rappelé l’intention de régionaliser les formations pour adapter l’apprentissage aux besoins du territoire. Avant d’ajouter que cette proposition serait « une ineptie » dans le secteur du bâtiment.

Orientation du budget. Le candidat LR est pour le maintien des dispositifs fiscaux concernant le bâtiment. François Fillon veut « mettre en place des programmes de requalification des centres anciens », et « libérer les travaux, le code du travail, pour libérer les énergies ».

En conclusion. « L’axe N°1 du programme de François Fillon est l’emploi. Offrir des cadres législatifs et une protection sociale plus adaptés ; diminuer les charges, réformer la formation, valoriser l’apprentissage ; rétablir équité des formes de travail ».

Julien Acard, conseiller municipal de Besançon,
pour Marine Le Pen

Le FN est favorable à la concurrence. La candidate propose une progressivité de l’impôt en fonction du chiffre d’affaires (15,5 % en dessous de 75 000 euros ; 24 % au dessus de 75 000 euros ; 33 % pour les grands groupes).

Paul-Henri Bard a rappelé les inquiétudes du syndicat sur les propositions de la candidate frontiste sur le régime social. A savoir la mise en place d’un régime spécifique, et la possibilité de choisir le montant de leurs cotisations. Julien Acard a confirmé la volonté de supprimer le RSI pour une affiliation au régime général et la volonté de mette en œuvre l’autodéclaration. « Beaucoup d’entre nous risquent de ne plus payer leurs cotisations dès demain matin ! », a souri l’animateur du débat.

« Marine Le Pen propose un développement massif de l’apprentissage. Comment ? », a interrogé Paul-Henri Bard. La candidate du FN propose l’apprentissage à partir de 14 ans ; la réduction des normes d’accueil ; et des aides à l’embauche pour pérenniser l’apprenti dans l’entreprise.

Côté emploi, le FN veut instaurer une « priorité nationale à l’emploi », « supprimer les produits qui ne correspondent pas à certaines normes ; taxer les biens importés à 3 % ». Pour Le Pen, la question de l’emploi est « celle de la croissance » avec « un retour à une monnaie nationale ».

La candidate Le Pen veut créer un grand ministère de l’aménagement du territoire, du logement et des transports. L’objectif est de « simplifier les normes d’urbanisation et de construction ». Elle propose le maintien et le développement des dispositifs fiscaux en vigueur. Elle souhaite le développement du logement social et de l’accès à la propriété privée.

« Marine (Le Pen) propose un projet de civilisation global », « l’activité économique n’est qu’un pan du programme ». Ces élections sont l’occasion de dire « stop ou encore », a conclu Julien Acard.

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