Le préfet du Doubs sur le gril des élus départementaux

A quelque temps de son départ en retraite, Raphaël Bartolt s'est plié à l'exercice du compte rendu de l'action de l'Etat devant le conseil départemental du Doubs. Après un service après-vente convenu de l'action gouvernementale, il a répondu en haut fonctionnaire courtois aux questions sur la fiscalité, le sanitaire et social ou l'environnement... Parfois précis, parfois moins...

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Comme chaque année, le préfet du Doubs est venu, mardi 26 juin, devant le conseil départemental pour délivrer un compte rendu de l'action de l'Etat sur le territoire en 2017. Haut fonctionnaire classé à gauche, bientôt sur le départ pour cause de retraite, Raphaël Bartolt a été en 1989 directeur de cabinet de Georges Sarre, secrétaire d'Etat aux transports du gouvernement Rocard, puis rapporteur du colloque de Villepinte de 1997 qui symbolise le virage sécuritaire des socialistes alors que Lionel Jospin crée la police de proximité, avant de diriger la campagne présidentielle de Jean-Pierre Chevènement en 2002...

Devant les élus du Doubs, le préfet n'a rien dit sur la partie de l'année correspondant au mandat finissant de François Hollande, mais s'est fait le relai du gouvernement, rappelant quelques propos de campagne d'Emmanuel Macron. « Le président de la République veut redonner du pouvoir d'achat à nos concitoyens », explique-t-il ainsi en réponse à une question du vice-président aux finances Philippe Gonon (UDI, Besançon) sur la réforme de la fiscalité locale. Puis, il ajoute aussitôt une petite phrase pas vraiment libérale : « c'est la consommation qui fait repartir l'économie ».

Carence dans le transport sanitaire

Il avait commencé son exposé par la police de sécurité du quotidien, le dispositif gouvernemental qui classe Planoise en zone de « reconquête républicaine »... Il a assuré que « la délinquance a baissé de 6% », que les faits constatés sont passés « tranquillement de 19.000 à bientôt 15.000 en deux ans ». Il a déploré les 17 morts sur les routes depuis le début de l'année, contre 10 en 2017 à pareille époque, insiste sur le fait que 14 tués sont sur des sections qui passeront à 80 km/h le 1er juillet.

De la sécurité au sanitaire, il n'y a qu'un pas qui passe par les pompiers « parfois en rupture » au point qu'il parle de « carence sanitaire ». Mais il faudra qu'il soit interpellé par Claude Dallavalle (DVG, Baume-les-Dames) lui rappelant l'avis favorable avec réserves sur le Projet régional de Santé, son groupe ayant voté contre, pour que le représentant de l'Etat s'exprime sur les transports médicaux d'urgence dont l'élu regrette l'absence dans le plan de l'ARS. Le préfet annonce que les transports auront finalement 2,5 millions d'euros sur la grande région.

Il reconnaît que « le Doubs est le plus impacté par les gardes ambulancières : j'ai alerté le ministère de l'Intérieur car nous risquons d'aller vers une crise durable, avec des carences en journée. La Bourgogne-Franche-Comté est la seule à expérimenter, dès le 2 juillet, le prépositionnement d'ambulances le jour. Ça commencera à Besançon, puis Baume-les-Dames... Les 24.000 missions des sapeurs-pompiers représentent 91% des appels au 15. En 2017, il y a eu 2900 carences dues au SDISService départemental d'incendie et de secours, c'est 900 de plus qu'en 2016... Nous avions déjà mis 600.000 euros supplémentaires l'an dernier, nous serons à un million cette année... »

Le « silence radio de l'Etat » sur les pollutions

Le sanitaire, c'est aussi les risques environnementaux, la « grande affaire » de la conférence Loue et rivières comtoise à propos de quoi le préfet cherche à positiver quand il parle de « diagnostic fiable, de bonne connaissance des enjeux, d'agriculteurs faisant de gros efforts comme on le voit avec le cahier des charges du comté ». Alain Marguet (DVD, Ornans) n'est pas plus convaincu que ça en pointant la « responsabilité de l'Etat » sur les « pollutions de l'eau aux micropolluants de l'agriculture, de l'industrie et des stations d'épuration ». Il cite des « problèmes d'épandage à la Rivière-Drugeon, Pont-de-Roide, Avoudrey, Charmauvillers... » face auxquels il n'entend que le « silence radio de l'Etat ». Il n'oublie pas non plus les soucis liés à « l'instruction des permis de construire qui dégradent l'environnement ».

Raphaël Bartholt apprécie peu : « Les sources d'Arcier et de Lons-le-Saunier sont parmi les dix meilleures de France. Qu'on me rende justice sur la transparence de l'Etat : tout est sur le site du ministère de la Santé. Sur les épandages sauvages, vous avez vu qu'il y a eu une peine de prison ferme, même si c'était pour de la bagarre... Les différents services de la police de l'eau travaillent avec les procureurs. Et croyez moi, sur le plan environnemental, la justice est très rigoureuse... » On aimerait le croire.

Le préfet poursuit : « Il y a toujours des épandages sauvages, mais il faut qu'on traite le problème du stockage hivernal des effluents d'élevage ». Il n'est pas le premier préfet à renvoyer ainsi la question aux calendes, laissant sous silence l'impasse du tout lisier où certains sont enlisés. Il sait cependant le sujet « frictionnel » dès lors qu'il est envisagé sous l'angle des protections, par exemple celles du classement en Natura 2000, par le biais du livret des bonnes pratiques de gestion de l'eau édité par le Parc naturel du Haut-Jura, ou de la « gestion topographique des prairies » annoncée par la chambre d'agriculture.

La galère des jeunes adultes au sortir de leur suivi par l'Aide sociale à l'enfance

Interrogé sur le silence de la préfecture sur l'affaire des contaminations de morbier et mont d'or de fin 2015, il explique : « la direction générale de l'alimentation m'a prévenu que c'était elle qui communiquait ». Plus d'un après, on appréciera la transparence... Mais Raphaël Bartholt insiste sur la multiplication des contrôles par dix : « il y a eu beaucoup d'entrants dans la filière morbier, il y avait de la pédagogie à faire... »

Magali Duvernois (PS, Bethoncourt) s'inquiète des risques de précarisation des jeunes majeurs suivis jusqu'à leurs 18 ans par l'Aide sociale à l'enfance : « 30% sont à la rue ! Un tiers des sans domicile sont passés par l'ASE... Seulement une tiers des jeunes passés par l'ASE sont sous contrat jeune majeur... » Estimant que les départements ne peuvent pas tous faire face, elle demande une péréquation nationale, et souhaite un « dispositif innovant dans le Doubs pour faciliter les transitions ». 

Ils étaient 163 en 2017 à sortir de l'ASE, répond le préfet en reconnaissant que ce moment rend « hyper fragile », d'où la nécessité d'avoir « très vite un logement et un petit travail ». Il signale la garantie jeunes qui « permet un travail avec les missions locales et 600 à 700 euros par mois ». En fait, l'allocation est plafonnée à 484,82 euros... et n'a rien à voir avec le contrat jeune adulte qui prolonge les aides au-delà de 18 ans. Il annonce une aide de l'Etat au département de 300.000 euros pour « créer cinq à six postes » d'accompagnement social... Il avait commencé sa réponse en évoquant les mineurs non accompagnés (migrants) qui étaient 127 dans le Doubs en 2017, dont 44 ayant été suivis par l'ASE avant leur majorité... Soit un sortant de l'ASE sur quatre.  

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