La vitalité de la recherche sur le sport

Lors d'un colloque universitaire en 2006 à Besançon sur l’enseignement du sport, l’entraînement et la pratique, les chercheurs s’interrogeaient notamment sur l’échec des enfants de milieux défavorisés

Alors que la rivalité Barthez-Coupet obnubile les supporters du foot tricolore, un colloque réunit cette semaine à la faculté de lettres de Besançon des centaines de chercheurs, d'étudiants et de praticiens de l'éducation physique et sportive (EPS). Venus de France, Belgique, Tunisie, Sénégal, Roumanie, Canada, leurs préoccupations sont pratiques, scientifiques et pédagogiques.
Entre conférences, détente et débats, ils abordent les préoccupations des enseignants et des élèves, des entraîneurs et des sportifs, compétiteurs ou récréatifs. « Notre conception du sport est très large, va de l'EPS à l'école à l'animation sportive en club, de l'entraînement des sportifs de haut niveau à la rééducation », dit Bernard David, agrégé d'EPS à l'université de Créteil-Paris 12, président de l'Association pour le Recherche sur l'Intervention en Sport, « société savante ayant vocation à mettre en réseau les chercheurs en sport de la francophonie ».
Marie-Paule Poggi, enseignante en fac de sport à Besançon (UFR-STAPS), s'interroge sur « l'échec des enfants de milieux défavorisés, y compris en EPS ». Avec d'autres, elle cherche à comprendre « comment le patrimoine culturel et familial est réutilisé à l'école ». Pas simple car « l'enjeu est la construction d'un univers commun de mots, gestes, signes, mouvements, déplacements corporels, maniements d'objets physiques et symboliques », indique la psychologue genevoise Maria-Luisa Schubauer-Leoni.

 

L'EPS favorise les garçons

 

On est loin du : « Tais-toi, regarde et fais comme moi » ! Le titre du quatrième colloque de l'ARIS est explicite : « co-construire des savoirs », ce qui va bien au-delà des gestes techniques du sport ou de la motricité. On parle de « négocier une référence commune entre professeur et élèves ». On partage ses connaissances sur les apprentissages, ce qui renvoit à des aspects insoupçonnés.
Francis Bergé (université Lyon 1) met ainsi l'accent sur l'estime de soi dans des enseignements d'« éducation à la santé et à l'égalité des sexes ». La question est pertinente parce que les filles, qui ont de meilleurs résultats globaux que les garçons, ont 1,5 point de moins en EPS au bac. Elles ne sont pas moins sportives, mais « l'EPS privilégie un rapport au corps utilitaire visant la performance et tend à délaisser un rapport au corps expressif », écrivent Julien Moniotte et Marie-Paule Poggi qui ont interrogé 110 lycéens de terminale.
Très influencés par la sociologie de Pierre Bourdieu, ils estiment que l'EPS favorise les garçons plus proches de la culture sportive », ceux qui « acceptent leur corps, or les filles sont soumises à des normes corporelles plus contraignantes », et les élèves « issus des milieux favorisés privilégiant la forme à la force, principale valeur des garçons défavorisés ».

 

Gestuelle et stratégie

 

Les Lyonnais Longchamps et Cogérino ont enquêté auprès de 178 lycéens et tordent le cou à l'idée d'un handicap supplémentaire des jeunes musulmanes : « elles tendent à avoir une estime de soi physique plus élevée que les non musulmanes », ce qui « remet en cause les croyances avancées par les enseignants et les représentations diffusées par les médias : les différences parfois attribuées à une cause religieuse pourraient plutôt être d'ordre sexué ».
Le colloque aborde mille autres sujets : la gestuelle de l'enseignant de handball, les liens entre théorie et pratique dans la formation des enseignants, la lutte contre l'obésité en zone d'éducation prioritaire, les stratégies en course d'orientation, la prédominance de la tactique et du psychologique chez les instructeurs de football, la danse chez les adolescents autistes, la représentation du corps chez les personnes âgées...

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