Fabrice Frichet, un ex socialiste passe à l’anti-corruption

Il y a un an, il quittait le confort de la majorité municipale pour conduire une liste d'opposition à L'Isle-sur-le-Doubs. Il anime désormais l'association Anticor dans le Doubs : trois dossiers sont entre les mains des juristes nationaux.

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Relèvement du seuil de mise en concurrence pour les marchés publics, fractionnement des marchés quand ce seuil est dépassé, conflits d'intérêts, cumuls des mandats, passages du public au privé, discrétion de certains enquêtes publiques... La liste des moyens qui mènent à la corruption n'est pas exhaustive. La puissance des lobbies peut ajouter à son efficacité, comme le montrent les coups de projecteurs sur les enquêtes judiciaires sur la fraude et l'évasion fiscales.

La corruption coûterait 120 milliards d'euros à l'Union européenne selon le premier rapport sur le sujet rendu à la Commission il y a un an. Depuis L'Appel de Genève de sept magistrats européens réunis en 1996 par le journaliste Denis Robert, qui restait dix ans après dubitatif quant à la volonté de lutter contre ceux qu'il appelle les criminels financiers, on a beaucoup parlé mais peu agi. Et les lanceurs d'alerte attendent toujours la protection qu'ils pourraient attendre.

Une liste à 38% et quatre sièges

Lanceur d'alerte, c'est ce que veut être l'association Anticor. Créée en 2002 par Séverine Tessier, l'association a désormais un correspondant dans le Doubs, Fabrice Frichet. A 38 ans, cet ancien militant socialiste est conseiller municipal d'opposition au maire PS de L'Isle-sur-le-Doubs, Rémy Nappey, dans l'équipe de qui il était durant le mandat précédent. Avec une équipe où figuraient des gens de droite et d'autres à gauche du PS, il a obtenu 38% et quatre sièges il y a un an.

« Avant les municipales, j'étais ambitieux, la campagne m'a recadré. Ça fait du bien d'en prendre plein la g... Je réfléchis au renouvellement des pratiques politiques. Elles sont usées... Je voudrais que les jeunes aient envie de s'engager. Au lieu de ça, ils sont blasés. Les élus montrent-ils l'exemple ? Ils sont de plus en plus éloignés. Un élu a le bras long pour un logement ou une subvention... Trois jours avant le scrutin, j'ai senti comme un retournement, on s'est dit quelque chose s'est passé... »

Mais quoi ? Pas de réponse. A moins que la réponse ne soit cet engagement dans Anticor... Nous lui posons la question : est-ce une prolongation de la politique par d'autres moyens ? « Oui ! Anticor est dans le Doubs depuis trois ans, a une quinzaine d'adhérents, des militants associatifs et quelques militants de gauche non PS ou du MoDem... »

Éthique et renouveau

Veulent-ils défendre des principes ? Témoigner ? « Ils sont là par éthique et pour du renouveau. On ne peut plus fonctionner comme ça ». Est-ce à dire qu'il s'agit de ne plus donner de chèque en blanc aux élus ? Fabrice Frichet en est persuadé : « la démocratie est participative. Il n'appartient pas aux élus de décider de tout ce qu'il faut faire. Aux municipales, on proposait par exemple un compte-rendu à mi-mandat... »

Anticor-Doubs a-t-il des dossiers qui seront les affaires de demain ? Il sourit, ne veut pas trop en dire : « il y en a trois, qui concernent la droite et la gauche, sur des conflits d'intérêts assez ambigus... On les a en mains depuis quelques mois. On les a envoyés au national qui les fait examiner par ses juristes... »

« Un engagement en droite ligne de la politique »

Outre l'étude des dossiers qui peuvent lui être soumis, Anticor donne des conseils. Comment peut venir la suspicion d'une corruption ? Quelques règles sont à observer : « quand une collectivité passe un contrat avec une entreprise pour un marché, la concurrence a-t-elle éta établie ? Le prix est-il fiable et juste ? ». L'eau est-elle matière à corruption ? « C'est le sujet le plus important à gérer », dit Fabrice Frichet qui trouve « hallucinant » que le prix de l'eau ait dépassé 6,30 euros chez lui...

S'est-il lancé dans la surveillance anti-corruption parce qu'il vivrait des temps de disette politique dans l'opposition ? « Au contraire », répond-il, « cela donne une vision supplémentaire. Les gens sont très attentifs, ça pourrait être un plus dans la vie politique du Doubs. C'est en tout cas un engagement en droite ligne de la politique : il porte sur l'usage de l'argent public ».

 

 

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