De Génération citoyenne au MRC

Frank Monneur et Didier Gendraud s'étaient émancipés de la tutelle du PS en présentant une liste autonome aux élections municipales de mars 2014 à Besançon. Forts de leurs 6,2%, ils préparent les municipales de... 2020 et viennent de rejoindre le Mouvement républicain et citoyen qui s'est rapproché de la gauche radicale pour les régionales.

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Frank Monneur et Didier Gendraud n'ont pas abandonné la politique après avoir obtenu 2255 voix (3,26% des inscrits, 6,22% des exprimés) lors des élections municipales de mars 2014. Non retenus sur la liste de Jean-Louis Fousseret, ils avaient fait une campagne dynamique au terme de laquelle ils avaient atteint leur objectif : dépasser 5% pour pouvoir éventuellement fusionner avec la liste du maire sortant, et accessoirement être remboursés de leurs frais de campagne. Les voilà qui réapparaissent sous la bannière du MRC, le mouvement républicain citoyen fondé par Jean-Pierre Chevènement qui l'a quitté en juin dernier.

Monneur au MRC, ce n'est finalement pas si surprenant de la part d'un ancien membre de l'aile gauche du PS dont il a été adhérent 19 ans. On le voit encore aux côtés d'Arnaud Montebourg lors de sa déclaration de candidature à l'élection présidentielle, en fait à la primaire socialiste, en 2011. Le professeur d'histoire bisontin se souvient aussi que certains de ses camarades socialistes le trouvaient, déjà, « chevènementiste ». Gendraud au MRC, c'est plus surprenant de la part d'un homme ayant passé 10 ans chez les Verts avant de faire un bref passage au PS.

Alors, quand et comment en êtes vous venus au MRC ?

FM : Ça s'est passé ces dernières semaines. On l'a acté avec l'équipe il y a un mois...
DG : ...des gens avec qui on était aux municipales, et quelques autres...

Sont-ils tous venus au MRC avec vous ?

FM : Non. Sur une trentaine, plusieurs n'ont pas souhaité adhérer tout de suite, mais ils ne restent pas loin, disent qu'on peut compter sur eux. Ce sont des sympathisants...

Avant le MRC, il y avait eu le MDC, mais ça n'avait pas trop pris à Besançon où il n'y a jamais eu que Jean-Loup Coly, vite reparti...

FM : Il avait été parachuté par Jean-Pierre Chevènement et connaissait assez peu de monde à Besançon... Ceci étant, les Verts sont 35, le PC 50, le PS 130 après plus de soixante ans de socialisme municipal... On n'a pas à rougir.

« Il faut tordre le cou à cette rumeur
selon laquelle on aurait tenté de
négocier avec Jacques Grosperrin »

 

On entend dire que vous avez envisagé une alliance avec Jacques Grosperrin entre les deux tours des municipales.

FM : C'est faux. Jacques Grosperrin a demandé à nous rencontrer. On est poli, on y est allé. On l'a écouté présenter son projet, on n'a rien négocié. Le lendemain, il nous rappelle : qu'est ce que vous faites ? Ce n'était pas notre histoire, on a dit non. Il faut tordre le cou à cette rumeur selon laquelle on aurait tenté de négocier avec Jacques Grosperrin.

Et avec Jean-Louis Fousseret ?

DG : Il nous a reçus, comme ça, ni bonjour ni merde, et nous a dit : combien ? Mais il n'était pas question de discuter de places avant de parler projet.
FM : Avec un FN à 9,5% au lieu de 11,5% au premier tour, ça aurait tout changé...

Vous y seriez allés ?

FM : On avait privilégié la fusion avec Jean-Louis Fousseret.
DG : On pensait qu'on pourrait discuter avec lui sur la base de notre score. On a eu la faiblesse de croire qu'on représentait quelque chose...

Avez-vous discuté avec le Front de gauche ?

FM : Non, mais on ne s'est pas battu avec eux. Chacun a mené sa campagne sans dénigrer l'autre...

Qu'avez-vous fait après les municipales ?

DG : D'abord, on était content...
FM : Ça s'est mal passé le lendemain du premier tour avec les socialistes...

« Au PS, il y a les indifférents,
ceux qui ne peuvent pas nous blairer,
et ceux qui nous aiment bien »

 

Y avez-vous gardé des amis ?

FM : Depuis les élections, j'assiste aux conseils municipaux et aux conseils d'agglomération. Ça en énerve certains. Au PS, il y a les indifférents, ceux qui ne peuvent pas nous blairer, et ceux qui nous aiment bien.
DG : C'est quand même plus sur le relationnel que sur des raisons politiques...

Et avec Jean-Sébastien Leuba que vous aviez critiqué en plein conseil avant que le maire ne vous désapprouve en direct ?

FM : J'ai ensuite démissionné de la présidence du groupe socialiste. Jean-Sébastien Leuba a été bien remercié avec une délégation très importante...
DG :c'est la délégation qui distribue les subventions. Il a dû impressionner le maire pendant le mandat 2008-2014...

Vous vous saluez ?

FM : Oui ! On a des rapports polis, courtois.

Qu'avez-vous fait depuis 2014 ?

FM : On a beaucoup travaillé avec l'équipe. On a monté l'association Génération citoyenne qui se réunit régulièrement sur les thématiques de la campagne. On a commencé à réfléchir à un projet municipal, on va améliorer le projet 2014 dans lequel le maire a repris des points...

Lesquels ?

FM : On était pour la suppression des correspondants de nuit. On nous répondait que ce n'était pas possible. Mais ce n'était pas un dispositif efficace : ils sont démunis, et même en danger dans certaines situations. Le maire a raison.
DG : Notre idée était de mettre davantage de police municipale de proximité la nuit.

Vous pensez ainsi mater les sauvageons, pour reprendre le mot de Jean-Pierre Chevènement ?

FM : C'est une présence rassurante. La police nationale n'a pas assez d'effectifs pour la nuit.
DG : L'îlotage simplifie les rapports, permet de désamorcer les situations délicates assez tôt.

« Le stationnement payant
entre midi et 14 heures,
c'est une connerie »

 

Quoi d'autre ?

DG : Les samedis piétons vont dans le bon sens, mais ça reste petit bras. On était favorable à la piétonnisation du centre-ville, mais alors il faut rendre le stationnement gratuit autour du centre-ville quand il y a un samedi piéton.
FM : Le stationnement payant entre midi et 14 heures, c'est une connerie.

Vous êtes dans une dynamique pour les municipales 2020 ?

Oui !

Ça demande un projet un peu plus étoffé !

DG : Oui !
FM : Dans notre programme 2014, nous voulions que Besançon soit une vraie capitale régionale. Maintenant, il faut penser à un statut d'ex capitale régionale... On n'a pas de programme aujourd'hui, seulement des grands axes sur lesquels travailler. On va créer une forme politique nouvelle.
DG : On veut que les gens qui sont avec nous soient comme dans une formation politique locale. Quand on discute avec nous, ce n'est pas seulement nous mais un groupe constitué qui nous dépasse. Cela nous parle aussi de nous retrouver sur les valeurs de la république. On parle trop peu de culture à Besançon alors qu'il y a moyen de faire quelque chose. On parle trop peu de tourisme. On ne sera plus une capitale régionale, mais on restera les plus proches de la Suisse qui a la richesse, les touristes, les liens industriels...
FM : Il faut avoir des ambitions pour la ville. On a l'impression qu'on veut faire beaucoup de choses, mais on n'y met jamais assez les moyens.
DG : Faut-il encore  construite des logements quand il y en a tant de vides ?
FM : Il y a des gros chantiers aux Vaites, et bientôt aux casernes Vauban, qui mettent du temps à sortir. Ça va faire 2000 logements en plus...
DG : ...et combien d'habitants en moins ?
FM : ET que va-t-il se passer sur l'université ? On a l'impression que ni la Ville ni l'exécutif régional ne se battent pour l'université. Des filières s'en vont : les facs de lettres et de droit sont sacrifiées. On met l'accent sur l'ENSMM, les écoles d'ingénieurs et la médecine, tant mieux, mais les sciences humaines sont abandonnées.

Il y a quand même le chantier de la MSHEMaison des sciences de l'homme et de l'environnement !

FM : Il faut des filières et des étudiants. C'est ce que Dijon a compris.
DG : Il faut mettre de l'argent, comme l'ont fait Belfort et Montbéliard.
FM : Et puis, quel est le projet pour Saint-Jacques ? Quand on en parlait lorsque nous étions élus, on nous répondait : l'urbanisme, ce n'est pas vous. Or, on savait depuis 2004 que Saint-Jacques allait se vider. Rien n'a été anticipé.
DG : Les instances participatives qui travaillaient dessus ont été arrêtées.
FM : Il y a eu des ateliers citoyens, on a postulé, mais on n'a pas été retenus... Il y a 7,5 hectares à transformer. On défend des partenariats public-privé : des logements en partie privés pour financer des espaces publics : des jardins, une grande crèche centrale, des logements intergénérationnels mixant des résidences pour personnes âgées non dépendantes et des studios étudiants où des services aux personnes âgées permettraient de diminuer les loyers...

Les partenariats public-privé sont des montages pas toujours très clairs...

FM : Le 6 rue de la Madeleine est un bon exemple de ce qu'on peut faire.

« Cela pose quand même problème
que notre jeunesse raisonne comme ça.
Les 18-24 ans votent davantage FN que PS ! »

 

Avant les municipales de 2020, il y aura eu la présidentielle de 2017 et les régionales dans deux mois...

FM : La préoccupation de 2017, c'est l'extrême droite. La parole politique ne vaut plus grand chose. Les politiques ne comprennent pas les situations sur le terrain. Un exemple : j'ai demandé à mes élèves de seconde, en enseignement moral et civique (EMC) d'écrire une page sur un fait d'actualité. La majorité a repris ce qu'on entend beaucoup sur les réfugiés, en reprenant la parole de Le Pen sur les migrants qui viennent, le complot... Il faut l'entendre. Ce qui se passe en Syrie, ils s'en foutent. Ils ne voient que des étrangers musulmans qui viennent. Cela pose quand même problème que notre jeunesse raisonne comme ça. Les 18-24 ans votent davantage FN que PS !

Le MRC a signé dans la région un communiqué commun avec le PCF, le PG, Ensemble et Nouvelle Donne. Comment envisagez-vous les régionales ?

DG : L'idée du communiqué, c'était d'appeler les Verts à rejoindre une alternative à gauche... Mais ils ont dit non. La liste PS semble faite pour la défaite, c'est dommage de ne pas l'avoir davantage ouverte.
FM : Ils ont loupé l'occasion. Dans ces conditions, ce n'est pas illogique qu'il y ait la construction d'autre chose...

Avec vous ?

FM : On est néophyte au MRC. On démarre, on ne sait pas comment ça va aboutir...
DG : On n'est pas d'extrême-gauche mais d'accord pour une alternative à gauche.
FM : A un moment, il faut laisser sa bannière de côté et voir quel projet à gauche on peut construire. Le PC est structuré, dans une majorité PS à Besançon, dans la majorité régionale en Bourgogne... Il faut laisser la rhétorique de côté... Les Verts ne viennent pas. Il y a une envie commune [des cinq signataires du communiqué], mais des difficultés à montrer de la proximité avec les citoyens : ce sera difficile dans dans une grande région.
DG : A aucun moment les citoyens n'ont mandaté le politique pour faire cette fusion. Maintenant elle est là...
FM : C'est comme le référendum de 2005 : trois ans plus tard, il passait par le soupirail parlementaire...

Avez-vous envie d'être conseillers régionaux ?

DG : Ça dépend du projet.
FM : On ne peut pas s'avancer plus aujourd'hui.
DG : On n'en est pas à vouloir une place pour la place...

Qu'avez-vous apris de vos mandats municipaux ?

FM : Qu'il ne faut pas s'arrêter aux "c'est pas possible" quand on a un projet.
DG : Qu'il faut dire aux services : "expliquez-moi comment ce serait possible". C'est l'honneur de l'élu. 

 

 

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