Conseil municipal de Besançon : toujours sous tension

Quand les dossiers sont techniques (mutualisation ville-agglo, ajustements budgétaires, constats...), le conseil municipal ronronne. Alors les sempiternelles questions relatives à la sécurité et aux migrants refont surface de façon pas toujours très saine. A noter l'unanimité sur l'université.

migrants

« Pas de remarque, pas d'opposition, c'est adopté ». Une bonne cinquantaine des 68 dossiers soumis au vote du conseil municipal de Besançon de ce lundi 12 décembre, ont été adoptés ainsi en quelques secondes. Le maire lit le titre du dossier, guette l'assemblée pour voir si quelqu'un veut s'exprimer, et passe au point suivant. C'est qu'il est aussi le gardien du temps, il veille à ce que les séances ne s'éternisent pas. Bien sûr, ces dossiers ont fait l'objet de présentations, voire de de discussions, en commission, mais elles ne sont pas publiques.

Une absence de débat suppose donc un assentiment général. Parfois l'opposition prend la parole pour expliquer un vote, poser une question. Il arrive alors que le maire s'exclame, notamment quand la question est technique : « on ne va pas refaire un débat de commission ! » Pourquoi pas, c'est souvent intéressant de savoir ce qui a conduit à telle ou telle décision. Cela n'empêche pas qu'un dossier passant comme une lettre à la poste puisse être important. C'était le cas du premier, « autorisant le maire à accomplir certains actes de gestion courante » et comprenant huit pages de marchés publics inférieurs à 5,225 millions d'euros et de marchés de fournitures et services inférieurs à 300.000 euros.

Huit pages et 9,6 millions d' « actes de gestion courante »

Au total, il y en a pour plus de 9,6 millions. Cela va des 59.485,50 € pour le chauffage et la ventilation du Pavillon du Directeur de l'Observatoire aux quatorze marchés de restructuration du pôle Tilleuls-MJC de Palente représentant plus de 3 millions, du passage au synthétique du stade des Orchamps (632.398,90 €) à la réalisation d'un documentaire sur le Musée de la Résistance et de la Déportation (33.331,95 €), du renfort de la surveillance de la piscine-patinoire Lafayatte (40.000 €) aux prestations de services traiteurs que se partagent quatre sociétés pour un maximum de 180.000 €...

Les transferts de la ville à l'agglo passent aussi sans combat. Tout juste si Ludovic Fagaut (LR) estime la mutulualisation « lourde et complexe », suggère qu'on « sorte des schémas pyramidaux » et qu'on « s'inspire du monde de l'entreprise ». Classique. « Cela n'a pas de gros effet pour l'instant, mais on est passé de deux à un directeur général des services, un DRH, un directeur des services techniques, un directeur financier... Nous avons bien rationalisé, mais il y a des besoins nouveaux, comme le numérique », dit Jean-Louis Fousseret.

« Si vous pensez que je peux instrumentaliser la presse... »

En ouvrant la séance un quart d'heure plus tôt, il avait rendu hommage au sculpteur Ousmane Sow, disparu le 1er décembre, prenant appui sur son héritage pour dénoncer « les haines, les stigmatisations, la dureté, le racisme... » Le leader de la droite, Jacques Grosperrin était revenu dans une allocution alambiquée sur le départ de neuf élus LR et UDI, lors du dernier conseil, les amenant à ne pas avoir à se prononcer sur la motion anti-migrants du FN : « nous ne sommes pas partis pour nous défiler... Nous ne voulons pas mettre à mal des gens en situation difficile ou en souffrance. Vous connaissez notre valeur républicaine, notre attachement à l'immigration et notre attachement à une main ferme. Nous sommes partis quand les journalistes n'étaient plus là, et l'un est revenu à votre appel... »

M. Grosperrin fait erreur, il restait à cet instant l'auteur de ces lignes. Jean-Louis Fousseret hausse les épaules : « si vous pensez que je peux instrumentaliser la presse... » En politique rompu, il avait dès le lendemain adressé aux rédactions un communiqué dénonçant la droitenous ne l'avons pas publié, ayant tout dit sur le débat. En fait, divisés en novembre, droite et centre ont tenté de se rabibocher publiquement en présentant une autre motion sur les migrants, visant à départager ceux qui « jouent avec le cœur des gens pour nous faire accueillir toute la misère du monde » et ceux qui « jouent avec la peur des gens pour nous faire refuser tout soutien aux personnes en péril ».

La motion de la droite sur les migrants rejetée

Ce faisant, la motion de la droite refuse « d'accueillir ceux qui confondent la patrie des droits de l'homme avec la patrie des avantages sociaux » et souhaite que le conseil se saisine de « la question du profil, du nombre et du financement de l'accueil des migrants ». Elle a été rejetée par la majorité de gauche. Dans la foulée, se présentant comme un « modéré », Philippe Mougin (FN) « exigeait » du maire qu'il « retire [ses] propos [l]'ayant taxé de raciste : ce sont des injures scandaleuses, la grande majorité des Français ne veulent pas de migrants économiques ». Jean-Louis Fousseret refusant d'obtempérer, M. Mougin, seul élu d'extrême-droite en l'absence de son colistier, quittait la salle. 

La thématique sécuritaire donna plus tard lieu au débat le plus long de la séance à l'occasion de l'examen du « dispositif de tranquillité résidentielle et de médiation » qui remplace les correspondants de nuit. Examen est un bien grand mot puisqu'il n'aura pas été question de cette action financée par les bailleurs sociaux, la ville, l'agglo et l'Etat. Elle consiste à faire intervenir chaque jour deux binômes de deux agents et un coordinateur pour « faire respecter le règlement intérieur des immeubles, contrôler l'accès aux parties privatives, collecter et transmettre des informations (notamment en vue de contentieux), porter aide et assistance » et appeler la police si besoin.

Consternante discussion

En fait, la discussion, tendue, fut un remake de nombreux débats déjà tenus au sein du conseil : armement de la police municipale, diminution des effectifs de police nationale sous Sarkozy, faible participation électorale à Planoise où « les électeurs de gauche sont passé de 2200 à 1200, environ 700 passant au FN », reproche Michel Omouri (LR). « Ils ne sont pas allés chez vous », rétorque Jean-Louis Fousseret. « Qu'ils votent FN n'a pas l'air de vous déranger », conclut Omouri qui avait assuré un instant auparavant : « avant on brûlait les poubelles, maintenant il y a des règlements de compte à la kakachnikov ».

Conclusion de cette consternante discussion : le projet est voté par la majorité, l'opposition LR-UDI-MoDem votant contre. Elle vote également contre la décision modificative du budget, les ressources budgétaires et certains tarifs, le projet de reconversion de la caserne Vauban. Sur ce dernier point, Pascal Bonnet (LR) explique que c'est vote d'opposition à la politique du logement de la municipalité.

Consensus « républicain » sur l'université

Une motion de soutien à l'université, « force indispensable à Besançon », a été votée à l'unanimité. Dans un contexte de mobilisation de la faculté des lettres et sciences humaines contre des suppressions d'heures de cours, elle appelle tous les candidats à l'élection présidentielle à s'engager sur des moyens pour l'enseignement supérieur et la recherche. Présentée par la majorité municipale (PS-PCF-EELV-SC), elle a été légèrement amendée à la demande de la droite qui souhaitait voir supprimée la référence au plan Fillon 2007.

« Toute austérité éducative ou universitaire nous met en difficulté », a souligné Christophe Lime (PCF) en acceptant la proposition de la droite afin d'obtenir un vote unanime. Anthony Poulin (EELV) a cependant rappelé que le plan Fillon a « introduit la logique de la concurrence entre les universités ». « Si ce plan avait été mis en place, il n'y aurait plus que douze universités en France, il n'y en aurait plus à Besançon », a tonné Jean-Louis Fousseret, refusant dans un premier temps la suppression demandée par la droite, avant finalement de l'accepter au nom du « consensus républicain ». 

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