Besançon : des Gilets jaunes déclarent la manifestation de l’acte 10

Une soixantaine de personnes ont approuvé ce principe après que ses initiateurs ont proposé un parcours contournant la préfecture pour éviter les incidents. Ils ont demandé à la police d'éloigner du cortège la brigade anti-criminalité « qui insulte les Gilets jaunes ». La préfecture refuse le passage par le tunnel sous la Citadelle. Des street-médics pourraient se mettre en place.

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Deux Gilets jaunes bisontins ont déposé une déclaration de manifestation en bonne et due forme à la préfecture du Doubs, ce mercredi 16 janvier pour l'acte 10, samedi 19 à 14 heures. Elle est assortie d'un itinéraire évitant soigneusement la proximité immédiate de la préfecture. Il s'agit d'un circuit partant de la place de la Révolution et y revenant, passant par le pont Battant, le quai de Strasbourg, les avenues de l'Helvétie et Edouard-Droz, le pont Bregille, l'avenue Gaulard, le tunnel sous la Citadelle, l'avenue de la Gare d'Eau, les rues du Porteau, Chifflet et Ronchaux, puis la Grande rue, la place du 8-Septembre et la rue des Granges.

La préfecture a « pris acte » de la déclaration « sauf pour le tunnel » pour des raisons de sécurité. Le récépissé invoque les difficultés d'évacuation des enfants ou des personnes handicapées et fait référence au risque d'incendie provoquant une panique. Il rappelle l'utilisation de pétards et de fumigènes le 12 janvier susceptible de favoriser ce risque.

La décision de déclarer l'itinéraire a été pris mardi soir à Besançon lors d'une réunion nocturne en plein air à laquelle ont participé une soixantaine de personnes. Relayée par Facebook où nous l'avons suivie, comme plus de 2200 internautes, elle a duré quasiment deux heures. Deux membres du groupe Facebook Les Didier entrent en résistance en ont pris l'initiative et argumentent. « On veut déclarer pour que les gens qui ont peur puissent venir », dit l'un en expliquant espérer qu'une déclaration met à l'abri des violences des « 50 casseurs sur 2000 » et de certains policiers dont les oreilles ont dû siffler.

Refus des flash-ball !

« Ça fait deux week-end que la BAC insulte les gilets jaunes », entend-on, prélude à une séquence de remontrances scandalisées, notamment par l'épisode du parking Saint-Paul. « Il y a une enquête », assure quelqu'un. « Un mec de la BAC a une tête de mort sur l'épaule », ajoute un autre. « C'est inadmissible », renchérit une voix. « C'est la police à Macron ! »

La situation de « deux gamins de 19 ans » interpellés et placés en garde-à-vue « parce qu'ils ne savaient pas qu'il fallait partir après les sommations » est évoquée. Il s'agit d'éviter que cela se reproduise. Pour cela, estiment plusieurs gilets jaunes dans la discussion, il faut que les flash-balls ne soient plus là : c'est, dans l'esprit d'un Didier la contrepartie de la déclaration de la manifestation. « On va y aller pacifiquement », ajoute-t-il, « et s'il y a débordement de la police, il faut que cela soit dit », souligne-t-il à l'intention des journalistes présents.

D'une rencontre avec des officiers de police pour préparer la manifestation de samedi, ils pensent avoir débouché sur une forme d'accord. Ils ont aussi fait passer un message : « on a demandé que la BAC ne soit plus présente aux abords du cortège, pour notre sécurité et la leur. On nous a répondu qu'une enquête avait été ouverte dans l'après-midi [mardi]. On leur a dit que si ça ne se passe pas bien de leur côté, ça chiera. Ils nous ont dit que les flics en civil étaient là car il y a beaucoup de cailloux sur le rond-point à la sortie du tunnel et que certains ont été retrouvés à la préfecture... »

Depuis, on l'a vu, le passage sous le tunnel est interdit.

Défendre l'hôpital et la Sécu de 1945

Avant la discussion sur l'itinéraire, un employé de la santé a annoncé la perspective d'une convergence des gilets jaunes avec des « blouses blanches » du CHU et des Ehpad. Il propose notamment de défendre l'hôpital, construction de « la Sécu de 1945 », de remettre en selle la prise en charge à 100% « alors que maintenant il y a un reste à charge ». Ce syndicaliste qui ne met en avant son engagement a des mots simples et concrets, il est applaudi. Il va plus loin et propose une réunion pour mettre en place des groupes de « street-médic constitués de médecins, pompiers, aides-soignantes, infirmières, secouristes » pouvant intervenir en cas de coup dur sur une manifestation...

Pas mal de questions ont été évoquées, mais chacune d'elle nécessiterait d'y consacrer du temps de préparation, de maturation, de réflexion, d'échanges... C'est le cas de l'hypothèse d'un service d''ordre propre aux gilets jaunes, mais une voix admet qu'on est bien loin du fameux SO d'antan de la CGT. Celui-là même qui dégageait sans ménagement les casseurs des rangs des cortèges ouvriers il y a plusieurs décennies...

Il a beaucoup été question de communication, du brouillage d'images né de la profusion des groupes Facebook. Faut-il les unifier ? Certains le pensent, d'autres non, d'autres encore estiment la question secondaire, certains ne vont pas sur les réseaux sociaux... Derrière ce débat, on devine les différences, voire les divergences, entre groupes ayant occupé des ronds-points et créé des groupes Facebook. La Borne jaune est ainsi une scission de Chateaufarine après l'agression d'un photographe de Radio Bip... On sent que certains ont des affinités avec les gilets jaunes de Dole, d'autres avec ceux de Belfort. Des rendez-vous sont pris aller dans le Jura et dans le Territoire où doivent converger des Alsaciens et des Lorrains...

Un militant du Frexit éconduit

Un jeune homme tente de faire la promotion des idées de François Assélineau, candidat du Frexit à la présidentielle. Il est vite bloqué dans son intention : « on a compris, on a pas besoin d'Asselineau », dit une militante syndicale qui « marche sur des oeufs ». « Ça commence à m'énerver », dit quelqu'un d'autre... Un brouhaha s'ensuit d'où sort un « on n'est pas là pour ça » qui met fin à la tentative récupératrice.

Deux femmes n'avaient jamais participé à quelque mobilisation que ce soit. L'une explique ses graves difficultés de vie avec un enfant handicapé. Quelqu'un propose une méthode de comptage quasi infaillible : chacun vient à la manif avec un bouchon en plastique que ramasseront des préposés tenant des grands sacs. La discussion échoue sur la sécurité des porteurs de sacs... Quelqu'un propose que « des milliers » de personnes portent plainte contre Luc Ferry : « tout politique qui veut faire tirer sur la population doit être poursuivi, ces gens-là ne doivent pas se sentir impuni... »

Un vieux routier des réunions met le doigt sur une contradiction : « on a une personne qui anime et donne son avis à chaque fois, ça la met en posture de chef, je ne sais pas si c'est assumé, mais c'est une position de meneur... » Autrement dit, en contradiction avec le caractère horizontal du mouvement, sa méfiance à l'égard des représentants institués. Il propose de séparer les rôles : animateur, distributeur de parole, preneur de note... Se sentant visé, un des Didier est « d'accord » mais assure donner son avis au même titre que chacun... En fait, il voit plutôt le fonctionnement proposé s'appliquer à des réunions bien préparées, sur des thèmes. Or là, on est dans l'urgence : « on a géré car on a bossé, donc on a des trucs à dire... »

L'un des dernier est le projet d'une marche blanche, dimanche à 14 heures pour les gilets jaunes décédés... Les réseaux sociaux diront où...

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