Sondages : attention aux coups de fourchettes dans les yeux !

Un sondage annonçant la victoire du FN effectué avant celui prédisant celle du PS ou de l'UDI selon la configuration du second tour, a été publié après. Du coup, le FN paraît progresser alors qu'il baisserait. Mais ces enquêtes sont-elles crédibles quand la marge d'erreur, due à la faible taille de l'échantillon, est supérieure à l'écart entre les candidats ?

Le conseil régional de Franche-Comté lors de la dernière séance...

Un sondage ne fait pas l'élection. Soit. Et deux sondages ? Trois, douze ? Et les commentaires qu'ils inspirent ? Tous les candidats que nous rencontrons en parlent, s'inquiètent, se réjouissent. Tirent des plans sur la comète.

Animateur du meeting socialiste de lundi 30 novembre à Besançon, Michel Neugnot, tête de liste en Côte d'Or, commentait à la tribune les dernières enquêtes parues dans les quotidiens régionaux : « le second est antérieur au premier qui nous place en meilleure position », disait-il pour souligner la progression de son camp que la non chronologie de leurs publications pouvait masquer tout en laissant penser que le FN montait d'une enquête à l'autre...

Un sondage Ifop paru dans les quotidiens du groupe Crédit Mutuel (L'Est républicain, Le Progrès, le Bien public, Le Journal de Saône-et-Loire) place, au second tour, Marie-Guite Dufay en première position dans le cas où elle fusionnerait avec l'Alternative à gauche et EELV, et si le MoDem n'atteint pas 5% et ne fusionne pas avec la liste de François Sauvadet (UDI-LR) qui l'emporterait dans le cas contraire. Réalisé avant, du 17 au 23 novembre, un sondage BVA commandé par le Syndidat de la presse quotidienne régionale plaçait Sophie Montel (FN) en situation d'emporter le second tour. Mais comme les titres du Crédit mutuel ont quitté le SPQR, ils n'en ont pas publié plus tôt les résultats...

Marge d'erreur de 4 à plus de 5%

Ce qu'il faut surtout retenir, c'est la très grande incertitude des indications données par ces sondages. Le sondage Ifop a été réalisé auprès de 748 personnes. La marge d'erreur pour des intentions de vote entre 30% et 40% (ce qu'auraient en gros les trois listes annoncées au second tour) est de l'ordre de 3,2% à 3,7%, ce qui constitue une fourchette de 6,4% à 7,4% dans laquelle se situerait le résultat final. Or, avec une abstention annoncée à 50% (marge d'erreur de 3,5%), l'échantillon interrogé sur de probables votes, tomberait à 374 personnes, soit 47 personnes pour chacun des huit départements, compte non tenu de leur population qui va de un à quatre entre le Territoire-de-Belfort et la Saône-et-Loire... Et avec un échantillon de 374 personnes, la marge d'erreur monte entre 4,6% et 5,2%, soit une fourchette de 9,2% à 10,4%...

Le sondage BVA a été réalisé auprès de 797 personnes (544 en Bourgogne et 361 en Franche-Comté) dont 30% n'ont pas indiqué d'intention de vote. Bref, il n'en reste que 558 à dire une préférence. Dans ce cas, la marge d'erreur pour un score de 30%, proche de ceux prêtés au FN et à l'UDI-LR aux deux tours et au PS au second, la marge d'erreur est de 3,9%, donc une fourchette de 7,8%.  A 20%, le score prêté au PS au premier tour, la marge d'erreur est de 3,5% et la fourchette de 7%...

Le MoDem à 3% d'intentions, soit entre 1% et 5% !

Quant aux résultats du premier tour, ils sont aussi délicats à manier. Les listes Alternative à gauche et EELV sont respectivement créditées par l'Ifop de 8,5% et 7%, ce qui leur permettrait de fusionner avec une liste ayant plus de 10%, en l'occurrence le PS. Mais la marge d'erreur entre 5% et 10% des intentions de vote, se situe entre 2,2% et 3,2%. Autrement dit, le score d'EELV serait situé entre 4,8% et 10,2%, l'AG entre 6,3% et 11,7%... Le MoDem serait à 3%, soit entre 1% et 5,3% si l'on tient compte de la marge d'erreur... BVA l'avait placé à 5%. Pas étonnant dans ces conditions, avec de si petits échantillons, que Debout la France n'ait aucune prévision en Franche-Comté et 3% en Bourgogne...

Bref, dans les deux sondages, on avance des hypothèses contradictoires, mais surtout avec des résultats dont les écarts sont bien inférieurs aux marges d'erreur. Les commentateurs qui en tirent des conclusions politiques sont bien imprudents. On comprend aussi qu'ils hésitent à critiquer les sondages payés par les éditeurs.

On n'est pas au rugby, mais il y a des coups de fourchettes dans les yeux qui se perdent !

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