Se parler à gauche : une association bisontine dans les tuyaux

Issue des tenants d'une primaire de toute la gauche opposée aux « dérives libérales » du gouvernement et donc à François Hollande, EDGE (Espace de dialogue des gauches et des écologistes) sera créée en octobre et tentera d'animer des débats publics sur l'emploi, l'éducation, les inégalités, l'Europe, les nouveaux modes de production, la démocratie...

hollande

L'association Espace de dialogue des gauches et des écologistes de Besançon est sur les rails. Elle est issue des débats initiés au sein des promoteurs de Notre primaire qui défendaient une primaire de toute la gauche, parallèlement à l'appel Primaire de gauche. Mais cette sélection n'aura pas lieu dans le périmètre souhaité et EDGE devrait voir officiellement le jour le 13 octobre lors d'une assemblée générale extraordinaire. Réunis jeudi 8 septembre, une vingtaine de militants - socialistes critiques, communistes, écologistes et non encartés - ont poursuivi la démarche entreprise localement avant les vacances. Elle relayait un projet national qui n'a pas atteint l'objectif d'une primaire « de Mélenchon à Macron » comme l'auraient souhaité certains au PS, mais a débouché sur une primaire écologiste et une primaire socialiste qui inspire quelque méfiance tant elle semble taillée pour François Hollande.

A Besançon donc, le noyau dur d'EDGE regroupe ceux qui tentent d'exister politiquement entre La France insoumise et le social-libéralisme. Entre l'écolo Claude Mercier et le conseiller de Barbara Romagnan Marcel Ferreol, l'ancienne tête de liste communiste aux régionales de 2010 Evelyne Ternant et l'ancien premier adjoint de Robert Schwint Jacques Vuillemin, il y a pas mal d'expérience politique. La démarche a suscité l'intérêt au-delà de Besançon : deux Montbéliardaises, dont l'élue municipale Martine Chenus-Marthey, ont fait le déplacement.

« Se parler car la gauche est toujours diverse »

« Depuis dix ans, on n'a pas arrêté de s'envoyer des piques sur nos différences d'approche », constate Claude Mercier. « Il faut laisser l'anecdotique enterrer l'anecdotique », en conclut Daniel Boucon, membre du CESER.Marcel Ferreol veut voir plus loin, à moins qu'il n'ait déjà anticipé la défaite annoncée à la présidentielle de 2017 : « Quel que soit le scénario [qui adviendra], il y a une nécessité de refondation, mais la condition, c'est de se parler car la gauche est toujours diverse ». Le communiste Alain Boussard est du même avis : « on ne se résout pas au retour de la droite ou à l'arrivée de l'extrême-droite. L'émiettement à gauche va devenir irresponsable à mesure qu'on se rapprochera de l'échéance ».

Jacques Vuillemin, très présent dans le courrier des lecteurs de L'Est républicain, redescendu dans l'arène car « très critique » du gouvernement et du PS dont il est membre depuis plus de 40 ans, veut « apporter sa pierre car le moment est grave, que se creuse le fossé entre élite et citoyens. La force d'un parti, ce n'est pas la discipline mais le débat, le doute ». On appréciera la charge de la part d'un ancien officier.

« Une candidature unique sur un programme de gauche »

Evelyne Ternant a déjà tourné la page Notre Primaire : « on pourrait laisser tomber le terme pour donner un objectif : une candidature unique sur un programme de gauche ». Elle fait partie des cadres du PCF qui n'ont pas apprécié que Mélenchon parte en campagne sans l'aval du parti il y a plusieurs mois. C'est que le candidat de 2012 du défunt Front de gauche considère que les partis sont hors jeu, quoique pas inutiles, quand le PCF a fixé sa décision au 5 novembre, tout en invitant tous les prétendants à la Fête de l'Huma.

Marcel Ferreol souligne que « des gens croient encore » à une primaire de la gauche de la gauche : « Piketti a appelé Mélenchon et Montebourg à ne pas jouer perso... » Sébastien Coudry, militant socialiste et soutien bisontin de Karine Berger, signale que d'autres primaires frémissent au centre avec La Primaire des Français et ailleurs avec La Primaire.org à laquelle un « poly-artiste magicien » belfortain se revendiquant de Coluche, s'est présenté en proposant trois mesures de gauche qui ont eu 46 voix...

EDGE sera-t-elle audible dans une campagne démagogique ?

A quoi servira EDGE ? A débattre, bien sûr. Le premier thème proposé, la démocratie, permet de lancer quelques pistes. « Les élus ne savent plus écouter. J'ai vu des rendez-vous lors desquels les élus parlaient plus que les citoyens venus les voir ! Il faut accepter les critiques », s'agace Jacques Vuillemin. « C'est difficile de faire vivre les conseils citoyens, la démocratie participative ne se décrète pas », dit une Montbéliardaise. « Le lien social naturel est souvent détruit par l'institution qui avait été créée artificiellement pour le maintenir », ironise Isabelle, une adhérente PS. « Il ne faut pas oublier la démocratie dans les entreprises, la réforme territoriale, les oppositions aux grands projets », souligne Evelyne Ternant. Ni le CETA en embuscade derrière le TAFTA...

« La loi travail donne plus de pouvoir aux syndicats dans les entreprises », assure le retraité Jean-Claude Moniotte qui fut délégué CFDT des Compteurs Schlumberger et soutient pour sa part le bilan Hollande. « Le taux de syndicalisation a baissé depuis », lui répond Catherine. « La discussion de branche n'a jamais empêché le dialogue dans l'entreprise », dit un autre syndicaliste. « C'est passionnant d'apprendre des expériences multiples », s'enthousiasme Sébastien Coudry.

Les autres thèmes (combattre le chômage, éducation et formation, réduire toutes les inégalités, faire émerger de nouveaux modes de production, quel projet européen) seront-ils audibles dans une campagne qui s'annonce violente et démagogique ?

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