Marie-Guite Dufay un peu dans l’opposition à Macron

La présidente du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté a des mots assez durs contre la baisse des dotations qui prive la collectivité de 20 millions par an. Mais le dialogue rompu au niveau national avec l'État est maintenu localement car, a-t-elle dit lors de la session de rentrée, « nous avons besoin d'avancer ensemble ». La droite n'est pas très à l'aise, l'extrême-droite implose en gardant ses fondamentaux.

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Les démissions de deux solides vice-présidents francs-comtois, celle de la Doloise Sylvie Laroche (apprentissage et formation professionnelle après un mandat consacré aux lycées en Franche-Comté) venant après celle de Denis Sommer, devenu député LREM, ont entraîné un jeu de chaises musicales faisant pencher un peu plus l'exécutif régional côté bourguignon. Dix des quinze vice-présidents sont bourguignons, cinq sont francs-comtois. Le rapport de forces géographique était de neuf à six auparavant...

Marie-Guite Dufay n'y voit pas malice et considère qu'on ne raisonne plus selon les anciennes entités régionales, mais selon une seule et même région... On constate que la moitié de l'exécutif est de Côte d'Or et de Saône-et-Loire avec quatre vice-présidents chacune, quand le Doubs a deux vice-présidences et, bien sûr, la présidence. Les cinq autres départements ont chacun une vice-présidence.

Valérie Depierre vice-présidente

Deux nouveaux vice-présidents font leur entrée dans l'exécutif, la Jurassienne Valérie Depierre qui sera en charge des formations sanitaires et sociales et des personnes handicapées, et Jean-Claude Lagrange (Saône-et-Loire) qui hérite du développement économique. La Belfortaine Maude Clavequin récupère l'enseignement supérieur jusque là chapeauté par la Dijonnaise Océane Charret-Godard qui reprend la formation continue...

Les missions des conseillers régionaux délégués sont également redistribuées. Les deux remplaçants des démissionnaires, le Montbéliardais Eric Lançon, et Jurassien Willy Bourgeois, s'occuperont de sport et de préparation des Jeux olympiques 2024 pour le premier, d'économie numérique pour le second. Lançon est agrégé d'éducation physique, Bourgeois a été responsable des relations avec la presse d'Arnaud Montebourg...

« Notre industrie se relève »

En ouvrant la session de rentrée du conseil régional, vendredi 13 octobre, Marie-Guite Dufay se « réjouit » que « pour la première fois depuis 2011, l'industrie crée à nouveau des emplois stables (...) Notre région beaucoup souffert [de la crise mondiale], mais notre industrie se relève. Je vois partout des entreprises qui investissent, innovent, se heurtent aussi à la difficulté de trouver des compétences, ce qui renforce notre détermination à agir sur la formation et l'orientation, et la sensibilisation des parents et des enseignants aux métiers de l'industrie. Nous aurons une campagne de communication en début d'année sur ce sujet ».

La présidente insiste aussi sur un budget de l'agriculture qui, avec 5 millions supplémentaires, a le plus augmenté de tous. Elle défend la « structuration des filières pour produire plus de valeur ajoutée et mieux la répartir », dit vouloir « favoriser l'alimentation à partir de produits locaux » avec un objectif pour les cantines [des lycées] de 50% de produits locaux et 20% de produits bio. Ce « et » change pas mal de choses par rapport à ceux qui confondent local et bio en mettant un « ou » entre les deux mots dans leur communication, on songe par exemple à la ville de Besançon.

Dialogue rompu avec l'Etat, mais pas au niveau local...

Si l'on s'interrogeait sur son positionnement vis à vis de la macronie, on est désormais fixé : elle est dans une opposition, disons raisonnée. Elle dénonce la « décision brutale du gouvernement » de diminuer la dotation aux régions, soit 20 millions de moins pour la Bourgogne-Franche-Comté. « Je suis solidaire de la colère de l'ensemble des régions », ajoute-t-elle à un discours écrit à peine plus soft : « la méthode n'est pas bonne... Les présidents de régions ont tendu la main au gouvernement pour négocier sur la façon dont la dotation dont nous avons bénéficié en 2017 pourrait être intégrée de façon pérenne à la fraction de TVA dont les régions bénéficieront demain... Pour l'heure, le dialogue est rompu entre Régions de France et l'État. J'ai fait savoir à Mme la préfète que ce dialogue est maintenu au niveau local tant nous avons besoin d'avancer ensemble... »

Ce dialogue est également facilité par les bonnes relations que la présidente entretient avec François Patriat, l'ancien président socialiste de la région Bourgogne, qui préside désormais le groupe des sénateurs LREM. Tous deux se sont montrés ensemble à l'heure de la pause-déjeuner... 

François Sauvadet, le président du groupe LR-UDI-DVD, est moins incisif que d'habitude. Il compatit aux deux « départs qui ne sont pas des moindres » dans l'exécutif. Il évoque la baisse de l'investissement de 3,3% décelée par la Caisse des dépôts. Il souligne « l'ambiguïté » de la position du gouvernement sur Alstom : « il nous vend une fusion entre égaux, or il y a un acheteur et un acheté ». Il conseille à Marie-Guite Dufay de rencontrer les dirigeants de Siemens et Alstom, de « parler avec la région Grand Est ». Elle lui répondra plus tard : « mieux vaut qu'on participe à la constitution d'un groupe européen plutôt qu'être absorbés un jour par des Chinois... »

Gare de Franois : Neugnot promet des solutions

Sauvadet fustige la méthode de Michel Neugnot à propos des suppressions d'arrêts des TER Dijon-Besançon dans trois gares dont celle de Franois : « les maires les ont découvertes dans la presse. Elles n'ont pas été évoquées lors du dernier comité de suivi ». A la tribune, le premier vice-président en charge des transports lève les bras au ciel. Avant l'ouverture de la séance, nous l'avions interpellé sur le sujet. Il n'en démord pas : « c'est une problématique technique, nous mettons trois trains supplémentaires. Il y aura des solutions pour ceux qui viennent de Dole, il y a davantage de gens qui descendent à Dannemarie-sur-Crête... » Ça promet pour la réunion publique qu'il tiendra le 25 octobre à Franois...

Julien Odoul, le nouveau président du groupe FN réduit à 15 membres sur les 24 élus de la liste Montel, est sans surprise. Il cogne sur « l'Etat fautif » dans l'assassinat des deux jeunes Marseillaises par des « islamistes qui ont juré de nous anéantir. N'en déplaise aux autruches du vivre-ensemble, le combat contre l'islamisme est celui de l'époque alors que nous avons laissé prospéré le mal, la délinquance, le hallal dans les cantine et le burkini sur nos plages... Notre collectivité doit être aux avants-postes en arrêtant les subventions à [certaines] associations ou l'aide de 1000 euros [aux migrants]... »

« Vous avez soutenu Macron, vous en payez le prix»

Lui aussi déplore la « fusion-annexion » d'Alstom. Il félicite la présidente tout en la moquant : « vous êtes partie de la conférence territoriale [avec l'Etat] : très bien, mais Emmanuel Macron avait dit dans sa campagne qu'il mettrait les collectivités au pain sec, c'est la mort des services publics. Vous l'avez soutenu, vous payez le prix de votre engagement. La suppression des contrats aidés est une folie... »

Le président du groupe majoritaire, Jérôme Durain, est tout miel avec le François Sauvadet : « j'ai entendu du bon Sauvadet, vous êtes constructif... Sur le fond, vous partagez l'essentiel de ce que nous faisons... » Il est plus critique envers le « contexte national », joue de la métaphore cinématographique à propos d'Emmanuel Macron : « un président, ça trompe énormément, nous irons au paradis fiscal... »

Il déplore les 13 milliards de moins pour les collectivités locales : « pour assumer les compétences issues de la loi NOTRe, les 20 millions [qui manquent] étaient nécessaires... » Il dénonce la « recentralisation », revendique le « soutien aux services publics », défend la politique de la majorité régionale qui veut « outiller les territoires dans l'ingénierie », critique la vision gouvernementale : « nous ne sommes pas d'accord avec le point de vue selon lequel il n'y aurait pas de salut hors de la métropolisation... »

L'extrême-droite s'éparpille

Sophie Montel, à qui Marie-Dufay a donné la parole, ce que conteste mollement Gilles Platret car pas prévu par la conférence des présidents de groupe, estime que la baisse du chômage est « en trompe l'oeil » après l'adoption de la « loi travail XXL ». Désormais membre de Les Patriotes, qui ne peuvent constituer un groupe faute de réunir dix élus, elle assure qu'elle ne « change pas de convictions politiques en changeant de parti... Depuis le départ de Florian [Philippot] le FN est sans colonne vertébrale. Je dis à mes anciens collègues : vous ne pourrez rien faire sur l'immigration ou les travailleurs détachés tant qu'il y aura le carcan de l'Union européenne... »

Mais l'extrême-droite ne se refait pas. Elus FN et patriotes votent ensemble contre les subventions aux organisations syndicales de salariés qui figurent dans le premier rapport présenté...

Un peu plus tard, on réalise que ce n'est pas en deux entités que l'extrême-droite s'est divisée, mais en trois. Outre le groupe FN résiduel de quinze membres et les sept patriotes, deux élues se distinguent à l'occasion de l'élection de la nouvelle commission permanente : Karine Champy et Valérie Redl. Un consensus avait été trouvé pour l'établissement de cette commission de 33 membres dont la présidente plus 32 répartis à la proportionnelle : 17 pour la majorité, 8 pour l'union droite-centre, 5 pour le FN, 2 patriotes.

La liste était réputée adoptée sans vote au bout d'une heure, mais Mme Redl se déclara candidate et réclama un vote à bulletins secrets. Elle espérait ainsi obtenir quelques voix d'élus FN que certains considèrent comme des « malgré nous ». Hélas pour elle, si Mme Redl déposait bien sa candidature, elle omettait de demander le vote à bulletins secrets dans les formes et le délai imparti. Du coup, le vote à mains levées donna le même résultat que la liste bloquée... Et l'on ne sut pas si l'initial groupe FN était scindé en trois ou en quatre entités !

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