La gauche bisontine cherche à se réinventer

Les initiateurs de Notre primaire, socialistes de gauche, militants PCF ou EELV, citoyens non encartés, cherchent les moyens de construire un programme alternatif au libéralisme et battre François Hollande. Ils devraient créer une association à la rentrée.

primaire

Les partisans bisontins de Notre primaire vont-ils se constituer en association ? Lors de leur dernière assemblée, le 23 juin, ils ont renvoyé la question au 8 septembre pour une « réunion constitutive » de ce qui pourrait s'appeler Espace de dialogue des gauches et des écologistes. La vingtaine de présents ne voulaient pas décider aussitôt. Trop de questions se posaient encore, quelques jours après que le conseil national du PS eut enfin adopté le principe d'une primaire dont nombre d'observateurs ont dit qu'elle était taillée sur mesure pour François Hollande.

Ce faisant, souligne Marcel Ferreol, l'un des animateurs de l'appel local, ces observateurs ont omis d'évoquer la présence d'une petite phrase dans la résolution ne fermant pas la porte à une « grande primaire » ouverte aux communistes et aux écologistes qui ne semblent pas pressés de la franchir. Ils ont trop peur d'être engagés dans une opération de « sauvetage du soldat Hollande » alors qu'ils considèrent que le président de la république est un obstacle politique et symbolique majeur à l'union de la gauche.

La primaire, une occasion
de battre François Hollande ?

C'est ce que dit Évelyne Ternant, secrétaire régionale du PCF : « Notre initiative appelle à une alternative à la politique du gouvernement, mais on ne peut pas la construire avec des représentants de cette politique. Le PS est pris dans une contradiction interne entre deux lignes politiques. Et même si François Hollande perd la primaire, son courant sera présent à l'élection présidentielle ».

La députée Barbara Romagnan ironise : « Vous vous doutez bien de mon envie de faire campagne pour François Hollande ou Manuel Valls ! Mais si on commence par dire qu'on ne veut pas d'eux, on ne va pas avancer et on risque de s'aliéner des gens avec lesquels on peut faire des compromis intéressants. Si on veut aller au deuxième tour, il faut éliminer ceux qui ne conviennent pas ». Autrement dit, résume Marcel Ferréol, la primaire est l'occasion de battre François Hollande. « Il ne doit pas être candidat. Des tas de gens ne participeront pas à la primaire s'il l'est. Je ne suis pas d'accord avec la théorie des deux gauches [irréconciliables]. Il vaut mieux se mettre d'accord sur ce qu'est la gauche », dit Ariane Gallet, communiste, mais aussi militante à l'UNEF et compagne de Nuit debout. 

« Nourrir le débat législatif »

L'écologiste Claude Mercier saute carrément l'étape électorale en défendant la constitution d'une association : « C'est de l'après-primaire dont on parle. Et les ateliers devront nourrir le débat législatif. Cette association doit prendre sa place dans le paysage local pour poser la question de la construction de la gauche ». Le communiste Alain Boussard estime nécessaire d' « installer un lieu de débat par delà les échéances électorales ». Le socialiste Sébastien Coudry constate qu'un tel lieu « n'existe pas à gauche hors de la constitution de listes électorales ou d'accord électoraux ». Évelyne Ternant défend une structure « visible » dont « l'objet soit la refondation de la gauche assumant sa diversité et son projet commun ».

Les réticences initiales à la perspective associative s'estompent. «Si la question de la structuration est posée d'emblée, le débat ne peut pas avoir lieu », avait dit l'écologiste Michel Boutanquoi qui préfère que l'on commence par « mettre en place des ateliers ». Et puis, Marcel Ferreol pose une limite, un « verrou » à inscrire dans les statuts : l'association « s'interdira d'intervenir dans les questions électorales ».

La primaire : débattre d'un programme plutôt qu'un casting

Bref, elle doit avant tout permettre le débat. S'agira-t-il de « réinventer la gauche » comme le suggère le titre de l'histoire du PSU récemment publiée par l'historien Bernard Ravenel ? Établir des similitudes entre l'époque de la création - en 1960 - de ce petit parti foisonnant d'idées et aujourd'hui comporte le risque de commettre des anachronismes. N'empêche, dans les deux cas, la social-démocratie vit une grave crise d'identité en tournant le dos à ses valeurs en exerçant le pouvoir. Elle intensifiait alors la guerre d'Algérie qu'elle avait mandat d'arrêter. Elle fait aujourd'hui adopter des mesures contre lesquelles se dressent de larges pans de sa base sociologique.

Le débat qu'entendent mener les militants de Notre primaire semble avoir déserté le PS au profit des think tanks, les laboratoires d'idées davantage peuplés d'experts que de militants engagés. Si l'on comprend bien le projet, ils espèrent se mettre eux aussi à des formes d'élaboration politique impliquant les citoyens, dans la lignée du mouvement des Indignés, de Nuit debout, et d'initiatives plutôt issues de la gauche radicale, du mouvement syndical ou du monde associatif.

Six thèmes ont d'ores et déjà été proposés pour les discussions d'ateliers à mettre en place à l'automne : « pour combattre le chômage, pour l'éducation et la formation, pour réduire toutes les inégalités, pour faire émerger de nouveaux modes de production, pour revivifier la démocratie, quel projet européen ? » Ces pistes, plus détaillées, ont été adressés aux participants aux premières réunions et aux militants qui, adhérents du PS, du PCF, des Verts ou citoyens non encartés, ont en commun d'être critiques vis à vis de François Hollande et du gouvernement. Pour eux, la primaire ne doit pas être un casting mais d'abord laisser la place à la construction, à la base, d'un programme...

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