L'UMP est dans les starting blocks. Prête à bondir vers le pouvoir municipal, et qui sait, départemental ou régional... Sonnée par les défaites de 2012, présidentielle puis législatives après la perte en 2011 du Sénat et de quelques conseils généraux dont celui du Jura, secouée par une calamiteuse élection interne, l'UMP tente de se rassurer. D'abord grâce aux déboires du gouvernement, aux miraculeux sondages annonçant une catastrophe municipale pour la gauche dans un an, mais aussi en comptant sur ses propres forces : « On est en forme, on a plus de 3000 adhérents dans le Doubs », dit Michel Vienet, le secrétaire départemental.
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Des poids lourds dans le calendrier
Arnaud Danjean, député européen, spécialiste des questions de défense, planchera le 8 mars en interne avec les adhérents sur les institutions européennes, avant une réunion publique à 18 h, salle Proudhon (Kursaal).
Valérie Pécresse sera là le 23 mars. En avril, ce sera le tour de Luc Chatel et Michèle Tabarrot, en mai de Laurent Wauquier.
Le principal parti de droite, qui vise la reconquête de Dole, Montbéliard, Saint-Claude, Lure, a aussi quelques raisons d'espérer renverser la table bisontine qui lui échappe depuis 60 ans. 2014 serait l'année ou jamais, et ça donne des ailes aux prétendants : deux se sont déclarés, Pascal Bonnet et Jean Rosselot, un ancien UDF et un ancien RPR. Un troisième est donné archi-favori pour conduire son camp, Jacques Groperrin. On le voit peu, dans les réunions du mouvement ou au Conseil régional où il a voté avec la gauche le budget de la Cité des Arts que Stéphane Kroemer, président du groupe UMP-DVD, qualifie de « gouffre financier ». Jacques Grosperrin reste quand même sur deux défaites, cantonale puis législative, contre l'écologiste Eric Alauzet. Certes honorables, elles ont montré cependant un important déficit de voix sur la partie bisontine des circonscriptions où une partie des électeurs de droite ne lui pardonnent pas son attitude avec feu Claude Salomon, conseiller général RPR sortant qu'il avait affronté, et vaincu, lors d'une primaire sauvage en 2001. L'épisode avait notamment conduit toute une frange de gaullistes sociaux à rejoindre la majorité municipale socialiste quelques années plus tard.
La bonne humeur de Jean Rosselot
Jacques Grosperrin n'était pas à Miserey-Salines, samedi, pour l'après-midi de formation-mobilisation d'une quarantaine de « Jeunes populaires », les 16-30 ans de l'UMP, organisée justement dans la perspective des municipales. Jean Rosselot, d'une bonne humeur éclatante, « redevenu enseignant-militant » dispensait son savoir de professeur de droit public sur le fonctionnement des collectivités. Pascal Bonnet, arrivé sur la fin, discret comme souvent, n'aura pas entendu les conseils de professionnels de Damien Meslot, député du Territoire-de-Belfort, et des conseillers régionaux Hélène Pélissard (également conseillère générale de Saint-Julien sur Suran, Jura) et Stéphane Kroemer (également adjoint au maire de Luxeuil).
Le plus frappant, hormis quelques rares piques et critiques à l'égard des socialistes, plus fréquentes en direction des Verts, c'est que ces conseils pourraient être dispensés à tous les néophytes de l'engagement politique. Non sans considérations stratégiques, Damien Meslot explique qu' « à force de perdre des petites communes, on s'est retrouvé avec une majorité de gauche au Sénat ». Il dit certes vrai, mais oublie un peu vite le trouble, sinon l'opposition frontale, de nombreux élus ruraux de droite à la réforme territoriale de Nicolas Sarkozy. On n'entendra de l'après-midi aucun mea-culpa sur ce point. Damien Meslot prévient que l'UMP a formé des recours constitutionnels contre la réforme socialiste de l'élection des conseils généraux et régionaux, notamment son report en 2015 : « Soyons prêts, on pourrait avoir des cantonales et des régionales en 2014 ! » Mais pile à cet instant, une affiche du parti perd une punaise : « C'est mauvais signe, l'UMP tombe et penche à gauche », ironise-t-il. Vite, une jeune fille remet la punaise...
Le député suggère d'y aller franchement, mais prudemment : « les maires sont souvent contents quand des jeunes se proposent, mais il ne faut pas venir sous l'étiquette UMP, plutôt comme un bénévole associatif ou pour s'occuper du village... N'hésitez pas à aller aux municipales, même si le maire est de gauche, dans bien des communes le travail municipal est ainsi. Et si un jour le maire de gauche arrête, c'est parfois le premier adjoint UMP qui le remplace et on regagne une commune... » Et une voix pour la prochaine élection sénatoriale.
Damien Meslot : « Pensez aux commerçants, ils nous sont acquis »
La suite du propos est un cours d'engagement, sans doute très utile à qui croirait qu'on l'attend comme le messie : « une fois sur la liste, faites vous connaître, allez à tous les événements de la commune, dans les associations : foot, pêche, chasse... Plus vous connaissez de gens, plus vous avez de chances car on vote pour quelqu'un qu'on connaît. Dans les grandes communes, on va politiser ».
Mais dans ce cas, poursuit Damien Meslot, il faut « savoir quel est votre électorat : allez récupérer les listes électorales, vous aurez des surprises. La dernière fois 25% des militants UMP n'étaient pas inscrits dans leur commune d'habitation... Vous pouvez aussi faire radier des gens entre le 10 et le 20 janvier... Pensez aux commerçants qui nous sont largement acquis et qui peuvent être inscrits dans une commune où ils ont exercé cinq ans : on gagne vite des voix ainsi ».
Le député pense à la campagne : « Regardez les derniers résultats électoraux, bureau par bureau, et repérez les écarts à droite entre entre les exprimés et les abstentions » : là où il est grand d'un scrutin à l'autre, il y « de la marge », et donc matière à porter les efforts militants. Mais attention, là aussi, la méthode compte : « le porte à porte est efficace, mais dans certains quartiers il n'y a qu'un habitant sur trois qui est inscrit. Croisez vos visites avec la liste électorale... Enfin, dans les bureaux de vote, je ne dis pas que l'autre côté triche, mais il ne faut pas créer de tentation : ne laissez jamais un bureau de vote tout seul et notez vos observations sur le procès-verbal ».
Hélène Pélissard entre ensuite dans le contenu et la réthorique : « Il ne suffit pas d'exprimer ses idées pour les faire partager, il faut choisir les bons arguments ! Vous voulez des caméras de surveillance dans une école maternelle ? Si vous les présentez pour surveiller les petits malfrats, c'est un argument défensif, si vous voulez protéger les biens de la commune, c'est un argument positif. Les gens n'aiment pas les arguments négatifs... Il faut aussi bien préparer ses objections. Regardez le mariage pour tous : au début, 60% des Français étaient contre, à la fin du débat 60% étaient pour. Avec nos arguments, on a perdu la bataille de l'opinion. On savait que la loi serait votée, on aurait dû avoir des arguments positifs, la défense de l'enfant. Pourquoi être rentrés dans des problèmes d'adultes ? »
Hélène Pélissard : « ne campez pas sur l'intransigeance »
Conséquence de ce qui précède : « ne restez pas dans votre tour d'ivoire, écoutez les idées des autres, une idée peut toujours être amendée, ne campez pas sur l'intransigeance ». La leçon vaut plus qu'une profession de foi. Elle est la marque d'une certaine humilité dans les déconvenues électorales. Mais Hélène Pélissard a d'autres messages à faire passer : « il faut maîtriser les média, ils sont là pour vous faire sortir de vos gonds... J'ai beaucoup appris quand j'ai voulu installer une prison : ne soyez jamais excessif dans la défense de vos valeurs, soyez consensuels et tolérants. L'UMP ne gagnera jamais seule une municipale, mais avec tous ceux qui partagent un socle de valeurs communes : Nouveau Centre, UDI. Il faut savoir vivre avec ceux avec lesquels ont part en campagne... Pour gagner, il faut ratisser large ». Pas une fois dans la demi-journée, il ne sera fait allusion au Front national...
La constitution d'un programme municipal doit être bichonnée. Épouse du président de l'association des maires de France qui briguera sans doute un cinquième mandat à Lons-le-Saunier, Hélène Pélissard est à bonne école : « Un projet a un ou deux points forts. Il ne faut pas avoir d'idées tous azimuts, essayer d'avoir le projet qui fédère, ensuite agréger tout le monde et prendre toutes les idées ». Mais attention, le projet doit être « abouti » car « les gens craignent le flou : mon projet de prison ne pouvait pas l'être, il était expérimental. Les gens vont chercher dans le détail, il faut être capable de l'amener. Ne promettez pas tout, sinon vous serez mal dans vos baskets pendant le mandat et ne serez pas réélus... »
Stéphane Kroemer : « une chose est d'être élu, une autre de gérer »
Stéphane Kroemer vient enfin comparer les deux faces d'une situation qu'il connaît bien puisque c'est la sienne : être dans la majorité à Luxeuil-les-Bains, dans l'opposition au Conseil régional. Cela lui permet d'assurer que « pour défendre ses idées, la meilleure solution est d'être élu. mais avant l'élection, il faut se faire connaître du grand public, dans le territoire, être présent, intervenir. Avant d'être au conseil municipal, j'ai assisté à toutes les séances, c'est très formateur... car une chose est d'être élu, une autre de gérer ». En campagne, « la priorité, c'est de s'adresser à nos électeurs, éventuellement les indécis, ne pas perdre de temps avec nos adversaires... Pour faire basculer l'électorat PS, il faut s'appeler Nicolas Sarkozy ». Et encore, seulement une fois, en 2007...
Stéphane Kroemer donne des trucs, évoque le maire et conseiller général de Villersexel
Trucs et astuces, connaissances des dossiers et des enjeux, cohérence politique et territoriale... On s'engage en politique sur des valeurs, on est finalement dans le réel. Comme ironisent les socialistes revenus au pouvoir à Paris : « le réel, c'est quand on se cogne... »