Conseil départemental du Doubs : premières dissensions dans la nouvelle majorité

Elu onzième vice-président le 2 avril, Alain Marguet a démissionné huit jours plus tard tandis que dans le magazine Vu du Doubs, Christine Bouquin faisait comme s'il y avait toujours eu dix vice-présidents... La gauche dénonce une cachotterie que la droite récuse, mais que ces mots de la présidente sonnent bizarrement : « Alain Marguet a fait un choix, je n'ai pas à me justifier ».

Alain Marguet a fait campagne pour davantage de moyens pour les routes, puis obtenu une vice-présidence dédiée qu'il n'aura occupé que huit jours.

Alain Marguet ne veut pas d'un strapontin. C'est ce qui a amené le conseiller départemental du canton d'Ornans à démissionner de la onzième vice-présidence du département huit jours après y avoir été élu lors de la séance d'installation de la nouvelle majorité, le 2 avril dernier. Dans l'opposition lors des précédents mandats, l'ancien conseiller général du canton de Montbenoît, conseiller municipal de Gilley où il a longtemps été correspondant local de L'Est Républicain, par ailleurs président de l'Amicale des Frontaliers, n'avait eu de cesse de défendre davantage de moyens pour les routes. Durant la campagne électorale, la nouvelle équipe l'a mis en avant sur ce point précis. Il disait ainsi entre les deux tours qu'il « manque 10 millions par an sur les routes ».

Interrogé, Alain Marguet ne veut pas commenter son acte. Mais quand on insiste, il confirme à mots couverts n'avoir pas eu les moyens de ses ambitions routières. Ni, sans doute, la confiance totale de la présidente Christine Bouquin. C'est ce qu'on comprend lorsqu'il fait référence à ses états de service et son expérience au sein de l'assemblée. On constate enfin qu'il n'est pas dans la commission spécifique aux routes.

Comme si de rien n'était

Session de budget modificatif le 15 juin
Le conseil général avait cinq commissions, le conseil départemental en aura six ! Et l'une d'elle sera exclusivement consacrée aux routes ! Cela fera-t-il augmenter le budget des routes ? On verra, notamment le 15 juin et la première modification budgétaire.
Christine Bouquin a également annoncé qu'elle rencontrera bientôt ses collègues des départements voisins pour leur proposer d' « initier des coopérations » afin de « trouver ensemble des économies d'échelle ».
Voir ici la liste des commissions et l'enregistrement vidéo  de la session.

Le retrait d'Alain Marguet a cependant pris des proportions inattendues, lundi 27 avril lors de la session consacrée à la désignation des représentants du département dans près de 300 structures. Vu du Doubs, le magazine de l'institution, distribué dans tous les foyers doubiens, fait - pages 18 et 19 - comme s'il n'avait jamais été vice-président, même une semaine. Pire, dans le jeu de questions-réponses auquel elle se prête, Christine Bouquin parle de dix vice-présidences comme si de rien n'était, précisant qu'elles a « souhaité appliquer la parité au sein de l'exécutif » ! Est-ce à dire qu'Alain Marguet, qui aurait fait pencher la balance en faveur d'une surréprésentation masculine avec six hommes et cinq femmes, aura fait les frais de cette volonté de stricte égalité ?

La nouvelle opposition s'est aussitôt engouffrée dans cette brêche. Martine Voidey, la présidente du groupe socialiste et divers-gauche, s'est « inquiétée du traitement de l'information désormais dans Vu du Doubs dont [Mme Bouquin] est devenue directrice de la publication ». L'élue du canton de Valentigney se « souvient de la démonstration » de la nouvelle présidente qui expliquait pourquoi sa nouvelle fonction permettait d'atteindre l'équilibre entre six vice-présidents et cinq vice-présidentes.

« Ne confisquez pas le magazine à votre profit ! »

« L'effervescence stimulante » de 2004 versus « nous prendrons notre temps »
Martine Voidey a pris un malin plaisir à souligner que lorsque les socialistes avaient gagné le département, en 2004, ils étaient prêts. La preuve, les commissions avaient été installées dès la première session : « J'ai le souvenir d'une effervescence collective stimulante... Vous avez préféré prendre le temps et attendre un mois... Cette période d'observation a pu donner le sentiment que la collectivité était plongée dans un attentisme et un immobilisme préjudiciables à la continuité du service public. Certains maires ont pu d'ailleurs s'émouvoir de recevoir des courriers signés non pas d'un élu, mais d'un chef de service palliant ainsi au déficit de l'autorité territoriale ».
Christine Bouquin n'a pas apprécié la critique : « Pas la peine de tout bousculer, mais nous allons appliquer notre politique, mais pour ça il faut un audit, nous prendrons notre temps... Vous parlez de trou d'air, mais la machine ne s'est pas arrêtée... Pour la signature, tout est rentré dans l'ordre. Je ne connais pas de machine qui ne se grippe jamais. Les citoyens attendent que l'assemblée réponde à leurs attentes... »

Martine Voidey estime que Vu du Doubs aurait dû mentionner l'élection de onze vice-présidents et la démission de l'un d'eux, et ajoute gravement : « votre choix de cacher la vérité nous inquiète » dans « une période où il est plus que nécessaire de rétablir la confiance des citoyens vis à vis de la classe politique ». Et de donner un conseil à la nouvelle patronne du Doubs : « veillez à ne pas confisquer le magazine départemental à votre profit... Lorsque nous étions majoritaires, un élu de l'opposition était présent quasiment dans chaque numéro... »

Sentant que sa démission devenait un problème pour son camp, Alain Marguet fut le premier à répliquer : « C'est excessif, vous vous étiez approprié Vu du Doubs où il n'y a jamais rien eu sur mon activité depuis 2004 ». Annick Jacquemet, la première vice-présidente lui emboîta le pas : « je n'ai jamais été citée non plus ». Le député Frédéric Barbier (PS) soutint Martine Voidey : « le magazine rend-il compte ou pas ? On doit la vérité à la population du Doubs ! » Françoise Branget (UMP) parla de « chamaillage pas très digne » et Ludovic Fagaut (UMP) s'inscrivit « en faux contre la volonté de cacher la vérité ».

Christine Bouquin reconnait une erreur

Grande dame, Christine Bouquin reconnut avoir « fait une erreur : peut-être fallait-il laisser ce qui avait été décidé et rectifier. Mais cela me choque que vous pensiez que j'aie pu tromper nos concitoyens. C'est une maladresse, je serai vigilante pour que cela ne se reproduise pas ». Quant au fond, elle refusa de s'étendre sur le sujet avec cette curieuse phrase : « Alain Marguet a fait un choix personnel, je n'ai pas à me justifier » !

L'apprentissage du retour aux affaires n'apparaît finalement pas si simple pour la droite. Si Christine Bouquin semble armée pour assumer le pouvoir, forte d'une belle expérience dans le Haut-Doubs et à la présidence de l'association des maires du Doubs, elle devra faire avec une majorité disparate. Sa garde rapprochée vient du Haut-Doubs, avec son voisin Denis Leroux, les Pontissaliens Florence Regeboz et Pierre Simon, le maire de Frasne Philippe Alpy. Son cabinet n'est pas encore complet et tient sur trois personnes sont l'ex-directeur des services de la mairie de Charquemont, Daniel Benazeraf, et l'ex chargé de communication de la ville de Pontarlier, Sylvain Ducret.

« Ils vont s'y mettre »

On sent les nouveaux élus de Besançon, dont la victoire a fait basculer le département, prêts à foncer alors que les gens de la montagne vont plus prudemment. Les premiers s'affrontent à la gauche municipale, jusque dans les rangs du conseil d'agglomération où ils indisposent parfois les élus des petites communes plus habitués au consensus. Un consensus que les seconds, à défaut de pratiquer dans la vie politique locale, pratiquent dans la vie quotidienne. Denis Leroux fait d'ailleurs remarquer la proximité du Haut-Doubs avec la Suisse qui cultive l'art des compromis : « ils vont s'y mettre », sourit-il à propos de la droite bisontine...

C'est à propos d'un élu bisontin qu'est d'ailleurs venue la seconde salve de l'opposition sur le sujet hautement sensible de l'éducation. « Notre groupe veut connaître vos positions sur le programme pluriannuel d'investissements dans les collèges », commence Noël Gauthier, élu du canton de Bethoncourt. « Il y a un fait nouveau : monsieur Fagaut se serait rendu au collège Anatole-France de Bethoncourt. A-t-il dit que le PPI et la construction d'un collège neuf seraient remis en cause ? »

Le collège de Bethoncourt doit-il s'inquiéter ?

Christine Bouquin réagit : « il n'y a pas de remise en cause du PPI à ce jour, pas de remise en cause du collège. Ce ne sont pas les propos de Ludovic Fagaut. Ont-ils été interprétés ? » L'intéressé ajoute : « J'y suis allé suite à un audit climat scolaire. Je me suis bien gardé d'avancer toute proposition concrète. J'ai dit qu'on allait aborder le dossier, mais ne me suis pas avancé sur la révision du PPI, ni mis en doute quoi que ce soit sur le carte scolaire. Il faut dissiper les ambiguïtés ». Noël Gauthier insiste : « ce sera un collège neuf ou restauré ? » Ludovic Fagaut : « Toutes les pistes ont été abordées, mais il n'y a rien d'arrêté. Je m'en serais bien gardé ! »

Magali Duvernois, élue avec Noël Gauthier, appuie : « il est important d'associer les élus des communes, nous avons une connaissance approfondie, Bethoncourt connaît de grandes difficultés ». Christine Bouquin conclut l'échange : « je pense que vous avez été rassurés. Nous associerons les élus sur leurs secteurs respectifs... » Après la séance, l'ancien président, Claude Jeannerot, dit craindre le retour à une vision comptable de la carte des collèges qui serait préjudiciable au pays de Montbéliard.     

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