Comment les maires envisagent l’application de la réforme des rythmes scolaires

Les responsables départementaux des associations de maires perçoivent différemment la réforme. Le bénéfice potentiel de celle-ci pour les enfants semble ne faire aucun doute. On insiste plus ou moins sur les difficultés de mise en oeuvre, en particulier pour les communes peu équipées.

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Le décret sur l'organisation du temps scolaire voulue par Vincent Peillon est paru au journal officiel le 26 janvier. Il est question plus globalement de « refonder l'école » et de l'ambition d'assurer la réussite éducative de tous. Présenté comme « l'aboutissement d'un long travail de concertation entre l'ensemble des acteurs », le décret engage notamment les maires ou présidents d'établissement public de coopération intercommunale à présenter des projets d'organisation du temps scolaire pour la rentrée 2013. Le ministère a précisé aussitôt que « l'organisation de la semaine scolaire de chaque école sera fixée par l'éducation nationale. » Les activités périscolaires prolongeant la classe sont également dévolues aux municipalités. Concertation et souplesse sont annoncées. Enseignants, parents d'élèves et élus locaux ont encore des points de vue différents (voir ci-dessous les « articles sur le même sujet »). Le choix de reporter l'application de la réforme à la rentrée 2014 est possible. Le maire doit le signifier à l'académie au plus tard le 31 mars.  

Transfert de charges et doutes sur les responsabilités pour Sylvie Vermeillet

Pour le maire de Cernans, conseillère régionale dans le groupe de droite et présidente de l'Association des Maires du Jura, la loi « a été faite en urgence… et c'est un transfert de charges pur et simple ». Elle ne cache pas la surprise qui a été la sienne quand le projet a été présenté courant janvier et qu'il « ne correspondait pas à ce que François Hollande avait présenté en novembre au congrès des maires :  le décret dit maintenant que le passage à quatre jours et demi sera de droit en 2013 avec une possible dérogation en 2014 alors que François Hollande l'annonçait de droit en 2014 avec possibilité d'application cette année. Ce n'est pas pareil. Nous ne nous sommes pas paniqués mais le temps de consultation manquait pour une décision au 1er mars comme prévu initialement. Nous avons sollicité une rencontre avec le recteur et le directeur académique départemental (Dasen). Mardi 5 février, nous avons eu une réunion. Prèvue à l'IUFM, elle a eu lieu au lycée de Montmorot tant il y avait de monde. 300 personnes étaient là, le préfet et le président du conseil général se sont joints à nous. Nous avons eu des débats de très bonne qualité. Pour l'immense majorité des maires, un report est préférable même avec le mois de plus accordé (31 mars). »
Quand on lui demande ce qui empêche l'application de cette réforme mis à part le délai, Mme Vermeillet répond qu'il s'agit aussi de sécurité, de responsabilité et de finances. « Très peu de municipalités sont partantes pour 2013, Chaussin (où de nombreux bénévoles sont actifs et où la question du transport ne se pose pas) et Chilly le Vignoble par exemple. Le Conseil général sera obligé de mettre en place des transports quel que soit le nombre de communes. Il y a aussi la situation des Rassemblements pédagogiques intercommunaux dans lesquels les communes ont gardé la compétence éducation. La loi en l'état actuel permet à un seul maire de prendre une décision indépendamment des autres écoles du RPI. Par exemple, une maternelle serait ouverte le mercredi matin et les autres écoles fermées. Nous ferons un communiqué pour demander une nécessaire unanimité des RPI. 
D'autre part, nous avons des inquiétudes sur les responsabilités et la sécurité. Si la sortie de l'école se fait à 15h45, le périscolaire n'étant pas obligatoire pour les élèves, les parents pourront-ils venir chercher leur enfant ? Si le périscolaire est plus long à l'occasion de la pause méridienne, comment s'organiseront les enseignants de 12h à 15h par exemple ? Nous comprenons leurs inquiétudes également. Le périscolaire pourrait être payant d'après la loi également, dans ce cas, ce sera un transfert de charge sur les familles. Un défaut d'équité territoriale est encore à craindre entre communes pauvres, peu équipées et communes plus riches. Avant 2008, les quatre jours et demi, que nous ne contestons pas du point de vue des rythmes des enfants, étaient en place et ne coûtaient rien. On les remet en place à présent mais avec un coût, pour les collectivités ou pour les familles. »

Jean-Paul Carteret retient « le progrès » et fait des propositions

En Haute-Saône, pour le maire socialiste de Lavoncourt, conseiller régional et président de l'Association des Maires Ruraux pour le département, le décret est proche de ce qui était prévu et représente un progrès dans le sens de la réussite éducative (les Maires Ruraux de France « soutiennent la réforme des rythmes scolaires mais s'opposent à un nouveau transfert de compétence sans moyens équivalents ». Toutefois, ils  dénoncent « le chantage déguisé qui oblige l’essentiel des communes à entrer dans le dispositif en 2013 sous peine de ne recevoir aucune aide du fonds amorçage »). 
Après avoir aussi rencontré le Dasen, échangé avec maires et enseignants (favorables à la réforme), M. Carteret vient de faire une proposition d'organisation de la semaine. Ayant expérimenté, quand il était lui même enseignant, divers décrets d'aménagements du temps scolaire, il juge que la semaine de quatre jours est « une horreur » et aurait plutôt été favorable au choix du samedi et à une réduction de la journée combinée à une réduction à l'échelle de la semaine et une réduction des vacances scolaires.
Il fait cette proposition aux autres maires de Haute-Saône : trois heures le mercredi matin contre trois heures libérées. On obtient ces trois heures libérées avec deux demi-heures en début de temps scolaire après la pause de la mi-journée à 13h30 (temps qui sera consacré au soutien pour les uns et à des activités assurées par la collectivité pour les autres) et (les deux autres jours) deux heures de 15h30 à 16h30 (activités périscolaires qui ne soient pas « des temps de garderie mais mobilisent associations, parents et favorisent une ouverture de l'école sur le village et du village sur l'école »). Selon lui, « les financements permettent de démarrer dans de bonnes conditions ». Il relève toutefois que les communes ne disposent pas toutes des mêmes ressources culturelles, sportives, associatives et patrimoniales. 

Echanges en cours dans le Doubs, avancement à Belfort

Mme Christine Bouquin, maire de Charquemont, conseillère générale du canton de Maîche et présidente de l'Association des Maires du Doubs, nous précise que « pour ce qui la concerne les échanges sont encore en cours ». Une réunion avec le Conseil général devait se tenir jeudi 7 février avant qu'un conseil d'administration extraordinaire de l'association ne soit convoqué. Selon toute vraisemblance, ajoute-t-elle, « tout le monde ne partira pas en 2013, il n'y a pas d'unanimité ».
A Montbéliard (voir article du 6 février), d'après l'équipe municipale « une réflexion est en cours quant aux modalités d'application » mais déjà « des crédits seront mobilisés pour accompagner cette réforme estimée pour l'heure à 190.000 euros. »
A Belfort, on peut lire sur le site de la municipalité : « Belfort passera dès la rentrée 2013 aux nouveaux rythmes. Cette adoption précoce des nouveaux rythmes permet à la Ville de bénéficier d'une aide de 90 euros par enfant et par an pendant 2 ans. Une grande latitude est laissée aux communes pour s’organiser avec au maximum 5h30 de cours par jour, 3h30 de cours par demi-journée, une pause méridienne d’au minimum 1h30 et des horaires d’entrée le matin et de sortie le soir inchangés... Ce décret permet de démarrer une grande concertation entre le service éducatif de la ville (environ 500 agents), l’Éducation Nationale et les parents d’élèves. La réforme aura un coût annuel de 400 000 € soit à peine 2 % du budget de 20 millions d’euros consacré à l’éducation par la Ville de Belfort. » 

 

 

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