Besançon : la SAIEMB-Logement réclame en justice deux millions d’euros à une agence immobilière

Propriétaire de 2400 logements, cette société d'économie mixte contrôlée par la ville vit des moments difficiles. Le conseil municipal lui a fait une avance d'un million en juin dernier, la vacance locative est élevée, et la curieuse agence qui gère la location de ses logements étudiants ne la paie plus, ou mal, depuis quelques années.

Danièle Poissenot (au centre) lors d'une visite de Planoise avec Jean-Louis Fousseret. (Photo d'archives DB)

Société d'économie mixte contrôlée par la ville de Besançon, la SAIEMB-Logement estime que l'association ALOESAssociation du logement offre pour études supérieures à qui elle avait confié en 1987 un mandat de gestion de ses quelque 430 logements pour étudiants répartis dans quatre immeubles à la Bouloie et près du lycée Jules-Haag, lui doit plus d'un million d'euros. Voire deux millions en tenant compte de provisions pour charges, appelées mais correspondant à des dépenses non encore intervenues. Pour son directeur général délégué, Thierry Verrier, tout se passait normalement jusqu'il y a trois ou quatre ans : ALOES reversait à la SAIEMB-Logement les loyers qu'elle encaissait, mais depuis, ces loyers « n'étaient plus payés, ou partiellement payés ».

L'affaire est compliquée du fait qu'ALOES a elle-même confié la gestion locative à une agence immobilière prestataire créée en 1990, la Sarl SODERE, qui a la même adresse que l'association, 83 rue de Dole, et le même dirigeant, Olivier Bernard, gérant d'une autre agence immobilière, Horus. La maintenance, confiée à une autre structure montée par ALOES selon Danièle Poissenot, adjointe au maire et présidente de la SAIEMB-Logement, laisserait aussi à désirer. A l'en croire, l'entretien n'est plus assuré dans de bonnes conditions et des logements sont dans un « mauvais état ».

Trois procédures judiciaires

Après une longue phase de tentative de récupération amiable de l'ardoise par l'ancien directeur, Guy Henrion, dont le contrat n'a pas été renouvelé en 2014, parti depuis à la tête de Sartre-Habitat, la SAIEMB-Logement a fini par saisir la justice. Il était temps, estiment certains en parlant de « laisser-aller » tout en rappelant que le président n'était autre que Jean-Louis Fousseret jusqu'aux élections municipales de 2014. Une première procédure civile a donc été engagée en juillet 2015, le mois suivant la prise de fonction de Thierry Verrier : « mon prédécesseur était dans une logique de négociation et ALOES s'était engagée en janvier à verser 200.000 euros, ce qu'elle n'a pas fait ».

Intentée en référé - la procédure de l'urgence-, l'action civile n'aboutit pas. Le tribunal de grande instance se déclare incompétent au motif que les contentieux sur les baux relèvent du tribunal d'instance. Considérant que le litige ne porte pas sur des baux mais sur un mandat de gestion, la SAIEMB-Logement a fait appel. L'audience a eu lieu la semaine dernière et la décision a été mise en délibéré. Reste que la convention initiale entre la SAIEMB-Logement et ALOES , a été pour les uns perdue, pour d'autres « écrite à la légère et signée sur un coin de table ». Au point de comporter des « ambiguïtés » sur lesquelles jouerait le prestataire... Autrement dit, il est difficile de l'invoquer en droit.

Les « irrégularités » d'une « nébuleuse »...

La SAIEMB-Logement a ensuite attaqué au pénal « quand [elle] a commencé à comprendre que c'était complexe », explique Thierry Verrier qui estime être face à des « irrégularités » et à une « nébuleuse autour d'ALOES ». Selon une bonne source, Aloes « invente des difficultés de location des logements étudiants en argumentant des départs en stage ou des non-renouvellements, mais elle possède un immeuble dont elle loue tous les logements sans problème ». Une troisième action a enfin été intentée qui a conduit à la mise en redressement judiciaire d'ALOES en juillet dernier, décision dont l'association a également fait appel.

Cette série de procédures intervient dans un contexte difficile pour la SAIEMB-Logement, si l'on en croit le rapport d'activités 2015 présenté au conseil municipal jeudi 15 septembre. Certes, le taux de vacance de 16,33% au 31 décembre, s'est amélioré depuis. Il représentait cependant près de 300 appartements vides sur près de 2000logements étudiants non compris, dont environ 200 pour la seule vacance commerciale, c'est-à-dire hors travaux ou démolition. En fait, la vacance concerne surtout des T4 et T5 quand la demande se porte sur des appartements plus petits.

710.000 euros d'impayés sur 12 millions

Alors que les loyers et charges mis en recouvrement représentaient 12 millions d'euros en 2015, les impayés se montaient à 710.000 euros dont 93% sont considérés comme des créances douteuses de locataires ayant quitté les lieux : « les chances de recouvrement sont minimes », note le rapport. Malgré tout, en en dépit du million d'euros des loyers étudiants réclamés via la justice à ALOES, la SAIEM-Logement a fait un petit résultat positif de 8800 euros. N'empêche, des inquiétudes s'expriment, notamment pour le budget 2017, les fameuses créances douteuses pouvant se transformer en créances abandonnées....creusant un trou conséquent.

Des élus d'opposition, comme Pascal Bonnet et Philippe Gonon, envisageaient dès 2012 un rapprochement avec Grand Besançon Habitat dont le métier est proche. Une fusion serait difficile à envisager, compte-tenu des statuts très différents des deux structures. Pour l'heure, c'est un partenariat qui est envisagé dans le cadre d'un groupement d'intérêt économique. Une autre piste consisterait à transformer la SAIEMB-Logement en prestataire de service : elle a en effet acquis une solide compétence dans la rénovation énergétique de plusieurs immeubles de Planoise en ayant recours à l'énergie solaire pour la production d'eau chaude...

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