Besançon : Jean-Louis Fousseret minoritaire dans la majorité municipale

Une motion des groupes PCF, PS et EELV demandant au gouvernement l'arrêt de la baisse des dotations de l'Etat aux collectivités a été adoptée par 24 voix. Les macronistes se sont abstenus : du coup, on a vu qu'ils ne sont que treize dont le maire et le député Eric Alauzet... Ça a bien fait rigoler la droite qui n'a pas participé au vote...

Après le conseil, la discussion continue entre Eric Alauzet qui s'est abstenu sur la motion, et Marie Zehaf, Emmanuel Dumont, Abdel Ghezali, Michel Loyat et Yannick Poujet qui l'ont tous votée... (Photos Daniel Bordur)

Vingt quatre voix pour et treize abstentions ont scindé la majorité municipale élue en 2014 en deux camps sous le regard goguenard des groupes d'opposition MoDem, LR-UDI et FN qui n'ont pas participé au vote. C'était la fin du conseil municipal et les groupes PCF, PS et EELV ont présenté une motion réclamant du gouvernement qu'il ne baisse pas les dotations aux collectivités locales dans le budget 2018.

Présentée par Abdel Ghezali, le président du groupe PS, la motion reprend quasiment mot pour mot des arguments qui ont été ceux de Jean-Louis Fousseret sous Sarkozy : les collectivités ne sont pas responsables du déficit de l'Etat, elles portent une grande partie des investissements publics, créent des richesse et font vivre des emplois locaux... La baisse des dotations, souligne la motion, aurait des conséquences sur les services à la population...

Abstentions dans la majorité sur la motion des partis de gauche... Il s'agit notamment de Jean-Louis Fousseret, Danièle Dard, Myriam Lemercier, Rémi Sthal, Eric Alauzet, Cathérine Thiébaut, Karima Rochdi, Guerric Chalnot, Danièle Poissenot, Dominique Schauss, Béatrice Falcinella, Gérard Van Helle, Pascal Curie...

« Il y aura un avant et un après Macron », a souligné le leader de l'opposition, Jacques Grosperrin (LR) en guise d'explication de non participation au vote. « On est contre la fermeture des services, on a la même pensée que le sénateur », a expliqué Philippe Mougin (FN).

Souveraineté et irresponsabilité...

Les deux élus MoDem n'ont pas non plus participé au vote, Laurent Croizier soulignant : que « le niveau d'endettement fait perdre sa souveraineté au pays, ceux qui disent qu'on ne remboursera pas sont irresponsables car on transfèrerait la dette sur les jeunes générations... » Cette explication fait dire à Jean-Louis Fousseret : « je ne comprends pas pourquoi vous ne participez pas au vote... »

La majorité de la majorité adopte la motion demandant l'arrêt de la baisse des dotations de l'Etat...

Christophe Lime (PCF) soutient que depuis quatre ans « il n'y a pas eu de désendettement de la France, les économies réalisées n'ayant pas été affectées à la dette... J'ai entendu des formations politiques demandant des fermetures de services... Je demande aux députés de ne pas voter de baisse... »

Visé, Eric Alauzet, réélu avec un confortable 62% mais plus de 2000 voix de moins qu'il y a cinq ans, n'est pas d'accord : « les responsabilités de l'Etat et des collectivités sont partagées, beaucoup de dépenses de l'Etat vont en direction des territoires à la demande des collectivités... C'est faux, ou plutôt tronqué, de dire qu'on ne fait pas d'efforts... » Il s'abstiendra donc quand sa désormais ancienne camarade de parti, Anne Vignot, explique que « le rôle des collectivités est au coeur de la motion ».

« Le sujet est difficile », commence Jean-Louis Fousseret, « je pensais voter la motion, mais j'ai changé d'avis... La campagne est terminée. On attend autre chose de nous. Il faut porter le combat dans les ministères... Les candidats qui proposaient davantage d'économie et ceux qui proposaient d'ouvrir le robinet de la dépense publique n'ont pas été élus... Depuis quarante ans, on dépense plus qu'on ne peut... »

« Une motion d'alerte »

Yves-Michel Dahoui n'est pas président de groupe, mais possible candidat à la succession de Fousseret. Seuls les présidents de groupe ont droit de donner des explications de vote, mais le maire lui donne la parole : « c'est une motion d'alerte vis à vis du gouvernement. On peut voter cette motion que vous auriez votée il y a quelques années... » Parle-t-il aux macronistes ou à la droite ?

Il poursuit sur la division de la majorité qui se dessine, au moins sur ce vote : « Il y aura des différences, il faudra qu'elles s'expriment. On a été élu sur un projet... Je ne veux pas faire de procès d'intention, mais la limitation des dotations, c'est la baisse des investissements... » Jean-Louis Fousseret reprend la parole : « un jour, il faudra payer l'addition... »

Puis il fait voter, enregistre que la motion l'emporte. A Jacques Grosperrin qui constate « Besançon est toujours au PS », il réplique : « je reste socialiste dans ma tête, ne vous réjouissez pas... »

Interrogations, désillusions, abstentions...

Près de trois heures plus tôt, le maire avait démarré le conseil en indiquant qu'après la longue séquence électorale, il sentait une certaine « saturation » chez les citoyens qui attendent désormais qu'on « se mette au travail ». Saluant tous les députés du Doubs élus le 18 juin, il a cependant souligné « les interrogations et désillusions » qui ont alimenté selon lui l'abstention. 

Passant au local, il a anticipé le vote de la motion en martelant à l'intention de la majorité municipale : « nous sommes pluriels, nous avons chevillés au corps le sens du collectif. Nous ferons en septembre un bilan à mi-mandat qui montrera que plus de la moitié des engagements ont été réalisés. Les Bisontins n'attendent pas de postures, je veux des échanges de haut niveau... La période électorale impose des interrogations, des autocritiques. Il faut appréhender autrement la manière dont on veut faire avancer notre politique... »

Philippe Gonon (UDI) l'a quasiment pris au mot : « On passe à un mode d'expression politique apaisée. Nous vous proposons d'évoquer un nouveau mode de travail, plus constructif, en étant associés à de grands chantiers... Nous vous proposerions d'appliquer ici le mode de gouvernance inventé par Emmanuel Macron : nous demandons le poste de Premier ministre... euh de premier adjoint... On a quand même eu 44% des voix... » Le tout, dit avec un sourire... contagieux. Il nota cependant une contradiction dans laquelle est désormais placé Jean-Louis Fousseret : « A Paris, l'opposition, ce sont les Insoumis, les Verts, le PCF, le PS... A Besançon, vous gouvernez avec le PS, le PCF et les Verts... »

« Si vous avez des propositions constructives, nous verrons... »

Le maire ne l'entend pas de cette oreille : « vous parlez du programme du président de la république... Nous avons été élus sur un programme, il n'est pas question d'y déroger. Je resterai chef de file de cette majorité municipale avec des socialistes, des communistes, des écologistes, des société-civile... Si vous avez des propositions constructives, nous verrons... »

Jacques Grosperrin taquine le maire : « je prends acte de votre démission du PS qui aurait pu advenir un peu plus tôt ». Fousseret le coupe : « ce n'est pas le sujet, je n'interviens pas pour savoir si vous êtes parmi les constructifs ou les non-constructifs... » Grosperrin poursuit, salue lui aussi les députés élus « y compris dans la confusion ». Alauzet en rigole. Le sénateur continue : « pour la première fois depuis longtemps, Besançon n'est plus dirigée par un maire socialiste. Comment expliquez-vous la motion de gauche ? »

Fousseret n'aime pas être bousculé et le coupe : « je n'ai pas de comptes à vous rendre, mais aux Bisontins... » Grosperrin : « laissez moi terminer ». Fousseret : « je ne règle pas les problèmes de votre mouvement ». Grosperrin : « vous n'êtes pas capable de ne pas me couper ». Fousseret : « restez dans le sujet ! » Grosperrin : « vous êtes inoxydable, vous avez dit que vous êtes élu d'une majorité, quelle image vous donnez ! » La chamaillerie continue, on peut la réécouter en entier ici...

« Je ne changerai rien à notre programme. Le reste serait de la trahison... »

Laurent Croizier (MoDem) estime justement qu'il a « du mal à croire que la recomposition politique n'affectera pas le paysage politique bisontin... Il n'y a rien de commun entre le gouvernement d'Edouard Philippe que vous soutenez et que je soutiens, et le PCF, les écologistes, le PS... Vous rencontrerez inévitablement d'énormes tensions internes. Que vous soyez engagé à En Marche est courageux, mais j'attends un groupe municipal REM, que vous alliez plus loin, vers une union REM, radicaux, MoDem, constructifs... »

Jean-Louis Fousseret répond une nouvelle fois : « je ne changerai rien à notre programme. Le reste serait de la trahison... » Jean-Sébastien Leuba, adjoint mais aussi secrétaire de la section bisontine du PS, vient souligner la fragilité de la position du maire en relevant tout haut que « Barbara Romagnan a eu 51,1% à Besançon », ce que tout le monde avait bien noté. Il poursuit : « quand notre programme a été écrit en 2014, nous n'avions pas connaissance des baisses de dotations de François Hollande. nous avons demandé un moratoire sur la baisse des dotations, et n'avons eu qu'un demi-moratoire... La baisse va être de 8 milliards sous Macron... Nous aurons des problèmes, ces années qui viennent, pour mettre en oeuvres nos politiques sur la ville... »

Il fallait s'y attendre. La recomposition politique s'est bel et bien invitée au conseil municipal de Besançon. Si dans les mois qui viennent, une sorte de paix des braves peut s'imaginer, la fin du mandat s'annonce rude.

En attendant, les dossiers du soir ont tous été adoptés, conformément à l'accord de 2014, par la majorité qui s'est montrée unie dans ses votes.

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