Besançon : Jean-Louis Fousseret à nouveau mis en minorité

Une motion des groupes PS, PCF et EELV demandant au gouvernement de revenir sur la fin des emplois aidés a obtenu 25 voix au conseil municipal. Les groupes LREM (constitué quelques heures plus tôt), UDI et MoDem ont rassemblé 16 voix contre. Le groupe LR n'a pas participé au vote.

Jean-Louis Fousseret ouvre le conseil municipal... A la fin, il sera mis en minorité sur une motion présentée par Nicolas Bodin... (Photos Daniel Bordur)

Le clivage interne à la majorité municipale bisontine s'est creusé un peu plus ce jeudi 14 septembre. La motion présentée par les groupes PS, PCF et EELV réclamant du gouvernement qu'il revienne sur la fin des contrats aidés a obtenu 25 voix. Bien davantage que les 16 voix contre des macronistes, qui venaient de constituer un groupe LREM quelques heures avant le conseil municipal, et des élus UDI et MoDem présents. Le groupe LR a refusé de participer au vote.

C'est la seconde fois que le maire Jean-Louis Fousseret, soutien de la première heure d'Emmanuel Macron, est mis en minorité, après que ses partisans se soient abstenus le 22 juin sur une première motion des groupes PS-PCF-EELV réclamant l'arrêt de la baisse des dotations aux collectivités locales. Cette fois, la division est plus grande puisqu'au lieu d'une abstention, qui n'empêche pas un vote favorable de l'emporter, les deux clans se sont prononcés de manière antagoniste.

Ce vote aura aussi montré un clivage au sein de l'opposition LR-UDI-MoDem qui avait fait liste commune en 2014. En ne participant pas au scrutin, les élus LR ont su éviter de rajouter une dose supplémentaire d'émiettement. A Jean-Louis Fousseret qui lui lançait « je pensais que vous alliez voter pour », Jacques Grosperrin a répondu : « j'aurais pu voter pour... Vous êtes bien embarrassé monsieur le maire... » En fait, le sénateur LR est sensible au fait que le monde associatif, notamment sportif dont il est proche, vit en partie grâce aux emplois aidés.

Associations fragilisées

En ce sens, invoquer le monde associatif qui survit parfois par ce biais, est l'argument autour duquel a tourné le débat. Ou plutôt l'explication de vote, une motion ne donnant, selon le règlement intérieur, pas lieu à débat. Mais la pluralité des positions constitue bel et bien un débat de philosophie politique. Un élu socialiste nous glisse à la fin du conseil le nom de quelques structures associatives fragilisées par la décision de l'exécutif : Intermed, Pari, Des Racines et des feuilles, les Francas... On en passe.

En présentant la motion, l'adjoint à l'urbanisme Nicolas Bodin, premier fédéral du PS du Doubs, n'avait pas mâché ses mots, parlant de « brutalité », de « ligne rouge franchie » et d' « impact dévastateur pour les personnes éloignées de l'emploi ». Il souligne que dans le département, 10% des quelque 1500 bénéficiaires d'emplois aidés sont porteurs d'un handicap.

Philippe Gonon (UDI) s'appuie sur les exceptions dans l'éducation, la santé et le social consenties par le gouvernement afin d'atténuer sa mesure pour expliquer son vote contre.

« Si ça marche dans ce sens, ça ne va pas marcher longtemps... »

Anthony Poulin (EELV) estime que l'arrêt des emplois aidés est « rude pour les jeunes et les précaires, malgré la modulation ». La mesure laisse des personnes « sans solution alors que ces emplois sont utiles », et place les associations « au pied du mur, voire au bord du précipice ». « Cela s'ajoute à la baisse des dotations aux collectivités, à la baisse des APL, cela fera un demi-million d'euros en moins dans le circuit économique local... C'est une impasse. Si ça marche dans ce sens, ça ne va pas marcher longtemps... »

Frédéric Alleman, seul représentant de la « société civile » intégrée à la majorité municipale, s'exclame : « personne ne veut que ça change ! » Il votera contre, comme les élus LREM.

Thibaut Bize (PCF) met en regard les 3 milliards finançant 465.000 contrats aidés et les 20 milliards du CICE ayant créé 120.000 emplois : « s'il y a un dispositif à supprimer, c'est le second ».

Laurent Croizier (MoDem) interroge la cantonade : « le taux de chômage a-t-il baissé avec les emplois aidés ? Combienla ville en a embauchés après leur contrat ? » Lui aussi vote contre.

« Ces emplois aidés étaient une aide financière déguisée »

Eric Alauzet, député écolo en 2012, LREM depuis sa réélection en juin dernier, développe un long argumentaire qui achève de consterner ses anciens camarades et provoque les sarcasmes de la la droite : « des instructions ont été données aux préfet d'éviter des sorties sèches des dispositifs et de donner des formations... Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Parce qu'il y a des personnes pour qui il n'y a pas d'alternative. Les emplois aidés sont un pansement sur la plaie du chômage, ils ont été entre 200.000 et 900.000 selon l'évolution de la courbe du chômage... »

Il critique également ce qu'il considère comme une pratique commune à tous les gouvernements les années précédent une élection : « 280.000 emplois aidés ont été budgétés pour 2017, mais les deux tiers ont été consommés au premier semestre et la réserve est tarie. C'est impossible d'agir sur la masse salariale de l'Etat à ce moment de l'année budgétaire, sauf à toucher aux impôts ou baisser certaines dépenses. Il y avait une sous-budgétisation, et il fallait en outre combler un trou de 4,5 milliards... »

Il se tourne vers la droite : « En 2012, le trou était de 7 milliards... » Les conseillers LR rigolent entre eux : « il est député depuis 2012 ! » Alauzet poursuit : « le gouvernement a tenté de limiter l'impact [de la mesure] en ajoutant 30.000 emplois aidés... Ces emplois aidés étaient une aide financière déguisée... Il faut tenter des choses, on prend des risques, il faut avancer... »

« les mêmes qui avaient favorisé les emplois-jeunes nous donnent des leçons ! »

Jacques Grosperrin appuie sur le changement du discours de son vainqueur de la législative de 2012 : « les mêmes qui avaient favorisé les emplois-jeunes nous donnent des leçons ! J'ai honte... Les emplois aidés aident beaucoup d'associations. Je ne comprends pas ce qui se passe ce soir au conseil municipal. Une fracture se met en place, je ne veux pas y rentrer. En 2012, le slogan c'était le changement, c'est maintenant, aujourd'hui, c'est le reniement, c'est maintenant... »

Grosperrin a raison : la majorité municipale est fracturée. Mais s'il insiste sur ce point, c'est aussi pour masquer les divergences d'attitude avec ses alliés UDI et MoDem. Jusqu'où la fracture de la majorité municipale ira-t-elle ? Jean-Louis Fousseret la minimise. Nicolas Bodin assure que la municipalité continue à travailler, tout en convenant que l'impact sur les budgets municipaux peut assez vite être visible. Communistes et verts assument plus nettement une divergence qui ne peut pas durer sans heurts croissants, voire sans rupture, jusqu'aux prochaines municipales. Elles sont prévues dans deux ans et demi...

 

Les élus des trois groupes de gauche votent la motion sur les emplois aidés.

 

les conseillers LREM, UDI et MoDem votent contre la motion...

 

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