Conflit d’intérêt ? Un sénateur les républicains à Teleperformance, Philippe DOMINATI

Sénateur, Les Républicains, CAC40, démarchage téléphonique, centre d’appel, vaccination covid19, politique, morale, conflit d’intérêts… Existe-t-il des liens entre toutes ces réalités ? C’est l’objet de notre article qui prend l’exemple de Philippe DOMINATI, sénateur chez Les Républicains et président du conseil d’administration à Teleperformance, société au CAC40 et leader mondial des centres d’appel 

« De très grandes sociétés multinationales se paient des hommes politiques pour qu’ils les aident à ouvrir des portes, à se servir de leur relation pour leurs intérêts » François BAYROU


Les lobbyings sont puissants dans le secteur de la téléphonie, et paradoxalement relativement méconnu. De la presse aux hommes politiques les plus haut placés, le patronat français des services clients téléphoniques tisse sa toile depuis les années 1980, début de l’apogée de ce secteur en France et dans le monde.
Début 2021, l’état confiait à Téléperformance la cellule vaccination covid19 pour la prise de rendez vous pour les personnes vulnérables. Régulièrement, l’entreprise est choisie par l’état pour les Services d’Information du Gouvernement (SIG). Comment Teleperformance obtient-il tous ces contrats publics ? On ne sait pas exactement mais ce que l’on sait c’est qu’avec un sénateur en son sein, Teleperformance dispose d’un grand défenseur au niveau politique.

Un cadre de ladite société n’avait pas hésité à qualifier cet homme politique d’éminence grise, expliquant notamment qu’en tant que sénateur il avait un pouvoir d’influence énorme sur les affaires de l’entreprise.


Dans sa grande enquête sur : « Le business des numéros verts : enquête sur ces lignes d’écoute qui nous coûtent », Frustration Magazine écrit ces lignes : «  Pour seulement un mois (reconductible), l’Agence régionale de Santé de Bretagne à prévu de verser 4 millions d’euros pour acheter les services de Teleperformance, afin d’assurer la gestion d’une “plateforme téléphonique de suivi des cas contacts et des cas confirmés dans le cadre du Covid-19”. On peut imaginer que la facture a également été salée pour le SIG… Nous avons tenté de contacter à de nombreuses reprises le Service d’information du gouvernement pour obtenir des précisions sur les montants versés à Teleperformance […] dans le cadre de la crise sanitaire, en vain. »
L’opacité est cultivée, mais un tract du syndicat SUD du 30 mars 2022 révèle que Teleperformance aurait perçu :

un chiffre d’affaire de 50 millions d’euros en 2021 pour le traitement des appels de la DGS (direction générale de la santé).


Il est intéressant de souligner que le magazine "Le point" a écrit ces lignes au sujet du sénateur de Teleperformance : « Le sénateur Philippe Dominati siège au conseil d'administration de Theolia (énergie éolienne) et à celui de Téléperformance (centre d'appels). Deux " mandats " qui lui rapportent 230 000 euros par an. Et deux entreprises qui ont un excellent défenseur dans la Haute Assemblée. »
On voit par là toute l’influence que le politique peut avoir sur l’économie. Le procédé peut être considéré comme déloyal par les autres centres d’appels concurrents, ou pour le moins relever du conflit d’intérêts. En 2010, le sénateur a d’ailleurs été accusé de conflit d’intérêts. Le Nouvel Observateur commente :

« Le site Mediapart souligne que Philippe Dominati a déposé un amendement favorable au client d'une entreprise privée qui le rémunère. »


Il faut dire que Philippe DOMINATI a déjà été condamné, selon le magazine "20 minutes", « à six mois de prison avec sursis et 2.000 euros d'amende dans l'affaire du recrutement illégal de «faux électeurs» destinés à doper le score de son père, Jacques Dominati, aux élections municipales du 3e arrondissement de Paris de 1989 et 1995. »
A Teleperformance, un conseiller clientèle doit fournir un extrait de casier vierge pour pouvoir être embauché ; pour les administrateurs de la société ce n’est manifestement pas nécessaire, un deux poids deux mesures fort révélateur.
En tant que sénateur, il est probablement également un des artisans principaux garantissant aux calls center émettant des appels sortants, de continuer à démarcher téléphoniquement la France entière. En effet, si le démarchage téléphonique perdure autant c’est parce qu’il est protégé légalement. Certes, prochainement une loi va sortir et après « deux ans de navette entre l’Assemblée nationale ET LE SENAT, les députés ont voté (à une écrasante majorité) des sanctions plus lourdes en cas d’abus, et même l’interdiction pure et simple des sollicitations commerciales dans le secteur énergétique. »
Mais l’interdiction s’arrête uniquement à ce secteur, c’est tout, les autres entreprises peuvent continuer. Et qui retracera les abus, et comment les prouvera-t-on ?

Tant que des hommes politiques comme Philippe DOMINATI auront des intérêts dans les centres d’appels, le démarchage téléphonique a encore de vieux jours devant lui.


Nos proches en situation de faiblesse vont devoir encore longtemps choisir entre débrancher leur téléphone fixe pour être paisible ou choisir de ne plus pouvoir contacter et être contacté en cas d’urgence. Un choix cornélien inacceptable ! Pourtant juste à côté de chez nous, en Allemagne, il est interdit de démarcher un citoyen et ça marche plutôt bien selon France Bleu
Selon le document d’enregistrement universel 2021, Philippe DOMINATI a fait part de sa volonté de ne plus être au conseil d’administration à partir du 14 avril 2022. Sa collaboration continuera-t-elle sous une autre forme ? En attendant, en 2021, il a touché une rémunération totale de 136 125 € de la part de Teleperformance pour sa participation à quelques réunions dans l’année, ça fait cher payé l’heure travaillée pour une société qui rémunère au quasi SMIC ses salariés.

136 125 € pour quelques réunions, ça fait cher payé l’heure travaillée

Laisser un commentaire