Campement illicite et pratiques préfectorales illégales

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Le 23 octobre le Campement d'Arènes a été vidé de ses occupants, démantelé et grillagé. Jugé illicite ce campement devait disparaître. Selon la Préfecture « il n'abritait plus de demandeurs d'asile primo arrivants» mais « des personnes n'ayant plus vocation à rester sur le territoire français ». L'opposition aux campements illicites réclamait une fermeté visible qui a marqué l'arrivée d'un nouveau Préfet, sans résoudre pour autant le problème d'hébergement qui en résultait. Par ailleurs  certains occupants  ont dû recourir au tribunal administratif pour obtenir l'enregistrement par la Préfecture de leur demande d'asile qui leur était refusée.


Un démantèlement pour quel objectif ?

Ce campement existait depuis 2017 avec une courte interruption « grand froid » d'une semaine (début mars 2018) décrétée par la préfecture quand on est descendu en dessous de -5° puis durant une brève période en avril. D'autres personnes sont venues, toujours demandeuses d'asile ou souhaitant déposer leur demande, ainsi que des jeunes isolés, laissés à la rue par nos administrations se renvoyant la balle quant au traitement de leur situation.


Une trentaine de personnes avaient ainsi trouvé refuge en octobre au Campement d'Arènes au lieu d'errer en ville. Toutes bien connues de la Préfecture puisque certaines étaient assignées à résidence bien que vivant au campement, et d'autres avaient été envoyées au campement par la Pada elle même (Plateforme d'accueil des demandeurs d'asile), ce qui est un comble. Solmiré avait tenu à avertir l'ensemble des administrations préfectorales, municipales et départementales concernées pour qu'elles prennent en charge une situation inquiétante qui leur correspondait d'assumer, et avait insisté sur le fait que «ces personnes étaient en grand danger» à la venue de l'hiver .

A cela la réponse a été claire : le préau du parking d'Arènes a été vidé et grillagé sans qu'une solution d'hébergement durable ne soit trouvée pour tous. En effet si certaines ont été relogées conformément à leur statut, d'autres ont été hébergées quelques jours puis remises à la rue. Pour d'autres encore, il a fallu recourir aux tribunaux.


En fait l'invisibilité de ces personnes suffisait amplement à satisfaire nos autorités puisqu'il y en a toujours à la rue (familles ou jeunes isolés) mais éparpillées dans la ville et invisibles, elles n'existent pas.


la Préfecture condamnée au Tribunal administratif

Le motif principal invoqué par la Préfecture a consisté tout d'abord à affirmer que le campement ne comportait pas de demandeurs d'asile primo arrivants ce qui était en fait très contestable.

En effet, si une famille vivant au campement était réellement déboutée mais méritait de toute façon un traitement plus digne que celui d'être mise à la rue sans solution, par contre d'autres personnes en cours de procédure se sont vues refuser le droit de demander l'asile par la Préfecture qui a essayé de les présenter comme des « touristes en situation irrégulière ». Ce refus illégal a été contesté par référé, étant donné le principe de non refoulement s'appliquant à tout demandeur d'asile selon l'article 33 de la convention de Genève, et les familles dans cette situation ont pu obtenir gain de cause devant la Justice et être hébergées. De telles entorses à la loi utilisent  ainsi certaines procédures issues des accords de Schengen prévues pour limiter la libre circulation des étrangers non demandeurs d'asile dans le but unique de faire augmenter le nombre des «éloignements».

On voit que si « Nul n'est censé ignorer la loi » il y a un autre adage qui entre en scène et sous entend « Pas vu...pas pris ». Effectivement quand la Justice lui impose le respect de la loi, la Préfecture obtempère mais sinon c'est comme au Bonneteau « tu as le droit de voir mais j'ai le droit de tricher et si tu ne vois rien, je gagne ». Force est de constater que s'il y a des campements illicites, il existe également des pratiques préfectorales quelque peu contestables et qui peuvent l'être heureusement mais quel gâchis en attendant.

Dublin une procédure inopérante et anti européenne

Bien que les conséquences désastreuses de cette façon de faire cherchant à appliquer des politiques principalement répressives, fondées sur une application « minimaliste » du droit d'asile, les conditions drastiques pour la délivrance de titres de séjour, la criminalisation de l'entrée irrégulière sur le territoire, n'apportent aucun des résultats escomptés, on continue à les appliquer. Elles ne représentent qu'une opportunité légale d'expulser sans autre perspective.

Or les « procédures Dublin » et autres « réadmission Schengen » en vigueur sont inefficaces et anti européennes en ce qu'elles impliquent une concurrence entre pays de l'UE en place de la solidarité. Or, dans les faits, de nombreux Dublinés ayant fait l'objet de transfert dans le pays censé traiter leur demande d'asile, reviennent assez rapidement à Besançon après avoir été remis à la rue dès leur arrivée dans ce pays et cela sans explication ni justificatif écrit. Que fait la France des « Dublinés » renvoyés dans l'Hexagone par d'autres pays européens ? La même chose vraisemblablement. En bref, quand on fait le bilan de ce croisement de transferts entre ceux que l'on éloigne et ceux que l'on doit accepter, on s'aperçoit qu'il est quasi nul. Et dire que depuis septembre Besançon est devenu un Pôle Régional Dublin!!  Comme  ces méthodes n'arrêteront jamais les migrations, il serait bon de mettre en place un autre système plus solidaire  où chaque pays de l'UE assumerait sa part de responsabilité et de s'attaquer aux causes. Comment pense-t-on pouvoir construire l'Europe autrement ?

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Article publié dans "la Feuille Verte" de Décembre

A lire en complément :

- Les États Généraux des Migrations

ILs se sont réunis depuis 2017 et ont ouvert un champ de réflexion à partir des diverses expériences d'accueil des migrants en France et poursuivent leurs actions :

https://eg-migrations.org/

vous pourrez y trouver le document issu de l'ensemble des cahiers de doléances provenant de 106 Assemblées Locales dans 76 départements, dont trois d’outre-mer et celui de Franche -Comté-Sud,  et qui constitue  :

le Socle commun pour une politique migratoire respectueuse des droits fondamentaux et de la dignité des personnes

- Bastamag 

Que propose vraiment le Pacte mondial sur les migrations de l’Onu, qui fait tant peur aux partis xénophobes? 

« Les politiques migratoires actuelles ne sont pas rationnelles, elles sont juste électoralistes »

- LDH

ENREGISTREMENT ET PROGRAMME DU COLLOQUE « FRONTIÈRES ET DROITS DE L’HOMME » NICE – 17 NOVEMBRE 2018

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