Xénophobie et ignorance

Dans la nuit du 10 au 11 février, sept hommes ont agressé des réfugiés à Dunkerque à l’aide de barres de fer et de bâtons électriques. Un peu partout, ces agressions se multiplient, sans pour autant qu’elles soient répertoriées car les migrants n’osent pas se tourner vers la justice de peur d’attirer l’attention sur eux. Cette violence et cette xénophobie sont extrêmement préoccupantes et ne sont pas propres à la France. Il est d’autant plus important de trouver les moyens de lutter contre cette xénophobie que l’afflux de migrants va se poursuivre.

En effet, en 2015, plus d’un million de personnes a pris le chemin de l’Europe. En 2016, les arrivées vont se poursuivre à un rythme comparable, notamment parce que rien ne laisse présager une amélioration de la situation en Syrie à moyen terme.

Début 2014, un think tank américain, le GMFUS, a demandé aux habitants des deux côtés de l’Atlantique s’ils jugeaient qu’il y avait trop d’immigrés dans leur pays. Comme on pouvait s’y attendre, entre un tiers et la moitié des sondés répondent par l’affirmative. La même question a ensuite été posée à d’autres sondés préalablement informés du nombre d’immigrés. Dans ce groupe, la proportion de personnes pensant qu’il y a trop d’immigrés a diminué de moitié. À la même période, les Suisses étaient amenés à se prononcer par voie de référendum, sur la limitation de l’immigration dans leur pays. Le résultat est également édifiant. À deux exceptions près, les cantons où la proportion d’étrangers est supérieure à la moyenne (Genève et Zurich), ont voté contre la limitation de l’immigration et les cantons comptant moins d’étrangers que la moyenne nationale ont voté contre.

Il semble donc que beaucoup des sentiments hostiles aux migrants trouvent racine dans la méconnaissance du phénomène et dans le défaut d’expérience relationnelle avec des immigrés. Cette distorsion est inquiétante parce qu’elle nourrit le racisme et la xénophobie, mais aussi parce que les politiques publiques en matière d’immigration semblent se fonder davantage sur les sondages d’opinions que sur les travaux scientifiques. Néanmoins, on peut aussi y voir une perspective encourageante. En effet, on peut penser qu’une meilleure connaissance de la réalité à la fois de façon rationnelle et de façon sensible (côtoyer les gens eux-mêmes) permettra une meilleure acceptation des personnes venues d’ailleurs.

Barbara ROMAGNAN

Chronique publiée dans L’Humanité du 15 février 2016

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