Préjugés et confinement

Dans une précédente chronique, j’évoquais la façon dont ceux dont les fins de mois ne sont pas difficiles se permettaient de juger de l’utilisation que les plus pauvres faisaient de leur argent. En somme, si les pauvres sont pauvres c’est parce qu’ils utilisent mal leur argent : incapable d’économiser, de se retenir, achats superflus…

Un autre préjugé sur les personnes modestes se déploie en temps de coronavirus : elles n’auraient pas le sens des responsabilités, c’est pourquoi il serait particulièrement nécessaire de faire des contrôles du respect des consignes de confinement dans les quartiers populaires.

On peut commencer par rétorquer que le mauvais exemple donné d’en haut, avec la multiplication des injonctions contradictoires – n’envoyez plus les enfants à l’école mais allez voter, restez chez vous mais allez travailler –, rend difficile le comportement adapté de tous les citoyens que nous sommes, où que nous vivions.

Ensuite, le confinement est évidemment plus difficile à vivre dans un appartement de 60 m2, dans une barre de 14 étages (et ces barres là sont rarement isolées)  avec 3 enfants que dans une maison avec un jardin, sans parler de ceux qui ont eu l’opportunité de se réfugier dans une résidence secondaire. 

Dans mon quartier de Besançon, Planoise, il y a une rue, une petite rue, la rue de Savoie, qui héberge plus de 2000 personnes, le tout donc sur quelques centaines de mètres carrés. Mon quartier est aussi un quartier très jeune, avec beaucoup d’écoles, beaucoup d’enfants et beaucoup de mamans qui en assument seules la responsabilité. Imagine-t-on la difficulté qu’il y a à garder enfermer des enfants pleins de vie, habitués à se dépenser dehors ? 

Mais ces difficultés n’entravent pas plus qu’ailleurs le souci des autres et le sens des responsabilités, tant le confinement est nécessaire. Les mamans que  je connais se préoccupent tout à la fois des règles communes, de la scolarisation de leurs enfants, des personnes âgées vivant dans l’immeuble auxquelles elles rendent des services.

Surtout, pour nombre d’entre elles, elles sont également aides soignantes, aides à domicile, infirmières. Autrement dit, aujourd’hui, elles risquent leurs vies pour sauver les nôtres. Elles sont nombreuses à vivre dans les quartiers populaires car quelque soit l’importance de ce qu’elles font, le niveau de leurs salaires leur laisse rarement le choix.

Bref, s’il y a quelques imbéciles qui ne respectent pas le confinement, ils ne sont pas plus à Planoise qu’à l’île de Ré.

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