Renards qui mangent le petit gibier, les poules... et les campagnols.
Lynx qui mangent les chevreuils... et les empêchent de brouter paisiblement les jeunes arbres.
Chacals dorés qui mangent, de tout... et aiment bien nos poubelles.
Loups, grands et méchants qui mangent, Mangent, MANGENT... Une faim de loup qu'il faut "réguler" pour une fin des loups.
Aujourd'hui, 7 avril, le printemps fleuri des cerisiers et des pruniers, s'est vu orner d'une fourrure de neige aussi légère que glaciale, mais étincelante des chants d'oiseaux pleurant leurs oeufs givrés. Magnifique mort blanche. Un soleil hivernal illumine le paysage, le cri du coucou et les bourgeons de vigne déjà roussis.
Il a trop plu cet hiver.
Il fait trop sec depuis des semaines.
Il a fait trop chaud dernièrement.
Il fait trop froid dans notre troisième confinement.
Le gibier va souffrir. Le bétail va souffrir. Les cultures vont souffrir... Il faut "réguler" les "prédateurs" !!
Mais qu'est-ce qu'un prédateur ?
Le Petit Robert nous en donne la définition historique :
prédateur .n.m. (1547) "Pillard, homme qui vit de rapines, de butin."
...
L'homme ... un prédateur ?
...
Pataugeant dans la boue glacée du poulailler, confiné pour cause de renard, mon coq n'en finit plus de chanter sa peine. La prison qui le protège d'un virus plus gros que lui l'empêche autant de vivre que de mourir.
Moi, comme mes semblables, on m'empêche aussi de vivre pour m'empêcher de mourir et de faire mourir les mourants. Mais moi, contrairement à mon coq, j'ai une fenêtre de sortie : un écran plat entre moi et le monde, une tablette qui me permet de m'évader, d'oublier les mines et les usines qui ont servi à la fabriquer, d'oublier les pollutions chimiques et plastiques qu'entraînent mon mode de survie, d'oublier la déforestation, l'effondrement de la biodiversité et le changement climatique dont je me protège en les fabriquant... Rapines du monde vivant, butin du pillage des ressources terrestres pour compenser par la technique une distanciation sociale à l'œuvre depuis des décennies.
Dans nos montagnes, des "prédateurs" sont pris aux pièges photographiques : ils sont nombreux ceux qui veulent les "réguler". La proposition est virale dans certains milieux ... "Réguler" les grands carnivores : pour protéger quoi au juste ?
Un prédateur, lui, s'est pris à son propre piège, le piège du "développement", de la "croissance", de la mondialisation. Un virus tente de le réguler...
Et je me demande, pour moi, pour mes enfants, pour l'avenir :
qui est le plus dangereux ? Ce prédateur ou ce virus qui tente de le réguler ?
Question absurde : je suis ce prédateur en lutte contre ce virus que j'ai engendré.
Je suis l'humanité face à elle même... saurais-je me réguler ?