Parution du vingt troisième Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique

L’Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique 2020 vient de paraître. En cette période difficile, la publication des données relatives à l’évolution de l’AB en 2019 apparaîtra peut-être anecdotique. Et pourtant, le mouvement profond et durable dont ces chiffres témoignent n’est pas insignifiant, loin de là.

Une dynamique de conversion qui perdure

Avec 358 engagements en 2019, 34 de plus qu’en 2018, notre région poursuit donc sur son territoire le développement de l’agriculture biologique qui représente presque 200 000 ha. Tous les secteurs de production sont concernés, les grandes cultures en tête avec 12 000 ha et 111 exploitations de plus. Le déplafonnement des aides à la conversion sur les territoires de l’Agence de l’Eau Seine Normandie explique cette progression particulièrement nette dans l’Yonne. Autre facteur, la forte demande en produits de proximité bio favorise la vente directe, la mise en place de plateformes de distribution et permet aux paysans bio d'accéder à plus de débouchés. Il reste cependant bien des défis à relever, à commencer par celui de la restauration collective dont l’approvisionnement en produits bio reste encore bien inférieur à ce qu’impose désormais la loi « Egalim ». Le lancement en 2019 de la plateforme « Manger Bio BFC » avec le soutien des organisations bio et de la Région vise à organiser et développer cette filière d’avenir.

L’essor de la bio, un appel au changement sur fond de crises

Crise sanitaire et crise environnementale, mais aussi économique et sociale sont étroitement liées. Enjeu stratégique, le secteur de l’agriculture et de l’agro-alimentaire s’est depuis plus d’un demi-siècle plié aux règles d’un modèle de développement prédateur mondialisé devenu insoutenable. Sa mutation, inévitable, n’est pas pour autant unanimement souhaitée et soutenue. A l’image d’un monde violemment travaillé par des forces et par des intérêts contraires, s’y opposent résistance et appel au changement. Ne nous y trompons pas : la partie qui se joue dépasse et de loin les choix techniques, les contraintes économiques et les sensibilités personnelles des agriculteurs.

Un engagement en phase avec l’expression citoyenne

Les agriculteurs ne sont pas pour autant totalement démunis, et sont chaque année plus nombreux à concrétiser par l’évolution de leurs pratiques une volonté de changement que les citoyens appellent aussi de leurs vœux.

Prise de conscience environnementale, développement des circuits de proximité, meilleure qualité de l’alimentation revendiquée, dénonciation des dérives de l’agrochimie, autant d’éléments que reflète sur le terrain une dynamique de conversion à l’agriculture biologique qui ne se dément pas, malgré les difficultés de tous ordres, climatiques, administratives ou politiques.

La nouvelle PAC : La transition à petits pas prudents

A l’échelle européenne, la définition d’une politique agricole résolument tournée vers la durabilité des systèmes peine à voir le jour. Une fois encore hélas, le « verdissement » annoncé de la toute prochaine PAC ne sera pas à la hauteur des défis que lancent au monde agricole la dégradation de l’environnement, l’effondrement de la biodiversité et le changement climatique. S’agissant de l’agriculture biologique, les spécificités et l’importance des services environnementaux qu’elle rend ne seront pas distinguées d’une manière qui la désignera clairement comme le modèle agroécologique le mieux abouti, modèle exemplaire qui mérite donc d’être promu et rémunéré à proportion. Et pourtant, ajourner encore les mutations systémiques qui s’imposent, ne pas mettre en œuvre les mesures incitatives qu’elles exigent ne fera qu’aggraver la situation au détriment de l’environnement certes, mais aussi des agriculteurs eux-mêmes. Que, dans ce contexte, la dynamique des conversions n’ait pas été affectée témoigne d’autant mieux des évolutions en cours.

La bio pour horizon

Gageons que la crise sanitaire que nous traversons, loin d’affecter l’agriculture biologique et ses filières, contribuera à en amplifier encore le développement. Le « monde (agricole) d’après », dont nos concitoyens espèrent l’avènement, sera « biologique », n’en doutons pas. Espérons que ceux qui forgent les politiques publiques, à Bruxelles, à Paris et en région, contribueront à nous rapprocher rapidement de cet horizon.

Laisser un commentaire