Notre part pour l’accueil des réfugiés

Le 20 mars, l’Union européenne et la Turquie ont signé un accord prévoyant de renvoyer les migrants qui arrivent en Grèce vers la Turquie s’ils ont emprunté cette route. On n’en parle très peu, ce qui se joue là est pourtant très grave. C’est bien d’une remise en cause du droit d’asile qu’il s’agit.

Certains disent que le droit international est respecté parce que les demandes seront examinées individuellement, pourtant il s’agit bien d’organiser l’irrecevabilité de toutes les demandes faites en Grèce. En effet, désormais, tous les migrants qui auront traversé un pays dit « sûr » ou « de premier asile » avant d’atteindre l’Europe devront retourner dans ce pays pour y déposer une demande d’asile.

En l’occurrence, il s’agissait donc de déclarer la Turquie comme « pays tiers sûr », comme l’ont fait les autorités grecques. Cet ajout de la Turquie à la liste des pays sûrs permet un respect formel de l’asile alors que dans les faits, cet accord permet à l’Union européenne de renvoyer tous les réfugiés arrivés en Grèce vers la Turquie, et de lui sous-traiter les demandes d’asile. Les demandes d’asile sont théoriquement toujours possibles dans l’Union européenne, et leur examen sera toujours individuel, mais elles seront désormais massivement irrecevables, puisque l’immense majorité des migrants a déjà transité ou transitera par la Turquie.

Cet accord est à la fois hypocrite et honteux. Alors même que l’on considère que la Turquie n’est pas digne d’entrer dans l’UE, au nom de la liberté d’expression et des droits humains, on lui sous-traite la gestion des réfugiés. Alors que cette terrible crise humanitaire aurait pu être une occasion de montrer l’utilité de l’Europe, de donner du sens à ce club qui n’en a malheureusement plus guère, la seule chose sur laquelle les Européens semblent pouvoir se mettre d’accord c’est sur le refus d’accueillir ceux qui n’ont pas d’autres choix pour survivre que de quitter la terre où ils sont nés. Pourtant, en France j’ai rencontré de nombreux citoyens qui, quels que soient leurs moyens s’organisent pour que nous prenions notre part pour l’accueil de ces femmes, ces hommes et ces enfants qui fuient des guerres terribles et qui veulent juste pouvoir vivre dans la paix, comme nous.

Barbara Romagnan

Chronique publiée dans L’Humanité du 4 avril 2016

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