Nassé·e·s

Le cortège s'écoulait depuis près de deux heures dans les rues, les manifestants et manifestantes souriaient sous le soleil de mars. Louise et ses ami·e·s parfois s'arrêtaient le long du cortège pour lire les slogans sur les pancartes. Vous pensiez vraiment qu'on allait rester sur Twitter ? Léo riait, « regardez celui là, il est plutôt salé : La vallseline ne fera rien passer"

- comme celui-ci : La nuit, c'est pour baiser, pas pour travailler

- et celui là il est tout historique :1916 chair à canon, 2016 chair à patrons

- celui là faudra qu'on me traduise même si je comprends le fond : El Khomri eut'Khonnrie in nin veut pas

- oh trop mimi : Tchoupi est licencié sans indemnités. Tchoupi aussi vaut mieux que ça."

Ils suivirent un instant un groupe de musicien·e· qui avançaient en faisant surnager au dessus des têtes des airs révolutionnaires.

Arrivé à un carrefour, tout·e·s s’arrêtèrent pour faire quelques pas de danse sur le bitume.

Tout d'un coup Louise leva la tête, comprenant que cela faisait longtemps qu'ils stationnaient. Elle fit le tour de la place.

Devant eux une compagnie de CRS et des policiers, policières habillées en uniforme avait pris place. Dans les rues des véhicules pies barraient la route. Tout·e·s, malgré la chaleur, avaient leurs casques, leurs boucliers, certain·e·s des bouteilles de gaz lacrymogène à la main.

- Merde ! se dit elle. Elle demanda à Tristan, le plus costaud de la bande, de la prendre sur ses épaules. Le carrefour était devenu un carré fermé, étanche. Personne de passait.

Bientôt les gourdes furent vides, les batteries de téléphone aussi. Les mains des musicien·e·s rouges et dures. Et chaque coté du carré semblait se rapprocher inexorablement.

Quand ils furent vraiment près, les manifestant·e·s poussèrent inconsciemment vers l'arrière, qui s'entrouvrit miraculeusement, laissant un passage entre deux rangées de force de l'ordre, les matraques accélérant le mouvement en s’abattant indistinctement sur les corps de femmes et d'hommes.

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