Métabief face au réchauffement climatique

Lac artificiel pour stocker l'eau des canons à neige sur le Mont d'Or (archives Daniel Bordur)

Cet hiver est un peu particulier puisque, contrairement aux deux dernières années, il y a eu de la neige. Les pratiquants du ski se sont réjouis et les stations de ski du Jura et des Vosges ont enregistré une activité exceptionnelle. Mais attention de ne pas en tirer des conclusions hâtives ! Comme le rappelle souvent le météorologue comtois Bruno Vermot-Desroches, « il ne faut pas confondre météo et climat ». Cette année, la météo a été favorable au ski, mais cela n'empêchera pas le climat de continuer à se réchauffer progressivement. Et face au réchauffement climatique, les stations de moyenne montagne, comme Métabief, les Rousses, la Planche des Belle Filles ou le Ballon d'Alsace, vont se trouver dans une situation de plus en plus difficile.

Les canons à neige ne sont pas la solution

D'abord, il faut appeler un chat un chat : les canons à neige fabriquent de la neige artificielle. Parler de « neige de culture » n'est qu'un euphémisme destiné à adoucir la réalité. À Métabief, l'équipement récent en canons à neige a coûté 6 millions d'euros : ce n'est pas rien. Le terrassement nécessaire à la retenue collinaire et à la pose des canalisations a causé des dégâts écologiques sur les écosystèmes terrestres, la faune et la flore. Le massif du Mont d'Or a été déjà bien abîmé par le défrichement lié à la création des pistes. Avoir quelques canons à neige au bas des pistes pouvait se défendre, mais équiper le quart du domaine en canons à neige, comme cela a été fait, ce n'est pas raisonnable.

Indirectement, la question de la ressource en eau se pose aussi. On se souvient des réactions indignées contre les essais des canons à neige le 15 novembre, alors qu'on était encore en pleine sécheresse : c'était symboliquement inacceptable. Ce type d'investissements est plus que discutable : on a dépensé 6 millions d'euros pour équiper la station de Métabief en canons à neige, alors qu'on est incapable de trouver 2 ou 3 millions d'euros pour rénover le barrage d'Oye-et-Palet qui est à la sortie du lac de Saint-Point. Or l'eau de ce lac a un rôle très important, à la fois pour l'alimentation en eau des habitants et pour le soutien du débit du Doubs à l'étiage. On attend toujours la rénovation du barrage …

Le contexte du réchauffement

D'abord, le réchauffement climatique fait remonter la limite pluie-neige et l'enneigement sera tendanciellement de plus en plus réduit. De plus, le réchauffement est plus important en hiver. Les relevés réalisés à la tourbière de Frasne affichent + 2,3 °C en dix ans, ce qui est énorme. Il ne faut pas oublier non plus que la production de neige artificielle suppose qu'il fasse froid, ce qui sera de moins en moins le cas. Ainsi, à Noël 2016, la température était nettement au-dessus de 0° et dans ces conditions, les canons à neige n'ont été d'aucune utilité.

La sécheresse de cet été a confirmé la tendance au réchauffement climatique, avec comme conséquences l'allongement prévisible de la durée des étiages. Les priorités sont donc à la préservation de la ressource en eau, en quantité et en qualité. Remonter de 20 cm le barrage d'Oye-et-Palet permettrait de retenir un million de m3 d'eau supplémentaires. Et avec l'abandon des prélèvements sur la nappe de l'Arlier, Pontarlier va en avoir besoin, ainsi que les communes du secteur. On peut aussi limiter le gaspillage en améliorant l'état des réseaux, ce qui suppose des investissements importants. Pour la qualité de l'eau, il s'agit aussi de lutter contre les pollutions, en particulier en rénovant les stations d'épuration et en réduisant les pollutions agricoles.

Engager rapidement la reconversion

Les stations de moyenne montagne sont condamnées à terme, et celles du Jura et des Vosges n'y échapperont pas plus que les autres. Dans ces conditions, il ne faut plus investir dans la neige. Il serait bien plus judicieux de travailler à la reconversion vers un tourisme « 4 saisons », respectueux de l'environnement. Pour l'instant, on en parle, mais à Métabief, 90 % du chiffre d'affaire restent liés à la neige : la reconversion est beaucoup trop lente.

Mais attention à ne pas faire n'importe quoi ! Dépenser des sommes faramineuses pour une arrivée du Tour de France tous les deux ans, comme à la Planche des Belles Filles, en saccageant les milieux naturels, est une très mauvaise solution. On doit, au contraire, développer des activités « vertes », respectueuses de l'environnement. En hiver, ce peut être le ski de fond, les sorties en raquettes et des alternatives en cas d'absence de neige. En été, le VTT, les randonnées, les sorties à la découverte de la flore et de la faune, avec un accompagnateur, des classes découvertes, etc. À Métabief, ce sont 140 emplois directs qui sont en jeu, sans compter tous ceux du secteur touristique.

Commentaires

  • Attention, le réchauffement

    Attention, le réchauffement global est en train de modifier les circulations océaniques et, pour ce qui nous concerne, le Gulf Stream. Il est possible, probable selon des chercheurs anglais qui enregistrent déjà une anomalie froide en Atlantique Nord, que les décennies devant nous se traduisent par une baisse de température pour les îles britanniques et pour le territoire français situé au nord de la Loire. Difficile de dire ce que va être l’enneigement mais il est possible que la neige se maintienne en moyenne montagne jusqu’en 2050, puis nous reprendrons le chemin du réchauffement global. En réalité, il me semble préférable de dire que nous avons entre maintenant et 2050 un climat franc-comtois très incertain, certainement avec davantage d’influence continentale : été chaud et sec, hiver froid et sec , mais avec fortes chutes de neige quand des arrivées d’humidité arriveront d’ouest (les tempêtes bretonnes donneront de la neige ici), parfois de très fortes chutes de neige, un peu à la manière des tempêtes de neige de New-York (?), salutations, Philippe.


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