Les hospitaliers ne veulent pas être les victimes des mauvais choix des pouvoirs publics

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Lettre ouverte de la CGT Santé et Action Sociale Bourgogne-Franche-Comté

  • Au Directeur de l’ARS Bourgogne-Franche-Comté
  • Au Préfet de Région Bourgogne-Franche-Comté
  • A la Présidente du Conseil Régional Bourgogne-Franche-Comté

Nous avons écouté le Président, lors de son discours de Mulhouse.

Nous étions sceptiques face à ses promesses, mais il nous restait l’espoir qu'en insistant un peu, finalement, il allait commencer à répondre aux revendications que nous défendons depuis plus d'un an. Là, c'est la douche froide. Quelle écœurante duplicité ! Il a menti en pleine tempête et nous ne pouvons plus faire confiance au capitaine du bateau.

Nous allons continuer à nous battre pour les patients puis viendra le temps du bilan. Aujourd'hui, nos journées sont longues à l'hôpital et nous utilisons aussi nos heures pour poursuivre notre activité syndicale, notamment au sein des CHSCT. Nos collègues ont besoin d'être protégés lorsqu’ils travaillent, nous sommes là pour demander des moyens et exprimer leur désarroi et leurs inquiétudes. L’Hôpital est une grande machine, où tout le monde est soignant. Bien sûr, on pense d’abord aux infirmières, aides-soignantes, ASH, médecins, mais n’oublions pas les administratifs, cuisiniers, plombiers, agents du biomédical, celles et ceux qui assurent la continuité du service public de l’hôpital.

Demain, nous nous mobiliserons pour un changement radical de politique, pour que, par exemple, les agents de la Caisse des Dépôts travaillent dans l'intérêt des services publics, et notamment ceux de l'hôpital, et non pour celui du monde de la finance !!! Alors que nous nous battons face à la pénurie au quotidien pour sauver des patients, une note de cette Caisse des Dépôts et Consignations nous met dans une colère noire. Cet outil financier de l'Etat créé par Napoléon nous propose un plan pour l'hôpital public qui se résume à sa privatisation et à son dépeçage (partenariat public/privé entre autres), permettant aux requins de la finance de s'accaparer les morceaux les plus rentables…

Le Président ne cesse de nous mentir depuis le début de cette crise, affirmant par exemple « veillez à défendre l’état providence ». Méprisant envers le personnel hospitalier, les « héros » en blouse blanche sauront demain rappeler dans quel état étaient hôpitaux et hospitaliers avant l’état de crise. Nous espérons que la population au balcon, qui nous applaudit, sera là également demain pour nous aider à reconstruire, non pas avec des dons, mais avec de vrais moyens pérennes et à la hauteur des besoins, un grand service public de santé et d’action sociale.

L’Hôpital n’est pas une entreprise, la Santé n’est pas une marchandise !!!

Les propos tenus par le directeur de l'Agence Régionale de Santé dans l'Est Républicain ne passent pas non plus. Interrogé sur l'avenir du CHRU après la crise du covid-19, il n'a pas remis en cause les orientations du COPERMO (Comité interministériel de performance et de la modernisation de l'offre de soins) qui prévoient la suppression de 598 postes et 174 lits d'ici 2025. Des déclarations qui suscitent l'indignation générale à l'heure où les soignants sont en première ligne dans la lutte contre le covid-19. Si Monsieur « le Sinistre » de la Santé a temporisé, suite au tollé général, il a précisé que « l’heure est à la mobilisation » et que « tous les plans de réorganisation sont suspendus à la grande consultation qui suivra ». Suspendus, non stoppés !!!

Ont-ils besoin d’une consultation, alors que nous manifestons depuis des mois, des années pour dénoncer les manques, refuser la fermeture de services de Réa, de Maternité, d’Urgences et pour revendiquer la prise en compte de nos besoins dans toutes les régions ?

Nous ne sommes pas des héros. Les héros n’ont pas peur. Nous, nous avons peur de mourir, peur de contaminer familles, patient.e.s ou résident.e.s. Depuis le début de cette crise, c'est la gestion de la pénurie !!! Pénurie de moyens humains et matériels de protection. L'ensemble du personnel n'est pas équipé de manière optimale, on manque de masques FFP2, de surblouses, de médicaments, de respirateurs…, pour travailler en toute sécurité.

Nous pensons à tous les personnels des hôpitaux, des EHPAD, sans oublier la Psychiatrie, ni nos collègues dans le domaine du social, que ce soit dans le handicap et dans la protection de l’enfance, qui travaillent souvent sans protection.

En effet, depuis le 16 mars, les équipes de soins des Urgences de Bourgogne Franche-Comté se sont organisées pour soigner les patients du COVID-19 avec des effectifs tendus et déjà usés par l’activité quotidienne.

Et, comme vous le savez, sans doute, ou pas, la gestion des patients COVID ou suspect de l'être nécessite une prise en charge particulière, avec des protocoles d'habillage et de déshabillage, des protections qui prennent beaucoup de temps. Ces personnels et ces équipes travaillent, dans un contexte très anxiogène, souvent accentué par un mépris des directions, qui pour certaines doivent manquer d’occupations, pour passer leur temps à surveiller les personnels sur les réseaux sociaux, et les convoquer sur des motifs disciplinaires. Elles feraient mieux de les soutenir, plutôt que faire du zèle et pratiquer le management par la peur. Elles demandent aux personnels de faire preuve d’encore plus d'adaptabilité, de polyvalence (en instaurant notamment les 12 heures), mais il ne faut pas oublier notre côté humain.

Reconnaissez notre travail en augmentant considérablement le point d’indice, en revalorisant les grilles indiciaires et en autorisant l’imputabilité en Accident du travail/Maladie Professionnelle (AT-MP) pour tous les personnels déclarant une infection au Covid-19. Il n’est pas question pour les agents de la Fonction Publique Hospitalière d’une prime, versée au bon vouloir d’on ne sait qui, et seulement aux soignants. L’Hôpital est une chaîne où chaque maillon a son importance.

« La mobilisation de tous porte ses fruits, redoublons d'efforts et restons confinés » explique le directeur de l’Agence Régionale de Santé en Bourgogne Franche-Comté. Le 21 avril l’ARS comptait 1 319 personnes hospitalisées dont 230 toujours en réanimation et 705 décès dans les établissements de santé étaient à déplorer. Le nombre de patients en réanimation baisse depuis une semaine. « C’est une légère baisse qui confirme que nous sommes sur un plateau descendant. Mais ces chiffres restent énormes, et c’est une prouesse de nos hôpitaux d’avoir pris en charge ces patient.e.s dans des conditions qui ne sont pas dégradées » déclare-t-il encore.

La CGT ne partage pas son avis concernant les conditions non dégradées. Le personnel hospitalier de Bourgogne Franche-Comté manifeste depuis plus d’un an pour dénoncer le manque de lits de réanimation, la fermeture de maternités, de services d’Urgences et de SMUR. Le personnel hospitalier est épuisé, par manque de moyens humains et matériels, et le directeur oublie d’évoquer les personnels des EHPAD, de la Psychiatrie et du Social, confronté.e.s à la prise en charge et au décès de patients « covid-19 », dont les conditions de travail sont encore plus dramatiques.

La CGT a également de grosses inquiétudes face à la politique de déconfinement, avec un gouvernement où tout le monde dit tout et son contraire. Le personnel est épuisé et pourra-t-il faire face à une seconde vague d’épidémie ?

Nous serons là, dès demain, dans la rue pour que le Président tienne parole.

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