L’actu vue par Bécassine, 92 ans. #3 Commémorations du 11 Novembre

Quand je débarque à l’improviste chez Bécassine ce 11 novembre (elle m’a dit que je pouvais venir quand je voulais), notre analyste est en train de scruter le journal du Crédit Mutuel (L’Est Républicain). Bécassine est énervée en voyant une pub pour E.Leclerc. Cette grande chaîne de distribution déclare ouvrir son magasin de Montbéliard toute la journée du 11 novembre.

Bécassine : "Comment veux-tu que les jeunes respectent le 11 novembre si Leclerc ne le respecte même pas?"

Le ton est donné, et ça tombe bien je venais voir Bécassine pour ce sujet précis, les commémorations.

Quoi de mieux qu’une vieille pour parler du 11 novembre ?

Ben non !

C’est un argument typique des médias dominants, faire parler les ancien.nes, surtout les plus patriotes et réactionnaires, pour rendre leur propos nationalistes au-dessus de tout.

Bécassine n’a pas connu la première guerre mondiale, elle est aussi légitime qu’un.e jeune de 20 ans qui bossé le sujet en autodidacte.

Cependant son témoignage sur les commémorations et l’occupation nazie est très intéressant, et toujours drôle.

Bécassine : « Il y a pleins de choses qui se perdent comme ça. Vous, les jeunes, vous ne commémorez pas les morts au 11 novembre ? Les gosses n’y vont plus ? »

Loral Aitken : Ben si, il y a certaines écoles, certaines communes, qui incitent les enfants et leurs parents à s’y rendre. Il y a toujours des enfants pour lire des textes de poilus. Mais c’est surtout dans les villes de droite, c’est de la récup politicienne électoraliste, le patriotisme pour cacher la misère sociale. Biguinet (maire de Montbéliard) adore ce rendez-vous…

Bécassine rigole.

Bécassine : « Ah ben ça, ça ne m’étonne pas d’elle ! Mes gosses y allaient à la commémoration, le maire donnait des bonbons. Le jour où le maire n’a plus donné de bonbons, ils n’y sont plus jamais retournés. ». Elle explose de rire.

Elle enchaîne : « c’est comme pendant l’occupation (nazie, 2ème guerre mondiale), les allemands nous donnaient beaucoup de bonbons et des chocolats. Des chocolats suisses ! Nous n’en avions jamais eu avant la guerre, ni après d’ailleurs. A la fin (de l’occupation), ce sont les jeunes de la Résistance qui nous donnaient des bonbons, et on leur montrait où les allemands avaient enterré les mines. »

Ce témoignage de Bécassine me fait penser à un reportage que j’avais vu il y a quelques années sur l’occupation étasunienne en Afghanistan. Après avoir mitraillé comme des sauvages dans un petit village afghan, les soldats croisent un groupe d’enfants sur le chemin du retour. Les plus petit.es sont en larmes, les plus grand.es sont terrorisé.es, les soldats étasuniens leur donnent alors des bonbons…

Bécassine, 92 ans, historienne, criminologue et spécialiste des médias dominants

Loral Aitken, spécialiste des ultra-riches et des violences bourgeoises

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