La Région Bourgogne-Franche-Comté prend des risques pour ses lignes ferroviaires

Alignement des planètes dans la perspective des élections régionales et engouement pour une nouvelle forme d' énergie afin d' être le premier de la classe, ces choix politiques ont sans doute motivé la Région Bourgogne-Franche-Comté (Région BFC) à prendre deux orientations récentes qui engagent le devenir de son réseau ferroviaire pour des décennies.

En premier lieu la signature avec l' Etat du protocole d 'accord sur les petites lignes ferroviaires et en second lieu l' officialisation de la commande de trois trains à hydrogène.

Après des décennies pendant lesquelles les investissements ont soutenu le développement de la grande vitesse, on pouvait enfin espérer une dynamique de gestion de l' infrastructure des petites lignes par les régions déclinée dans deux décrets de la Loi d' Orientation des Mobilités (LOM).

Las dans la précipitation, l' imprécision et la complexité ces transferts apparaissent comme non vertueux, l' Etat ne souhaitant pas endosser la responsabilité politique de fermetures de petites lignes ni financer leur entretien et régénération qui nécessiteraient un mécanisme de compensation clair au profit des régions.

Décliné à l' échelle de la Région Bourgogne-Franche-Comté si des lignes sont intégrées dans le réseau structurant à la charge de SNCF Réseau comme Nevers-Montchanin et on peut s 'en réjouir, la majorité des lignes régionales resteront financées dans le cadre du futur Contrat de Plan Etat Région (CPER) selon une nouvelle clé de répartition, enfin deux lignes, Etang sur Arroux-Autun et Andelot-Champagnole-Morez-St Claude (ligne des Hirondelles) seront à la charge à 100% de la Région. Des précisions sont attendues sur le transfert des gares et du personnel.

Dans chaque catégorie de lignes des doutes existent sur la pérennité de leur financement ; SNCF Réseau qui doit retrouver l' équilibre financier en 2024 aura t' il les moyens d 'entretenir le réseau structurant et surtout de le moderniser ? La Région BFC qui devra assurer 60 à 100% des coûts d'investissements des autres lignes sans compensations financières sera vite confrontée à des choix régressifs.

Un exemple : la ligne des Hirondelles est emblématique de cette nouvelle répartition du mode de gestion. Cette ligne est nécessaire au désenclavement du Haut Jura et doit faciliter les correspondances TGV à Dole et Mouchard ainsi que les déplacements du quotidien (scolaires, travail, loisirs...). Insérée en moyenne montagne, elle comprend des ouvrages d' art remarquables (tunnels, viaduc,..) qui nécessitent des travaux de maintenance qui ne pourront être financés par la seule Région BFC. La FNAUT BFC et son association du Jura, l'APVFJ apporteront tout leur soutien aux initiatives qui permettraient le maintien et le développement de cette ligne en la classant en 2ème catégorie avec une implication plus grande de l’Etat.

Ce protocole d' accord avec l' Etat qui a fait l' objet d' un avis très réservé du Conseil Economique Social et Environnemental Régional (CESER) et a été adopté par le Conseil Régional sans débat ne peut recevoir une posture favorable de la FNAUT BFC qui appréhende une fragilisation d' une partie du réseau ferroviaire régional et des atteintes à sa fonctionnalité mais aussi à l' aménagement du territoire et aux attentes des usagers.

Si la Région BFC envisage pour la ligne Etang sur Arroux-Autun une exploitation innovante (matériel léger et autonome) ce que permet désormais la LOM, elle vient d' acter une commande de 3 rames à hydrogène pour la desserte de la ligne Laroche-Migennes-Auxerre et ses antennes du Morvan.

La FNAUT prend acte du choix politique de la Région BFC qui souhaite encourager une filière technologique sans doute en devenir et qui dans ce but de Belfort à Auxerre développe des pôles de recherche et d' application.

La fabrication de l' hydrogène même à partir d 'électricité décarbonée est consommatrice d 'énergie, de faible rendement et pose des problèmes de stockage et de sécurité. Son utilisation dans le domaine ferroviaire est encore expérimentale et ne saurait trouver un terrain d' essai sur la ligne Laroche-Migennes-Auxerre et au delà.

En effet cette ligne en grande partie à voie unique est très chargée, elle va être modernisée mais son électrification qui était logiquement programmée pour un montant de 36 millions d' euros a été abandonnée par le conseil régional en 2018, ce dernier choisissant l'acquisition de 3 rames à hydrogène pour son exploitation d' un montant de 52 millions d' euros (l' Etat devant en financer 7 millions).

Il faut cependant envisager la desserte de la préfecture icaunaise dans son ensemble en intégrant les liaisons directes et rapides vers Paris et Dijon, le renouvellement du parc de matériel sur ce même axe et le service rendu aux usagers qui vise à limiter les changements de train à Laroche-Migennes, ce que ne pourra éviter le choix de la desserte par 3 rames à hydrogène.

En tout état de cause la décarbonation du ferroviaire n' est pas une priorité par rapport au mode routier par exemple et des solutions techniques existent (matériel hybride) pour répondre à ces attentes de préservation de l' environnement.

Il n' y avait donc pas d' urgence pour la Région BFC à signer un protocole pour les petites lignes qui met en danger le devenir de certaines et à se lancer dans une expérimentation qui risque de déstabiliser les dessertes très fréquentées du Nord Bourgogne.

Laisser un commentaire