La chasse dans le Jura pour la campagne 2020 – 2021, des attentes citoyennes une fois encore maltraitées

Les réponses apportées aux 330 commentaires exprimés à l’occasion de la récente consultation publique relative à l’ouverture et à la clôture de la chasse pour la campagne 2020-2021, dans le département du Jura, interrogent une fois encore la motivation et l’impartialité de l’Etat en faveur d’un usage de plus en plus controversé.

Certes, les irrégularités du projet d’arrêté mis en consultation ont été supprimées du texte publié, et c’est là un résultat important ; les réserves de chasse et de faune sauvage ne sont plus limitées « au petit gibier » et, dans le Jura - comme partout en France - la chasse du renard ne sera pas autorisée la saison prochaine, dans ces 10% des territoires ruraux dédiés à la préservation de la faune sauvage et à sa tranquillité.

Maigre consolation, une simple application de la règle de droit !

En effet :

• à l’argument selon lequel la chasse sous terre du blaireau est une pratique cruelle et non sélective … le Service instructeur répond que cette chasse est autorisée et que sa période « peut être étendue par le Préfet du département, sur proposition du Directeur Départemental des Territoires, après avis de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage » … sans autre motivation. Quelle belle initiative de l’Etat, éludant majestueusement les attentes d’une large majorité des citoyens !

• à celui selon lequel cette chasse a lieu à une période où les jeunes sont encore sous la dépendance de leur mère, le Service instructeur rappelle que « le rut et les mises bas ont lieu très tôt dans l’année, … en février » et que « la période de chasse proposée s’adapte parfaitement à la biologie de l’espèce ». C’est avoir une vision irréaliste de la phénologie de l’espèce et oublier un peu vite que cette période est décalée en département de montagne où de jeunes femelles peuvent encore être gestantes en fin de printemps voire en été, que par ailleurs la dépendance des jeunes ne se limite pas à la mise bas et à l’allaitement et, enfin, que la cellule familiale se désintègre au plus tôt en automne ;

• à celui selon lequel la période complémentaire peut hâter le déclin de l’espèce, le Service instructeur oppose que « le nombre de collisions sur le domaine routier et le nombre d’arrêtés préfectoraux autorisant les lieutenants de louveterie à intervenir sur cette espèce sont tous deux en augmentation constante », sans pour autant donner de chiffres précis qui permettraient de valider cette analyse. Est-ce à dire que le développement du trafic routier et l’augmentation du nombre de lieutenants de louveterie seraient de bons indicateurs de l’amélioration de l’état de conservation du blaireau, on peut en douter sérieusement.

Telle est la conception qu’aurait ainsi l’État « d’une gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats » par « une pratique de la chasse qui participe à cette gestion et contribue à l’équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines, …» (Article L 420-1 du Code de l’Environnement) et sa vision du principe de non-régression inscrit dans la Loi (Article L 110-1 du Code de l’Environnement).

Le Centre Athenas, Nature Jura et le Pôle Grands Prédateurs ne s’en contenteront pas dans un contexte d’érosion grave de la biodiversité, la réponse du Service instructeur s’écartant une fois de plus singulièrement des attentes citoyennes telles qu’elles qu’exprimées encore récemment dans les urnes.

Ils regrettent aussi que nombre d’autres arguments exprimés dans les contributions du public, comme le risque sanitaire accru de la chasse du blaireau au printemps, n’aient pas fait l’objet de réponse, ni été pris en considération par le Service instructeur.

Une fois encore :

• la consultation publique n’a pas permis un débat honnête, ouvert et équilibré, notamment en l’absence de tout dossier et information scientifique et technique, y compris l’avis de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage.

• l’arrêté préfectoral qui en résulte souffre d’une rédaction approximative et peu compatible avec les standards habituels d’un acte administratif de cette nature. La référence à « l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage », supprimé fin 2019 est particulièrement maladroite. Plusieurs termes ne sont pas définis (ex. : plans de gestion ; pays cynégétiques), certaines dispositions sont imprécises (chasse en battue autorisée « 1 ou 2 jours par mois »), répétées dans le texte (ex. : articles 3.3 et 8) ou font double emploi avec d’autres arrêtés préfectoraux (ex : arrêté préfectoral relatif à la chasse à l’affût ou à l’approche dans le département du Jura, pour la saison 2019-2020);

• l’expression citoyenne aura été entendue à minima et ignorée largement.

La légèreté du processus administratif ne pouvait dès lors qu’aboutir à un acte règlementaire en deçà des attentes du public.

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