Jurys perplexes au concours de fromages : pas de médaille en 2011

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« C'est très moyen, les fromages sont décevants, la moitié de ce qui nous a été présenté n'avait pas sa place au concours... » Ancien directeur technique chez Arnaud-Juraflore à Poligny, après quelques années au centre technique du comté, Claude Nicolet ne mâche pas ses mots. Membre de l'un des trois jurys du concours général agricole du comté, il n'a donné que deux médailles, une en argent et une de bronze... Ses collègues ont été encore plus sévères : sur 21 meules du roi des fromages, seules quatre ont été médaillées, deux en argent pour Juragruyère, deux en bronze pour Rivoire-Jacquemin...

Claude Nicolet explique son jugement : « Le problème, c'est que le marché est de plus en plus demandeur de fromages vieillis. Ceux qui les commercialisent s'attachent à répondre à la demande, mais les résultats ne sont pas toujours là. Certains fromages n'atteignent pas la note de 12 (NDLR : 12/20, obligatoire pour avoir le droit de s'appeler comté, il faut 15 pour être un comté extra, à bande verte). Il peut y avoir des dérives au vieillissement. D'abord sur la texture : quand la pâte est granuleuse, sèche parce que le fromage a perdu trop d'eau, il perd de son onctuosité. Ensuite le goût : il doit rester franc mais ni piquant ni rance, ce qu'on constate sur des fromages trop vieillis. Tous les fromages n'ont pas la même aptitude au vieillissement... »

Ces remarques d'un professionnel expérimenté et reconnu sont de nature à interroger une filière où les producteurs ont un bon prix de lait (427 euros la tonne dans les coopératives). La filière comté n'a jamais autant produit : 57 000 tonnes pour la campagne actuelle qui se termine en avril. Avec la fin des quotas laitiers en 2013, précédée d'une augmentation des droits à produire, les éleveurs et les fromageries font même face à des quantités jamais atteintes, « dégagées » vers d'autres productions... Jusqu'où cela ira-t-il ?

A l'autre bout du vaste hall du concours des produits laitiers, le vice-président de l'agglomération bisontine, Jean-Pierre Martin, ingénieur dans l'agroalimentaire, était membre du jury pour le coulommiers. Lui aussi est resté sur sa faim : « On n'a mis que deux médailles de bronze... Il n'y a pas de présélection comme avant... Avant, au concours, on était sur un petit nuage, maintenant, on est dans la réalité de ce qui se fait au quotidien, est proposé dans les linéaires des magasins... Mais on met des annotations pour les fabricants ». Il a également avalé de travers le petit cadeau fait à tous les membres des jurys : une poivrière... fabriquée en Chine !
 

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