General Electric assigné au Tribunal Judiciaire de Belfort Par la CFE-CGC et SUD

En 2014, l’état français valide la vente de la branche Energie d’ALSTOM à la multinationale américaine General Electric sur la base d’un projet de développement industriel de la filière française comportant notamment la création de 1000 emplois nets sur 3 ans dans l’ingénierie et la production, et la localisation en France jusqu’en 2025 des quartiers généraux et des équipes mondiales de direction pour chacun des business : Nucléaire, Digital, Réseaux, Energies Renouvelables et Turbines à Gaz.

Aujourd’hui, le projet industriel s’est transformé en désastre industriel avec une réduction des effectifs de 20 000 à 11 000 salariés en France et de 100 000 à 50 000 salariés en Europe. Le groupe américain a délocalisé la majeure partie des services d’ingénierie en Inde, les centres de décisions ainsi que les profits dans les paradis fiscaux, a réduit drastiquement les budgets de R&D et d’investissements, et continue de conduire une politique de désindustrialisation en France et Europe qui impacte directement tous nos territoires industriels.

Dans sa réponse du 7 mai 2021 à la lettre de mise en demeure de l’intersyndicale concernant le non-respect de l’accord de 2014, l’état français reconnait officiellement que le groupe américain n’a pas respecté ses engagements concernant la localisation en France des centres de décisions. Avec le rapport du cabinet Bearing Point, l’état français a maintenant toute les cartes en main pour utiliser les moyens à sa disposition, notamment ceux prévus dans sa loi PACTE pour défendre les intérêts de la nation et non ceux d’intérêts particuliers de multinationales américaines et de banques d’affaires.

En 2019, l’état français justifiait le projet de suppression de 792 emplois dans les turbines à gaz en reprenant les arguments fallacieux de General Electric d’effondrement du marché des turbines à gaz alors que l’ensemble des experts, notamment l’Agence International de l’Energie prévoyait un rebond du marché lié à l’arrêt du charbon et du nucléaire dans certains états, ainsi que la croissance des énergies renouvelables intermittentes qui nécessitent des énergies pilotées comme la turbine gaz que l’on peut allumer et éteindre en 5 minutes.

Aujourd’hui, après une année 2020 difficile liée à la crise sanitaire, il y a eu un rattrapage des commandes fin 2020 et le marché a rebondi comme prévu, avec une charge très importante impliquant de nouvelles délocalisations d’activité en Inde, par manque de ressources à Belfort suite aux suppressions d’emplois. Par ailleurs la reprise est telle que conformément au carnet de commande, l’année 2022 devrait être l’année record en termes d’activité depuis la création de l’entité belfortaine.

En octobre 2019, après plusieurs mois de lutte contre le projet de 792 suppressions d’emplois, un accord avait été trouvé à Bercy entre General Electric et les syndicats CFE-CGC et SUD, reposant sur un difficile équilibre entre 2 positions radicalement opposées :

  • Vision financière de maximisation des profits à court terme de GE, de réduction des coûts, deréduction des budgets de développement & investissement et de maximisation des opportunités liées au dumping social et fiscal par la délocalisation des emplois et des profits hors de France :

o  PSE de 485 suppressions de postes, notamment :

  • Délocalisation en Inde du bureau d’études mécanique
  • Délocalisation en Hongrie de la ligne de fabrication des pièces combustion et stator o Plan d’économie de 12 M€/an sur 3 ans dont un gel de certains acquis sociaux :
    • Gel des salaires en 2020
  • Gel de l’épargne salariale sur 3 ans
  • Gel du 4ème jour d’ancienneté cadre sur 3 ans
    • Réduction du bonus des salariés au salaire supérieur à 90 K€ sur 3 ans

➔    Vision industrielle à long terme de l’intersyndicale, de reconstruction du quartier général mondialturbine à gaz 50 Hz à Belfort comme en 2014 et conformément à l’accord du 4 novembre 2014 conditionnant la vente des activités Energie d’ASLTOM à General Electric :

o  Taille critique de 1275 salariés

o Localisation à Belfort du quartier général et des équipes mondiales de direction de la technologie 50 Hz pour le marché 50 HZ, (2/3 du marché mondial), notamment :

  • Commercialisation et gestion des contrats de construction de centrales électriques de type turbines à gaz 50 Hz pour la région Europe, Afrique et Moyen-Orient
  • Ingénierie des auxiliaires et centrale turbines à gaz pour les turbines 50 Hz
  • Fabrication  et  réparation  des  composants  stratégiques  (aubes,  rotor)  ainsi  que

l’assemblage et les tests des turbines à gaz 50 Hz

  • Construction d’un projet industriel structuré autour des 8 axes de développement retenus par GE en juin 2020, nécessitant 50 millions d’investissement sur 3 ans conformément aux orientations stratégiques de 2020, intégrant la stratégie GE, les compétences présentes à

Belfort et permettant d’améliorer la productivité, les cycles et la qualité pour GE et ses clients.

  • Mise en place d’un processus de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, basé sur le projet de reconstruction du quartier général mondial des turbines à gaz 50 Hz, les

8 axes de développement retenus dans le projet industriel et les projets de diversification.

  • Création de 200 emplois dans la diversification à horizon 2023, notamment l’aviation.
  • Aujourd’hui, près des 500 personnes ont quitté l’entreprise et certains acquis sociaux sont gelés alors qu’aucune des contreparties industrielles négociées n’a été respectée par GE.

Face à cette situation, la CFE-CGC et SUD saisissent, ce jour le lundi 10 Mai 2021, le tribunal judiciaire de Belfort pour demander au juge de faire injonction à GE EPF de respecter ses obligations afférentes contenues dans les accords de 2014 et de 2019 négociés à Bercy, sous astreinte de 15.000€ d’astreinte par jour de retard pour chacun des 8 engagements suivants non respectés :

  • Recruter la trentaine de salariés pour atteindre la cible des 1275 salariés actifs conformément

à l’article 2.1.4 de l’accord cadre du 21 octobre 2019.

  • Positionner Belfort comme le quartier général (commercial et projet) de la région Europe, Afrique, Moyen-Orient (EMEA) avec la localisation en France de dirigeants mondiaux et de la majorité des responsables du pôle EMEA.
  • Positionner Belfort comme le quartier général GSCM 50 Hz à Belfort avec la localisation à

Belfort de responsables mondiaux dans la stratégie de la chaine d’approvisionnement.

  • Reclasser le personnel de la ligne « stator combustion », sur de nouvelles activités,
  • A défaut, maintenir la fabrication des directrices de nouvelle génération (9HA et 6FA) par l’investissement « Lean » de 6 millions d’euros afin de créer 2 « nozzles lines » et rapatrier à Bourogne la fabrication des « buckets » 50 Hz, délocalisée aux Etats-Unis.
  • Positionner Belfort comme le centre d’excellence de réparation 50 Hz pour la zone Europe,

Afrique, Moyen-Orient avec la création d’activité de réparation pour les « buckets » & « nozzles » de nouvelles générations (9HA et 6F) fabriqués à ce jour uniquement à Belfort.

  • Positionner Belfort, comme centre d’excellence mondial (i.e. capacité de définir sa stratégie, de proposer et de gérer les budgets, en lien avec des ressources suffisantes), dans les activités d’ingénierie proposées par le Projet Industriel : Hydrogène, Energie à la demande, Centrale 4.0, Estimation des coûts…
  • Présenter pour chaque axe du projet industriel pour les 3 prochaines années, le calendrier, les ressources allouées ainsi que le budget total de 50 millions d’euros minimum conformément aux orientations stratégiques.
  • Présenter le plan d’action avec le budget et les ressources alloués pour atteindre l’objectif de la création de 200 emplois à horizon 2023.

Pour un monde industriel d’après, plus responsable et souverain, General Electric, symbole de la désindustrialisation, du dumping social et fiscal, doit écoper d’une condamnation exemplaire pour dissuader d’autres vautours de vouloir dépecer notre patrimoine industriel, et les salariés doivent obtenir les moyens de défendre leur outil industriel contre la désindustrialisation financière.

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