Eels : traumatisant

Eels

Pour un premier album, quelle entrée en fanfare dans le monde impitoyable des charts! Eels peut se vanter en effet d’être le premier groupe signataire du célèbre label de Spielberg, DreamWorks. Une incursion du studio hors Hollywood réussie, puisque l’album compte parmi les disques majeurs de l’année 1996. A l’écoute, on comprend bien vite que cette musique-là est trop arrangée, trop iconoclaste, trop inclassable pour se rattacher à quelque chose de connu à ce jour. Mark Oliver Everett (plus connu sous le nom de E) est le fils d’un brillant scientifique, auteur de la théorie des univers parallèles infinis. A l’instar de son père avec la science quantique, le fils ne fait rien comme tout le monde de sa musique.

Dès l’intro de «Novocaine For The Soul», une atmosphère douce d’oppression étrange se déroule paresseusement. Car E et son groupe (Butch à la batterie et le bassiste Tommy Walters) cultivent leur différence monstrueuse et belle, comme l'annonce le titre du disque. Leurs chansons évoquent ainsi les délires d’un fumeur de crack dans «Susan’S House», la tentation de racheter le monde pour le sauver morceau par morceau («Rags To Rags») ou l’amour pour une petite fille difforme («Beautiful Freak» et «My Beloved Monster»). Musicalement, on note une maîtrise du cut, du blanc et du silence hors-norme : le vide devient sens. Volontiers mélancolique, l’album évoque le Radiohead des débuts : guitare électrique et percussions accompagnées d’une voix marquée. L’excellent «Guest List» aux accents blues côtoie le poignant «Spunky» qui narre l’histoire d’un aveugle. La plongée aux Enfers continue avec «Your Lucky Day In Hell» qui parle du râle d’un mourant, pour se finir sur une rupture («Manchild») rappelant REM. Ma chanson favorite de l'album. Dès ce premier album qui cultive le merveilleux et le déprimant avec bonheur se profile un groupe culte. La suite ne fera que renforcer cette impression.

https://www.youtube.com/watch?v=oyQCOrVIRIg

https://www.youtube.com/watch?v=mvvBuubAxF0

LZ.

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