Pendant le confinement, l'usage du casse cailloux dans les prés s'est propagé sans état d'âme de la part d'agriculteurs provoquant la colère des riverains assistant, impuissants à ces scènes de destruction et d’arasement des affleurements rocheux. Faisant suite à de nombreux articles dans la presse, la préfecture a réuni autour de la table différents services de l’Etat, le Conseil Régional, le PNR du Haut-Jura, des acteurs du monde agricole (FDSEA, Confédération Paysanne du Jura et Coordination Rurale), une entreprise de travaux agricoles, qui utilise le broyeur de roches et des associations de protection de la nature (Jura Nature Environnement, le Conservatoire des Espaces Naturels de Franche-Comté, …) afin de discuter de cette problématique.
Le choix de mettre en place une charte de « bonnes pratiques pour l’usage du broyeur de roches », à l’instar de celle établie dans le Doubs, est apparue comme la solution permettant de résoudre les problèmes provoqués par cette pratique.
Cette charte incite les agriculteurs à formuler une demande préalable de destruction. Elle n’est ni obligatoire, ni contraignante et sera instruite par la DDT, la Chambre d’Agriculture et le Conservatoire des Espace Naturels de Franche-Comté. Les affleurements rocheux à détruire sont classés en 4 catégories, permettant aux services instructeurs de délivrer un avis favorable ou défavorable.
Le Conseil d’Administration de la Confédération Paysanne du jura a pris la décision de ne pas signer cette charte, qui pour nous « normalise » la pratique du broyage de roches, symbole d’une intensification annoncée des pratiques agricoles en zone de montage. Nous sommes convaincus que l’agriculture paysanne, adaptée à nos filières de qualité, peut très bien se passer du casse cailloux !
Nos arguments en défaveur de l’usage du casse cailloux, sont à retrouver dans le courrier ci-joint, adressé à monsieur le Préfet.
Monsieur le Préfet,
Le débat interne à notre syndicat, sur la charte de bonnes pratiques du broyeur de roche, nous a amenés à souligner l’importance du travail pluristructurel coordonné par les services de l’Etat sur le sujet, bien que les filières en AOP n’aient pas été associées aux travaux.
Nous avons également pointé certaines lacunes dans cette démarche, qui nous conduisent à prendre la décision de ne pas signer cette charte.
Les manques, qui ont motivé notre choix sont les suivants :Le caractère non contraignant de la charte ne freinera pas l’augmentation de l’usage du broyeur de roche et rend, à notre sens, la procédure inefficace aux yeux des citoyens.
La pertinence de l’usage du broyeur de roche n’a pas fait l’objet d’un débat contradictoire, permettant de porter au débat l’ensemble des conséquences possibles de ses usages.
L’usage du broyeur de roche est en incohérence, avec l’image et la communication de notre territoire et de ses AOP. Les caractéristiques naturelles de notre massif font la richesse et la singularité de nos produits, nous devons les défendre et continuer à adapter nos pratiques aux contraintes qu’elles imposent, et non l’inverse !
La sous estimation des conséquences environnementales du broyage de roche et de son caractère irréversible. Cette charte nous semble en contradiction avec les engagements ministériels en matière de développement agro-écologique (plan d'action globale pour l'agro-écologie 17/01/2017).
La surestimation du bénéfice agronomique et des réels gains de productivité, tel que souligné par le laboratoire Chrono-environnement, nous semble être des arguments suffisants pour questionner la pertinence de cette pratique énergivore.
Enfin, l'intensification programmée, dont le broyeur de roche est l'un des symboles, va totalement à l'encontre du projet d'agriculture paysanne défendu par la Confédération paysanne et souhaité par une part de la société civile.
Pour toutes ces raisons nous ne souhaitons pas promouvoir des bonnes pratiques en matière d'usage du broyeur de roche.
Nous restons bien évidemment disponibles pour répondre à vos questions.