Cannabis, une répression inefficace

Selon l’observatoire français des drogues et des toxicomanies, 17 millions de Français ont expérimenté le cannabis dans leur vie, tandis que 4,6 millions en consomment occasionnellement et 1,4 million régulièrement. La France est le pays d’Europe où cette consommation est la plus élevée. Elle serait également le pays où le cannabis consommé est le plus nocif, notamment parce qu’il est mélangé avec du tabac. Chacun en convient, la consommation régulière de cannabis présente des dangers pour la santé.

Pourtant, à l’instar du professeur Dautzenberg, pneumologue et tabacologue, il me semble opportun, non seulement de dépénaliser le cannabis, mais aussi de le légaliser. Dépénaliser signifie maintenir l’interdiction de la vente sans poursuivre son usage. Le think tank Terra Nova pronostique également que la baisse de la répression entraînerait des économies, évaluées à 310 millions d’euros. Légaliser la consommation de cannabis permettrait d’aller plus loin dans la prise en charge de ce problème de santé publique.

Au préalable, il faut reconnaître que la légalisation d’une substance que l’on sait pouvoir être nocive pour la santé pose problème, car légaliser est une façon de légitimer et donc pourrait laisser penser que consommer régulièrement du cannabis ne pose pas problème, ce qui est faux. Mais d’une part, il n’est pas illégal de consommer de l’alcool ou du tabac qui ont également des effets nocifs sur la santé - et sans que cela empêche bien entendu de faire de la prévention - d’autre part la législation la plus répressive et prohibitionniste est corrélée en France avec une des consommations les plus élevées. Cela signifie qu’interdire et punir n’est pas forcément la meilleure façon de diminuer la consommation.

Légaliser permet de proposer des produits dont la qualité est contrôlée, permettant ainsi de diminuer l’effet négatif de la consommation. Légaliser permet également la vente dans des lieux sûrs et encadrés, à des personnes honnêtes et à des tarifs accessibles. C’est, en conséquence, une façon de lutter contre la criminalité car les consommateurs n’auraient plus de raison d’entretenir des trafiquants. Et si ces derniers n’y voient plus d’intérêt financier, ils arrêteront de chercher à en vendre, ce qui peut contribuer à la baisse de la consommation. À titre d’exemple sans prétendre tout démontrer, les Pays-Bas où le cannabis est en vente libre compte proportionnellement moins de consommateurs que la France, notamment dans la jeunesse.

Barbara ROMAGNAN

Chronique publiée dans L'Humanité le 7 mars 2016

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