10 000 ans et 40 jours

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10 000 ans de progrès, 10 000 ans de civilisation, pour aboutir à vivre chacun enfermé chez soi, en ayant peur du voisin, que l'on découvre et que l'on salue enfin, d'un sourire derrière un masque, derrière un foulard, derrière une peur institutionnalisée. 10 000 ans pour découvrir que l'on a un corps qui peut mourir, un corps qu'il faudrait peut-être faire bouger... et qu'on peut même le faire bouger sans machine électrique connectée sur un smartphone branché sur le cœur pour nous dire si on a fait un effort ou pas. 10 000 ans de progrès pour manger des pâtes, des pâtes et des pâtes, pour se rendre compte qu'on ne sait plus ramasser les fraises, qu'on ne peut plus ramasser les fraises... des bois, parce qu'en 10 000 ans on a transformé les forêts en champs d'arbres sans vie. 10 000 ans à construire des routes, des tunnels, des avions, à goudronner de la terre arable, pour s'apercevoir que les voitures ça pollue l'air des villes et qu'on respire mieux quand il n'y en a pas. 10 000 ans à brûler du bois, du charbon, du pétrole, du gaz pour se chauffer et finir en ayant trop chaud. 10 000 ans pour ne plus avoir le droit de voir ses enfants, ni sa famille, ni ses amis, pour ne plus pouvoir se faire la bise, se tenir la main quand ça va bien ou que ça va mal, 10 000 ans à faire des lois pour vivre ensemble et finalement vivre tout seul. 10 000 pour finir avec des tuyaux branchés de partout en guise de présence. 10 000 ans pour mettre nos proches, nos semblables en terre comme on met des ordures dans un incinérateur. 10 000 ans à réfléchir pour comprendre le monde et se rendre compte qu'on n'a peut-être rien compris à l'essentiel...

 

Depuis 10 000 ans, mon chat, lui, il traîne au soleil. Ou à l'ombre. Quand il a faim, il sort de sa torpeur, disparaît un quart d'heure et revient avec un campagnol dans la gueule. Puis il se trouve un nouvel emplacement en fonction de la lumière du moment, un endroit stratégique pour observer le grand spectacle toujours renouvelé de la Vie du Monde. En 10 000 ans mon chat, lui, n'a pas progressé. Aujourd'hui, mon chat ne me comprend toujours pas... mais je commence à comprendre mon chat.

 

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