Il semblait oublié sur une coin du bureau du maire.
Personne n'y a rien écrit.
Il faudrait donc que j'y mettre mes souhaits pour que notre société ait moins envie de marcher dans les rues pour un oui ou pour un nom, pour que tout tourne mieux, pour que toutes le couleurs de gilets aient leur place dans la ronde du Monde.
...
Si je devais écrire tout ce à quoi je pense, les pages de ce cahier seraient loin d'être suffisantes. Je laisserais donc d'autres écrire pour moi. Certains diront que c'est dangereux de laisser à des inconnus le soin de s'exprimer et de défendre leurs points de vue. Je sais pour ma part que, fondamentalement, ce seront mes idées : des idées d'Homo sapiens.
Et puis nous sommes en démocratie. Or en démocratie, il est parfaitement inutile et sans conséquences d'exprimer ou non, son opinion.
Cette évidence, les marcheurs de mai 68 l'avaient taguée sur les murs de la capitale :
La dictature c'est : "Tais-toi !!!"
La démocratie c'est : "Cause toujours !..."
Comment cela est-il possible dans un monde qui pense avoir gagné le droit de vote ?
Le vote : un droit fondamental. Une liberté... non reconnue.
La preuve en est que l'une des demandes emblématiques, des gilets jaunes et de l'ensemble de la population française, est la reconnaissance du vote.
Prévue dans la constitution, ne nécessitant aucun changement de mode de scrutin, ni aucune réforme, ni fonctionnaire supplémentaire, ni structure nouvelle, ce changement totalement gratuit, cette demande démocratique faite dans une démocratie pour assurer un fonctionnement démocratique, la demande de la prise en compte de l'expression populaire, la reconnaissance du vote BLANC est un marronnier des cahiers d'expression populaire.
Oui mais voila.
Accepter que le vote blanc exprime une opinion, accepter le refus de choisir ce que l'on n'a pas envie de choisir, suffit à mettre la République en danger.
Car accepter le vote blanc, c'est accepter que 82% des français n'ont pas choisi par adhésion, le Président qui les a incités à se mettre En Marche.
Quelle est la définition d'une démocratie qui donne le pouvoir à 1 homme soutenu par 18,19% de la population ?...
Il est clair que si le vote blanc était pris en compte, c'est lui qui aurait gagné le second tour de la présidentielle.
La démocratie mise face à elle même aurait alors basculé dans le grand vide qu'elle cache.
Reconnaître le vote blanc, c'est un brexit avec l'Histoire, c'est reconnaître l'échec d'une idéologie républicaine, c'est une remise en cause qui ne coûte rien économiquement, mais qui met à mal toutes les valeurs.
Si le premier principe d'une élection, le premier principe d'un débat public, à savoir la capacité à faire entendre sa voix et à faire reconnaître que l'on existe et que l'on pense, si ce premier principe n'est pas reconnu, à quoi bon écrire des pages de revendications ?!!!
C'est ainsi que le blanc d'un bulletin non pris en compte, jette une lumière crue sur la réalité de notre démocratie.
Pourtant, celle-ci est bel et bien administrée au jour le jour par tout un chacun grâce au vote quotidien permis par la carte électorale que l'on nomme carte de crédit, puisque c'est la seule à qui l'on accorde du crédit.
C'est comme ça : la loi du marché est celle qui marche le mieux.
Elle fait marcher les foules vers les magasins.
Elle fait marcher les gilets jaunes demandant du pouvoir d'achat.
Elle fait marcher les bonnets rouges qui en font marcher d'autres, pour le climat ou pour les coquelicots.
A bien y réfléchir, ce cahier oublié sur un coin de bureau ne peut être que le témoin d'une cérémonie funèbre : je lui confie donc mes sincères condoléances à la l'idée même de "démocratie".